Le latin enseigné, victime de l’égalitarisme niveleur
Cet article a été publié le 05/05/2023.
À quelques jours de la rentrée des classes, certains peuvent encore se demander à quoi bon apprendre le latin, une langue morte ?
L'enseignement des langues anciennes ne se porte pas bien et son état continue de se dégrader. Le Figaro a publié un article intitulé « Pourquoi il est urgent de connaître son latin » pour montrer quel bénéfice on peut tirer de cette étude. Mais le combat est difficile : le préjugé de l'utilitarisme, qui proscrit ce qui n'est pas immédiatement rentable, et celui de l'égalitarisme, qui trouve son idéal dans la médiocrité, règnent sur la pensée des prétendues élites qui nous gouvernent.
L'enseignement du latin est malade – ne parlons pas du grec, qui est encore plus mal en point. Il subsiste tant bien que mal dans les collèges, où les professeurs font ce qu'ils peuvent pour conserver des élèves, mais il disparaît progressivement dans les lycées. La réforme du baccalauréat a sonné le glas des langues anciennes. Seuls 535 candidats, sur plus de 380.000 en filière générale, ont présenté la spécialité « langues et cultures de l’Antiquité » avec du latin à la session 2022. De plus, cette spécialité n'est pas offerte dans tous les lycées.
À quoi bon apprendre le latin, une langue morte ? Elle n'est plus utilisée dans l'Église, sinon dans quelques paroisses traditionalistes montrées du doigt par le pape lui-même. Son enseignement « fait désormais pâle figure à côté de matières à la mode comme l’informatique ou le codage », écrit Le Figaro. Quand l'option existe, sa place dans l'emploi du temps est dissuasive. Sans compter que l'on manque de professeurs, faute de candidats aux concours de recrutement, la pénurie d'élèves se répercutant ensuite sur les universités. En 2022, 50 candidats ont été admis à l'agrégation de lettres classiques pour 71 postes ouverts. C'est encore pire au CAPES, avec 55 admis pour 134 postes.
Pourtant, le latin est bénéfique à plusieurs égards. L'article du Figaro en donne quelques exemples, comme une meilleure compréhension de notre propre langue et de notre histoire. Il facilite un meilleur apprentissage de l'orthographe, du vocabulaire et de la grammaire. Il peut avoir, pour les élèves qui ont le plus de difficultés, une vertu thérapeutique. Mais, dans notre école, le sens de l'effort s'est perdu, la société n'y incite guère non plus, les technocrates au pouvoir restent les bras croisés en attendant que le latin meure définitivement.
Le ministre Edgar Faure fut bien mal inspiré quand il prit la décision de supprimer l'enseignement du latin en classe de 6e. Après 68, le latin est considéré comme une entrave à la démocratisation de l'école, un frein à l'ascension sociale, un facteur de discrimination - alors que c'est tout le contraire. Le préjugé de l'égalitarisme n'a pas fini de faire des ravages, affectant, en premier lieu, les enfants qui n'ont que l'école pour se cultiver et les tirer vers le haut, pour s'accoutumer à la rigueur de la langue latine, pour fréquenter Cicéron, Sénèque ou Catulle.
Vous l'aurez compris, les grands ennemis du latin et, plus généralement de la culture, c'est l'utilitarisme, qui confond le juste et l'utile ; c'est surtout l'égalitarisme, qui veille à ce qu'aucune tête ne dépasse. Emmanuel Macron, qui vient d'instaurer un « fonds d'innovation pédagogique » – comme si l'innovation était la panacée et une fin en soi –, s'accommode du déclin de l'enseignement du latin. Pour l'élite autoproclamée, l'école doit former des exécutants destinés à produire et à consommer. La connaissance du latin, en ouvrant les horizons et les esprits, risquerait de donner au peuple les moyens d'échapper à la soumission et de contester sa puissance.
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42 commentaires
Une chose positive au milieu de cet effondrement, de ce désastre annoncé de l’Education nationale, c’est que ceux qui ont parié sur l’apprentissage du latin et du grec et qui s’y tiennent, ont donc parié sur la culture générale, sur l’enrichissement personnel, sur la compréhension du monde par d’autres outils ouvrant d’autres portes intellectuelles et, qu’à coup sûr, ils feront partie de ceux qui s’en sortiront dans la vie. Quant à ceux qui préfèrent la culture SMS, l’écriture inclusive, le woke et les philosophies à la maître Gims, alea jacta est. Ils seront pour beaucoup les exploités de demain.
Pas exploités, mais EXPLOITEURS, car vivant à nos crochets !
J’ai fait 4ans de latin. Il est vrai que celà ne m’a pas beaucoup servi dans ma vie. Néanmoins celà m’a plu car j’ai pu mieux comprendre la langue française. A notre époque de feignant, l’anglo-saxon (sans conjugaison ni déclinaison) est plus facile à apprendre que le latin (qui possède les 2). Et puis, pour leur avenir, il est plus important aux jeunes d’apprendre la sexualité (à mon époque, on amenait la vache au taureau, ce qui faisait notre éducation) que le latin ancien. ;-)
« Quand l’option existe, sa place dans l’emploi du temps est dissuasive. »
Cela ne date pas d’aujourd’hui.
