[Point de vue] L’écologie politique est morte. Vive l’écologie… réaliste !

Capture d'écran France Télévisions
Capture d'écran France Télévisions

Le peuple européen a rejeté, ce 9 juin 2024, l’écologie politique à une écrasante majorité. Les résultats sont sans appel. Les projections quasi définitives créditent les Verts européens de 52 députés, soit 20 de moins qu'à la précédente législature.

En France, la liste EELV de Marie Toussaint dépasse de peu le « minimum syndical » des 5 % et perd, à elle seule, 7 députés. En Belgique, où les européennes étaient couplées aux législatives fédérales et régionales, les Verts membres du dernier gouvernement subissent une déconfiture sans précédent, perdant plus de la moitié de leurs voix et 12 sièges, sur les 21 qu’ils détenaient. En Allemagne, la coalition SPD-Grünen du chancelier Olaf Sholz subit également un cuisant revers : les Verts perdent 9 sièges, sur les 21 qu’ils avaient acquis en 2019.

Hécatombe politique

L’hécatombe de l’écologie politique s’extrapole en partie à Renew, parti européen de la majorité présidentielle française, qui perd 23 députés (dont 9 pour la seule liste Hayer). Regroupant de grands partis libéraux comme les Réformateurs belges de Georges-Louis Bouchez, Renew est en partie gangrené par d’anciens écologistes comme Pascal Canfin (4e de la liste Hayer). Principal architecte du Pacte vert, Canfin est aussi l’ancien président de la peu recommandable ONG WWF financée, dans le passé, par la non moins recommandable société russe Gazprom.

Les Européens en général, les Français en particulier, ne s’y sont pas trompés. En sanctionnant l’écologie politique, ils ont rejeté massivement un projet suicidaire optant, sans le dire, pour la décroissance. Promouvant « un État-providence écologique européen », « l’obligation générale de non-dépassement des limites planétaires », « un fonds de souveraineté écologique », « un ISF climatique », « 100 % d’énergies renouvelables d’ici 2040 » ou encore « le statut de réfugié climatique », EELV a défendu sans succès tout ce que les Français rejettent massivement : davantage d’immigration, davantage de normes, davantage de dépenses publiques et davantage d’impôts. Un projet dont les plus démunis, privilégiant « la fin du mois à la fin du monde », auraient, comme toujours, été les premières victimes. Mais ne nous faisons guère d’illusion. La gauche a toujours considéré que le rejet de leur projet signifiait qu’elle n’en proposait pas assez. Il faut donc s’attendre à des propositions encore plus radicales lors des législatives.

Occasion inespérée pour la droite

Si on peut se réjouir de la déconfiture de l’écologie politique et punitive, cela n’exonère pas pour autant la droite de proposer une alternative réaliste. Pourtant, comme à l’accoutumée, cette dernière s’est totalement désintéressée du sujet, ramenant la question climato-énergétique au nucléaire, voire à un simple problème de pouvoir d’achat. Une stratégie très incomplète qui la rattrapera tôt ou tard.

Car si le réchauffement climatique est en marche, la transition écologique est en panne sèche. En effet, pendant que les Européens baissent modérément leurs émissions grâce à des politiques ruineuses type Pacte vert, les pays émergents privilégient légitimement leur développement. Et nous amènent irrémédiablement vers un monde à 2,7 °C de réchauffement climatique. D’autant que la géopolitique ne va pas vraiment dans la bonne direction : l’émergence d’une nouvelle logique de blocs coinçant l’Europe entre les États-Unis et les BRICS pénalisera le chemin vertueux vers un monde décarboné.

À l’occasion des législatives décrétées par le président de la République, la droite a une occasion inespérée de se saisir du sujet pour imposer un changement total de logiciel : sécurisation de l’approvisionnement gazier, relance rapide et agressive du nucléaire, y compris de 4e génération, réduction drastique des subventions destinées à des technologies vertes en pleine débâcle (énergies renouvelables, hydrogène, voitures électriques) et, surtout, rééquilibrage entre atténuation (qui concentre aujourd’hui 95 % de l’effort financier) et adaptation. Car, contrairement à l’atténuation qui, pour être efficace, se doit d'être mondiale (les gaz à effet de serre n’ont pas de frontière !), l’adaptation est territoriale. Sa mise en œuvre est, donc, techniquement et politiquement, beaucoup plus simple.

Adaptation de l’agriculture (tant au niveau des producteurs que des habitudes alimentaires) pour assurer notre souveraineté alimentaire, gestion du stress hydrique passant, notamment, par un grand plan d’amélioration du réseau de distribution d’eau responsable de 20 % de pertes, désartificialisation massive des sols urbains ou encore mise en œuvre de climatisation dans les lieux d’hébergement des seniors : la tâche est immense.

Réaffirmons, enfin, une évidence parfois contestée : on n’affrontera pas les changements à venir sans développement économique. Les incendies périméditerranéens de l’été 2023 en sont une preuve tragique : parmi les 40 victimes à déplorer, 36 étaient algériennes. Plus que jamais, la création de richesses est indispensable à la mise en place de politiques efficaces d’atténuation et d’adaptation.

Philippe Charlez
Philippe Charlez
Chroniqueur à BV, ingénieur des Mines de l'École polytechnique de Mons (Belgique), docteur en physique de l'Institut de physique du globe de Paris, enseignant, expert énergies à l’institut Sapiens

Vos commentaires

21 commentaires

  1. Les carottages de Vostok démontrent que ce sont les pics de température, tous les 100.000 ans, qui entrainent une élévation du taux de CO² dans l’atmosphère. Et non l »inverse. D’ailleurs les climatologues seraient bien en peine de nous expliquer que ce sont nos voitures à moteur thermique qui pourraient avoir causé le pic élevé du taux de CO² qu’il y a eu il y a 100.000 ans !

  2. Mazette, la carte de visite! Admiratif je suis! Jusqu’à ce que je lise : »les pays émergents privilégient légitimement leur développement. Et nous amènent irrémédiablement vers un monde à 2,7 °C de réchauffement climatique. » Bravo le savant! Avez-vous songé un instant que la vérité scientifique n’est pas forcément la propriété du GIEC? Alors éviter un tant soit peu leur propagande nous ferait du bien, merci.

  3. ATTENTION , Attention : aux dernières nouvelles la NUPES s’est reconstituée en vue des législatives ; LFI et EELV désormais en ordre de bataille rangée pour RECONQUERIR leurs positions tyranniques et sourdes aux désespoirs qu’elles induisent.
    Veillons au grain pour contrebalancer leurs offensives !!! Il y va de la vitalité de notre pays.

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