[POINT DE VUE] Départ de nos troupes de Côte d’Ivoire : suite du déclassement

drapeau Côte d'Ivoire

C’est officiel. Ça l’était depuis quelque temps, mais en ce 31 décembre 2024, le président Alassane Ouattara a tenu à l’annoncer, dans son allocution de fin d’année. La base française de Port-Bouët, en Côte d’Ivoire, va être rétrocédée en janvier 2025 au gouvernement ivoirien. Le 43e bataillon d’infanterie de marine (BIMa) va plier les gaules. Tout cela s’inscrit, d’après les éléments de langage officiels de la France, dans une stratégie de « repositionnement » de la présence française en Afrique. Ça fait beaucoup de syllabes pour épeler le mot « retrait »… Ce repositionnement, qui intervenait après l’expulsion des troupes françaises de trois pays sahéliens (Mali, Burkina, Niger), a lui-même été « repositionné » par la décision du Tchad et du Sénégal, tout récemment, de mettre fin à leurs accords avec la France.

Très symboliquement, cette base, sur laquelle il y avait des marsouins depuis 1978, va changer de mains mais va également porter le nom d’un héros du pays : Thomas d’Aquin Ouattara, ancien commandant de tirailleurs dans l’armée française, devenu le premier chef d’état-major de l’armée ivoirienne au moment de l’indépendance.

Il y a, dans la rapidité avec laquelle notre armée et notre diplomatie se font éjecter d'Afrique, plusieurs éléments intéressants, qui ont naturellement une signification collective - nous déclinons - mais qu’il peut ne pas être inutile d’analyser séparément. D’abord, le premier coup de balai venait de juntes globalement hostiles à la France : au Mali, au Niger et au Burkina Faso, la haine de notre vieux pays avait quelque chose de moderne, à la page. Et puis, entre nous, c’était bien pratique pour détourner l’attention des opinions publiques, en Afrique et en Europe, pendant que les dictateurs se choisissaient des maîtres russes. Le deuxième moment, celui du Tchad et du Sénégal, est peut-être lié au piteux état de notre corps diplomatique - lequel, d’ailleurs, n’existe plus depuis quelques années, sur décision… d’Emmanuel Macron. La rétrocession des forces jadis prépositionnées correspond à notre déclassement : à quoi bon prépositionner des troupes en Afrique, puisqu’il est de toute façon exclu que nos soldats y soient employés ?

Plus précisément, comme l’expulsion du Tchad et du Sénégal symbolise l’échec du modèle diplomatique, le départ de nos troupes est peut-être, aussi, le symbole de la fin d’un autre modèle : celui des troupes de marine, jadis troupes coloniales, auxquelles appartiennent presque tous les régiments situés outre-mer. Nombre des chefs de l’armée de terre et même des armées de ces quarante dernières années y ont servi. Arme prestigieuse, composée de régiments d’élite, elle a longtemps recruté les premiers de classe, attirés par le prestige historique et la certitude de séjourner outre-mer plusieurs fois dans leur carrière, privilège de la « coloniale ». Les troupes de marine ont réussi en Afrique, en cinquante ans d’accords techniques de défense, à former plusieurs fois le volume des armées du continent… En se demandant aujourd'hui, malheureusement, si cela n'a pas été en pure perte. Le départ de Port-Bouët n’est, en somme, que l’un des derniers clous sur le cercueil de cette armée de tenues blanches qui fit rêver des générations de jeunes aspirant à une vie d'aventure sous les tropiques. Les temps changent.

Le jour où la France mettra un terme à sa présence militaire en Côte d’Ivoire va bientôt arriver. Nous n’avons pas de plan B ni d’autre continent dont on pourrait nous expulser. C’est peut-être cela, la question qu’Emmanuel Macron, comme il le disait mardi soir dans ses vœux, nous posera (Monsieur est trop bon de nous demander notre avis !) : la France doit-elle poursuivre ses efforts pour devenir un pays du tiers-monde ?

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Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

64 commentaires

  1. Nous avons perdu trop d’hommes , de temps et d’argent à soutenir à bout de bras tous ces pays .Certes notre armée a acquis une expérience mais elle n’est plus adaptée au format d’une guerre en Europe , nous y avons sacrifié notre corps mécanisé ,notre aviation et notre marine .

  2. Encore une brilliante réussite de notre brillant chef des armées dont il ne s’est pas vanté. Ayons une pensée pour tous ces jeunes soldats qui ont laissé leurs vies sur le sol africain pour la défense de populations dont l’ingratitude n’a d’égale que le mépris qu’affichent ceux qui profitent de notre générosité sur le sol métropolitain. Souhaitons enfin bonne chance aux pays africains quand ils seront sous la tutelle des Russes et des Chinois. Refusons désormais toute immigration en provenance de ces pays et supprimons la double nationalité pour ces ressortissants et renvoyons les chez eux. Économies assurées …

  3. La France n’a jamais accepté d’être vassalité, la résistance s’opérait autour de notre histoire, notre identité, notre économie, notre diplomatie, notre culture, notre fierté. Macron a systématiquement attaqué toutes ces particularités de notre pays, tout ce qui faisait notre force et assurait notre indépendance. Jamais un dirigeant de notre pays ne l’aura autant trahi. Il rêve de terminer le travail au niveau Européen, le projet de Jean Monnet enfin réalisé. Il ne reste plus que la chute de l’Euro et son remplacement par le dollar et la tutelle des hommes du FMI.

  4. Sans parler de l’effondrement économique global du pays, nous avons une perte catastrophique de nos DomTom (vous croyez la Nouvelle-Calédonie apaisée: elle ne l’est nullement) France démonétisée et ridiculisée dans les pays africains amis: Macron est un pur désastre pour la France, mais vous le voterez à la tête de l’UE, car il a encore le front de vous donner des leçons.

    • Un pur désastre pour la France, pourtant il a été réélu et a encore 24% qui croient encore en lui ! Mais avoir un Mélenchon au pouvoir serait aussi un pur désastre, pourtant des « députés voyous » ont bien été élus et réélus par des Français ! Auront-ils compris la leçon ? Avec le temps, beaucoup regretteront la France car ce ne seront ni avec les russes, ni avec les chinois que le sort des Africains sera amélioré, mais patience….

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