En 4eme, dans les années soixante, mes cours de grec étaient de 17h à 18h.(pour ne pas déranger les autres cours!). De fait, comme je ratais le car qui devait me ramener chez moi, j’ai du arrêter!
Pourtant le latin (qu j’ai pu continuer) et le grec permettent effectivement d’être plus rigoureux, plus cadrés.
De plus ces langues nous permettent de comprendre d’où vient nos mots, et le sens qu’ils ont à l’origine, car dans ces cours, on apprenait aussi l’histoire qu’ils sous-tendaient.
(ainsi « euthanasie » : « bonne mort »,certes, mais à l’époque, ce mot voulait dire mourir sur un champ de bataille, l’épée à la main!)
» une meilleure compréhension de notre propre langue et de notre histoire. Il facilite un meilleur apprentissage de l’orthographe, du vocabulaire et de la grammaire. »
Mais avant cela, l’apprentissage du latin était destiné àdévelopper l’esprit d’analyse et de synthèse. Traduire, c’était comme reconstruire un puzzle : tous les éléments doivent trouver leur place et sans les forcer, sans en laisser de côté…
Absolument !
J’ai fait dix ans de Latin, mais aussi du Grec et de l’Hébreu, et cela ne m’a pas empêché de pratiquer plusieurs langues, Anglais, Allemand, Italien et Espagnol, alors que je suis scientifique, mais à mon époque, il y a 60 ans, on ne publiait pas obligatoirement en Anglais et j’ai dû aussi m’initier au Russe, à l’Arabe et au Polonais. Je regrette seulement de ne pas avoir fait aussi un peu de Portugais, de Chinois et de Japonais.
Un bagage qui fait rêver… Compliments !
Je trouve plutôt que c’est de l’étalage !
Quand nous voyons la façon de parler et d’ écrire de la grande majorité des français d’ aujourd’hui, nous nous doutons bien qu’ ils n’ont jamais dû traduire « La guerre des Gaules » de César ! Mais bon, reconnaisons le, le nivellement par la base est une des grandes réussites françaises de ces 50 dernières années !!!
Pourquoi une population dont la langue maternelle n’est pas française apprendrait-elle le latin ou le grec ? Connait-on en France le % de jeunes enfants qui, in-utero, n’entendent qu’une langue non française. Quel est le % d’enfants qui, dès leur naissance n’entendent pratiquement qu’une langue étrangère car ils sont en nourrice chez la grand-mère non francophone. Nombre d’enfants sont récupérés à la sortie de l’école par leur grand-mère non francophone, chez elle ils regardent les chaînes TV en langues étrangères. La langue française, pour une bonne partie des enfants est la seconde langue ….. mais il ne faut pas en parler, ça pourrait stigmatiser. Il serait judicieux de supprimer l’option langue étrangère ou régionale aux examens. Il n’est pas normal qu’un Berrichon soit défavorisé par rapport à un élève issu de parents ou grands parents lui ayant appris in-utéro la langue étrangère optionnelle.
Excusez moi, mais je connais nombre de berrichons connaissant le latin, le grec (et même l’hébreu et le russe) et très doués pour les langues étrangères, même si leurs parents ne leur ont pas parlé in-utéro en grec et en latin ou autres.
Je connais également nombre d’auvergnats dans le même cas que les berrichons, et je suppose que l’on doit en trouver aussi chez les charentais, les lorrains , les alsaciens……
De plus, ils sont plus humbles et ont un égo moins surdimensionné que les parisiens par exemple.
Excellent merci.
Ainsi n’auront-ils plus jamais accès à ce que l’on appelait à juste raison la Culture, ce truc qui a été remplacé par la culture générale . Pauvre génération devenue incapable de comprendre sa propre langue.
Qui se souvient de JaCqueline de Romilly grande traductrice de Thucydide ?
Qui se souvient de Jacqueline de Romilly qui a défendu les langues mortes et traduit Thucydide ?
Elle disait que le latin qui était la base même de notre langue n’engendrait pas seulement par son apprentissage la compréhension du langage mais une manière de penser et la formation de la structure nécessaire à un cerveau bien fait. Ceux qui ne savent pas organiser leurs idées et ´ne maîtrisent pas une langue en employant le mot juste sont naturellement portés à s’exprimer dans les gestes violents et agressifs et leur comportement en est perturbé.
« ce que l’on conçoit bien s’énonce clairement
Et les mots pour le dire arrivent aisément «
Or ils ne viennent aisément que lorsqu’on les connaît et qu’ alors on comprend toute leur importance, le latin en est la base et il était indispensable autrefois à la formation littéraire si bien que l’expression « y perdre son latin » était synonyme de fiasco.
Le Latin, non seulement nous améliorait en français, mais en plus il nous donnait une culture à nulle autre pareille, mais il est bien connu que les épreuves de culture générale ont disparues des concours aux grandes écoles, où l’on voit des cours de français en première année à Polytechnique pour remonter le niveau de nombres d’élèves, belle réussite.
