[POINT DE VUE] Influenceurs algériens : après le coup d’éventail, la gifle 

@Radio of Algeria/Wikimedia Commons
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Note de BV :

Le 30 avril 1827, à Alger, le dey Hussein avait souffleté d'un coup éventail le consul de France qui avait refusé de s'engager sur le remboursement d'un prêt. Le déclenchement d'une période de tension entre la France et l'Algérie qui débouche, trois ans plus tard, sur le lancement de la conquête française de l'Algérie.

L'article :

Avant même son élection en 2017 et après, Emmanuel Macron a affiché vis-à-vis de l’Algérie une attitude faite de repentance, d’abaissement, de soumission indigne de notre pays et de ceux qui ont travaillé, habité et aimé cette terre. Les nombreuses visites ont conduit nos représentants, qu’ils soient président ou ministres, à écouter sans broncher l’hymne national algérien, insultant pour la France, ou à visiter le mémorial des martyrs qui glorifie le souvenir de nos adversaires. Ce faisant, chacun de ces épisodes jetait un peu dans l’oubli ceux qui ont laissé leur vie dans le conflit, qu’ils soient militaires d’active ou appelés, civils victimes d’attentats ou harkis oubliés et leurs familles.

Depuis 2017, on a multiplié les visites, les gestes, les cadeaux, les aides au développement, les invitations, sans retour de la part de ceux qui gouvernent à Alger. Le Président a même chargé Benjamin Stora, historien, bien connu pour son engagement politique, de rédiger un rapport formulant des propositions pouvant apporter de l’apaisement dans les relations entre les deux pays. Parmi une foule de préconisations plutôt à sens unique en faveur d’Alger, il en est une qui, à l’époque, m’a indigné. L’idée de Benjamin Stora était de « faire des quatre camps d’internement situés sur le territoire français des lieux de mémoire » pour les milliers d’Algériens internés. Et de citer les quatre camps où ils furent détenus : le Larzac (Aveyron), Saint-Maurice-l’Ardoise (Gard), Thol (Ain) et Vadenay (Marne). À la signature des accords d’Évian, tous ces membres ou soutiens du Front de libération nationale (FLN) ont été libérés. Sur le Larzac, au camp de la Cavalerie où ils étaient détenus, ils ont été remplacés par des harkis et leurs familles que des officiers, contrevenant aux ordres, avaient sauvés du massacre. Dans ce camp où ont été « accueillis » 8.000 harkis et leurs familles, il faudrait, selon la proposition Stora, garder le souvenir des détenus FLN qu’ils avaient combattus ! Pourquoi un tel affront envers ceux qui ont risqué leur vie pour la France ? Pour plaire à ceux qui gouvernent aujourd’hui à Alger ?

Les chaînes d’information, ont diffusé, ces derniers jours, à la suite du dernier incident diplomatique avec le gouvernement algérien, les images de la rencontre du Président Macron avec le président Tebboune à Bari, en Italie, le 14 juin 2024. Rencontre au cours de laquelle notre Président donne un baiser sur chaque joue à son homologue, comme s’il retrouvait un père, sans que la pareille lui soit rendue. Une simple accolade eût été peut-être suffisante ! Puis, prenant la main du président algérien, les deux hommes vont faire une petite promenade sur les gazons du lieu de leur rencontre. C’est beau, l’amitié.

De la préoccupation à la condamnation...

Le 30 juillet suivant, réalisant peut-être, et il était temps, que ses cadeaux, ses reconnaissances de culpabilité affichées étaient sans retour, notre Président s’est souvenu qu’en Afrique du Nord, il y avait un autre pays auquel il avait tourné le dos mais qui, depuis longtemps, entretenait de bonnes relations avec la France et les Français. Par une lettre, la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental était reconnue et confirmée plus tard, lors d’un voyage officiel dans ce pays qui réserva un accueil magnifique à ce retour de la France.

Le 1er novembre, c'est un coup de barre vers l’est et vers Alger qui est donné avec, en ce jour anniversaire de « la Toussaint rouge » où furent massacrées les premières victimes des événements qui conduiront à l’indépendance, la reconnaissance par le Président Macron de ce qu’il a appelé « l’assassinat » d’un responsable du FLN Ben M’hidi par l’armée française. Notre ambassadeur a dû, sur ordre présidentiel, déposer une gerbe sur la tombe de celui qui était à l’origine des attentats à la bombe à Alger contre des civils. Pas de fleurs pour ceux assassinés ce jour-là dans les gorges de Palestro et ailleurs.

Le 16 novembre, Alger remercie pour ce geste en plaçant en détention arbitraire Boualem Sansal, écrivain franco-algérien qui doit sa naturalisation à notre président de la République. Lequel, en réponse, s’est dit « préoccupé » ! Il a fallu attendre, la semaine dernière, la Conférence des ambassadeurs réunie à Paris pour que l’on passe de la préoccupation à la condamnation !

La réponse ne s’est pas fait attendre. On pensait pouvoir se débarrasser d’un influenceur algérien qui déversait sa haine de la France, où il avait trouvé bon de vivre, sur les réseaux sociaux, mais dès son arrivée à Alger, il nous a été réexpédié.
C’est une gifle pour le gouvernement et surtout pour le Président Macron dont tous les gestes d’amour et de contrition ne sont pas compris ou pas encore suffisants pour ceux qui gouvernent à Alger. Et si, pour une fois depuis 2017, la réponse de la France se montrait digne de son Histoire ?

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Jean-Louis Esperce
Avocat honoraire. Ancien Bâtonnier.

Vos commentaires

3 commentaires

  1. La dignité ne semble pas être en chemin: Darmanin suggère de rétablir les visas des diplomates en sachant très bien qu’il suffit d’un visa Schengen pour se promener partout. Comment jouer les durs avec de la fausse action. Punir les dirigeants algériens ne servira à rien: ils continueront de se victimiser en entretenant la haine de la France. Il faut impérativement punir la population: la France vache à lait sert de service de santé à l’Algérie, de service financier et de zone d’emploi à tout le pays. Les possibilités sont nombreuses, et ce faisant on pourra désolidariser du peuple ainsi privé un pouvoir inquiet que sa population puisse lui demander des comptes. Mais chez Barrot Bayrou et Macron, c’est silence.

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