[POINT DE VUE] Abbé Pierre : crachats sur une tombe
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J’irai cracher sur vos tombes. Ce titre d’un roman de Boris Vian publié sous le pseudonyme de Vernon Sullivan s’est imposé à mon esprit, quand j’ai découvert avec effarement, dans la presse parlée, à la télévision puis dans la presse écrite les accusations visant la mémoire de l’abbé Pierre, décédé, je le rappelle, le 22 janvier 2007, c’est-à-dire il y a plus de 17 ans. Un certain nombre de censeurs autoproclamés juges ont chargé une société privée d'« enquêter » sur des comportements qu’aurait eus l’abbé, il y a donc au moins deux décennies et plus. En fonction des déclarations de certaines personnes qui tout à coup se souviennent, la mémoire réveillée par d'autres témoignages, d’avoir eu à souffrir des comportements de celui qui restera le bienfaiteur des pauvres, la condamnation a été immédiate et sans appel. On ferme la fondation Abbé-Pierre, on enlève son nom et il n’est plus le fondateur d’Emmaüs. Des écoles, des salles de réunion et, pourquoi pas, demain, des rues ou des places vont changer de nom.
Mais dans quel pays vivons-nous aujourd’hui ? Une accusation devient vérité dès quelle est exprimée et vaut jugement définitif. Et cela est d’autant plus facile que le mis en cause n’est plus là pour se défendre. Le principe du contradictoire est une garantie d’équité. À quel titre des individus, quels que soient leurs titres ou leurs fonctions présentes ou passées, peuvent-ils ainsi effacer l’honneur d’un homme et ce que l’on doit appeler son œuvre ? En voyant ces décisions d’effacement d’une mémoire, on croit relire George Orwell, 1984. Quant à la présomption d’innocence, elle n’existe plus.
La presse sous toutes ses formes n’est pas un tribunal et les comités d’épuration non plus. Faut-il rappeler qu’aucune information judiciaire pour des crimes ou délits ne peut être ouverte contre des personnes décédées, même à la faveur de nouveaux éléments - fussent-ils accablants. Les accusations portées contre l’abbé Pierre ne seront jamais des vérités ni des jugements, et ceux qui se sont prêtés à quelque titre que ce soit à cet assassinat moral post mortem auraient certainement trouvé une place de choix au temps de l’Inquisition !
« Les coupables, il vaut mieux les choisir que les rechercher », constatait Marcel Pagnol, dans Topaze. Nous sommes entrés dans ces temps d’injustice.
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73 commentaires
Je n’ai jamais aimé ce personnage. Son côté show biz. Sa participation à des émissions de Michel Drucker pour solliciter des fonds, tout cela me donnait la nausée. Pourquoi ? Vouloir traiter de sujets aussi graves que l’extrême pauvreté en enfilant perles et lieux communs ne permet pas de traiter de telles questions. Ces sujets relèvent de la puissance publique. L’Abbé Pierre traitait de manière idéologique de sujets complexes mais concrets.
Vous devriez lire le journal Suisse le Matin, vous allez en apprendre de belles sur l’Abbé Pierre.
Merci infiniment pour cet article plein de respect et d’humanité, qui manquent cruellement à notre société en perte de ses valeurs fondamentales où l’injustice règne.
Vos mots justes remettent » l’église au milieu du village ».
Heureusement qu’on ne sait rien concernant Jésus, ils lui feraient un nouveau procès.
(humour)
Ces personnes qui « se souviennent » ont-elles été payées pour se souvenir???? L’important étant surtout de salir l’Eglise, il faut absolument déterrer des histoires de morts et bien les salir au lieu de se rappeler les bienfaits qu’ils ont faits. Tout est à l’envers en ce monde de perdition. Il vaudrait mieux sortir de vraies vérités sur des personnes autoproclamées au sommet de l’église.
On ne porte pas plainte 17 ans après le décès de celui qu’on accuse. Peu dignes de foi, ces femmes… sans doute « exhumées » par ceux qui travaillent à la destruction de l’Eglise !
La violence de la réaction publique est au niveau de la « starisation » hagiographique du personnage. C’est tout ce que l’on peut dire.
tout à fait d’accord !
Cet homme n’était qu’un humain avec ses travers et ses qualités. A idéaliser trop vite on en arrive à détester un jour. L’humain adore détruire ce qu’il a adulé un jour parfois avec le même aveuglement.
Idéaliser n’est pas vraiment être adulte ; cependant il y a une oeuvre importante, car si lui n’avait pas eu cet humanisme, qui l’aurait eu ? ; c’est pourquoi je pense qu’il faut dissocier le mal du bien, donc continuer à garder son nom pour les structures qu’il a mises en place, c’est lui et personne d’autres, mais en effet parler du mal, je ne sais comment, car l’Abbé Pierre a une grande responsabilité, celle de ne pas avoir démissionné de son sacerdoce tant que l’église ne voudra reconnaitre le mariage des prêtres . Ce qui est surprenant c’est que si l’église était au courant, alors pourquoi n’avoir pas aidé à cette démission !