[Point de vue] Israël-Liban : que se passe-t-il au Proche-Orient ?

Capture d'écran
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Commençons par la seule bonne nouvelle de cette nouvelle page de la guerre interminable qui ravage le Proche-Orient : la mort d’Ibrahim Aqil. Le dirigeant de la force Radwan du Hezbollah a été tué dans un bombardement israélien sur la banlieue sud de Beyrouth. Ce quartier chiite a été lourdement frappé par l’aviation de l’Etat hébreu. Aqil était le responsable de l’attentat du Drakkar, qui, le 23 octobre 1983, a provoqué la mort de 58 parachutistes français. Nous aurions dû le faire nous-mêmes il y a bien longtemps. Voici enfin vengés les enfants de France tombés à son service.

Ceci étant dit, ce qui se passe en ce moment au Liban est particulièrement inquiétant, et il n’est pas certain que notre petit monde politico-médiatique, suspendu aux nominations ministérielles, en prenne l’exacte mesure. Le ministre de la Défense israélien, Yoav Gallant, a qualifié cette opération de « nouvelle phase de la guerre ». Il semble que les représailles d’Israël, à quelques semaines du triste anniversaire des attentats du 7 octobre, ne connaissent pas de fin. Bombardements sur Gaza, puis sur le sud-Liban, et cette attaque coordonnée, tout dernièrement, contre les moyens de communication de l’organisation terroriste chiite libanaise, soutenue par l’Iran. En-dehors de tout jugement moral, ces meurtres ciblés sont (techniquement) très réussis. Une manipulation machiavélique et létale, comme le Mossad sait les monter depuis qu’il existe : voilà de quoi redorer le blason des services de renseignement israéliens, un peu à la ramasse dans l’anticipation, mais toujours efficace dans l’élimination, comme ils viennent de le prouver.

Alors, que se passe-t-il et que va-t-il se passer ? Ce qui se passe, c’est l’extension du conflit, décidée par Israël - un conflit qui s’étend désormais jusqu’à la capitale de cet Etat failli qu’est devenu le Liban, hier « Suisse du Proche-Orient », aujourd’hui mosaïque embrasée, sous la tutelle théorique de gouvernements fantoches qui se succèdent. Israël fait la guerre sur le sol libanais, l’ONU montrant une fois de plus son impuissance, malgré le vote de l'assemblée générale, le 18 septembre, réclamant la fin de l'occupation du territoire libanais par Israël dans les douze mois : une force d’interposition des Nations Unies, bien peu utile en la circonstance, n'est-elle pas déployée au sud du Litani ? De son côté, ce samedi 21 septembre, le Hezbollah a annoncé avoir tiré des roquettes depuis le Liban en direction de deux sites militaires israéliens. Face à ces attaques, le Israéliens ont relevé le niveau d'alerte sur une ligne qui va de Haïfa à la frontière nord. En même temps, les frappes sur Gaza se poursuivent : une frappe sur une école gazaouie a fait 21 morts ce samedi. Un cessez-le-feu est improbable, une escalade de la violence est le scénario le plus probable.

Cela répond, pour partie, à la question « que va-t-il se passer ? ». Le général Lecointre, ancien chef d’état-major des armées, disait dans une récente interview que la guerre n’était jamais sortie de notre spectre. Nous avions seulement commis l’erreur de l’oublier. Nous devons nous réhabituer au voisinage de la guerre, à la perspective de devoir la faire, à la résurgence des menaces existentielles contre notre peuple. Ce n’est pas une bonne nouvelle, mais gardons-nous de croire que le conflit israélo-palestinien ne dégénèrera pas sur notre sol. Gardons-nous également de croire que la guerre en Ukraine n’aura pas de conséquences concrètes sur notre nation - des conséquences qui iront au-delà de nos factures d’électricité.

Les frappes israéliennes vont se poursuivre. A l'heure où nous écrivons ces lignes, l'armée israélienne vient d'annoncer que des dizaines d'avions menaient des « frappes massives » dans le sud du Liban. L’invasion du sud-Liban peut faire partie des plans de Tsahal. Même si les Israéliens n’ont pas oublié leur débâcle de 2006, face à un adversaire libanais qui pratiquait la défense dans la profondeur avec maestria, ils n’ont sans doute pas l’intention d’en rester là.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

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