Le latin permettait aussi de structurer la pensée de façon quasi « mathématique », d’être à l’aise dans l’apprentissage de la langue allemande elle-même rigoureuse, de comprendre et mémoriser la transcendance de ce qui se transmettait à la messe ( catho) avant l’avènement de la « lingua » vulgaire pauvre en nuances pour s’adapter à l’indigence commune, laquelle a généré la débandade des églises et des curés ; Et, bien sûr, d’apprendre notre histoire commune et la structure de la langue française ( romane)
C’est clair, j’adorais lire César, Virgile ou Cicéron dans le texte, ce en province, là où vivent les illettrés, les riens qui roulent au gazoil en fumant des clopes.
Le »tout maths » a été désastreux. Il y a les matheux (exemple Borne, polytechnicienne) et les mathématiciens. Or un TRÈS grand mathématicien, Blaise Pascal, avait observé qu’il y a deux formes d’intelligence : » l’esprit de géométrie » indispensable seulement aux sciences théoriques et appliquées, et » l’esprit de finesse », indispensable à tout le reste. Pascal a admirablement maîtrisé les deux formes d’esprit. Mais cette seconde forme d’esprit, en voie de disparition – avec les conséquences que l’on voit en politique et économie (de type bruxello-mondialiste), et en philosophie (de type woko-islamo-gauchiste) – suppose une formation spécifique. La culture classique , le latin et encore mieux le grec, bien sûr, car ils imposent justement l’apprentissage de mécanismes mentaux non-matheux. Et il faut surtout ajouter les outils aristotéliciens et cartésiens de la pensée : observation, qualification, problématique, logique, dialectique et rhétorique. Plus rien de ceci n’est enseigné…et l’IA ne peux le remplacer ça. Nous devenons de plus en plus c…
Strictement exact . Où sont passés les esprits cultivés ? Partis avec les Dames d’antan.
Je pense que le latin aide à avoir un esprit matheux, du fait de la rigueur, et de l’esprit d’analyse.
Tous mes amis ayant appris ces langues me le confirment lorsqu’il nous arrive d’en discuter;
J’ai toujours pensé qu’un « matheux » sans latin préalable n’était pas un vrai matheux…Ca s’est vérifié: les ingénieurs issus de » maths moderne » ne sont que des super techniciens, il leur manque une dimension…
C’est dommage… j’ai adoooré le latin — à la base j’aime les mots — que j’ai commencé à étudier en 6ème au lycée (en 1959 !) et que je pratiquais couramment à partir de la 5ème. Le latin permet de mieux maîtriser le français et aussi de connaître l’histoire romaine. C’est peut-être une langue morte mais les cours étaient très vivants. C’était pour moi un vrai plaisir.
Oui, apprendre le latin est très utile pour maîtriser le français (et l’italien), car ces deux langues en sont directement issues. Mais depuis mon époque (bac en 1966, faites le calcul) il n’y a plus de thèmes ni de versions, plus de déclinaisons ni de conjugaisons, au lieu de ça ma fille a suivi des cours de « langues et cultures de l’antiquité » où on n’étudiait pratiquement aucun texte dans les langues d’origine. En fait, vu la nullité de l’apprentissage de la grammaire française au primaire, une véritable étude des textes latin « comme dans le temps » serait aujourd’hui au minimum problématique sinon impossible.
Mais à mon avis, un remède aux lacunes criantes en matière de grammaire française pourrait être tenté paradoxalement par un enseignement du latin parlé en commençant par des phrases très simples et un vocabulaire basique (dans le style des méthodes assimil). Les élèves apprendraient la grammaire latine intuitivement (comme les tout petits apprennent la grammaire de leur langue maternelle). Et avoir un effet bénéfique sur leurs notions en grammaire française.
J’ai pris l’habitude de compter sur l’orthographe pour éliminer les »hameçons »dans les mails à en-têtes de type officiel . Bientôt ce ne sera même plus un critaire certain .
Le Crit’air sert au classement d’émissions de pollution des voitures ! Ce dont vous parlez est le CRITERE !! Mais je suis d’accord avec vous en ce qui concerne les tentatives d’hameçonnage qui sont toutes truffées de « fotes d’ortografe » car c’est aussi mon critère à moi.
D’accord avec vous : ce ne sera même plus un CRITERE certain !!
On en revient encore et toujours aux stupidités socialistes de la pensée bas de gamme et scientifiquement invalide des Sartre et autres boiteux de la pensée prétentieuse.
Non, les Hommes ne sont pas égaux. Ils ne l’ont jamais été et ne le seront jamais.
Comme il y a des gens plus ou moins grands, il y a des gens plus ou moins intelligents, travailleurs, ou capable de bien mémoriser les choses.
Et tout cela ne dépend que très peu de l’acquis, c’est parfaitement prouvé.
Non, on ne choisit pas ce que l’on est et ceux qui prétendent le contraire ne sont que des religieux socialistes.