[Point de vue] Les Pays-Bas vont livrer des F-16 à l’Ukraine : un tournant ?

Super nouvelle, vraiment ? Difficile de voir ce qu'il y a de tellement super dans la livraison d'avions de combat, par deux pays européens, membres de l'OTAN, à un pays en guerre contre la Russie. Un nouveau pas pourrait bien avoir été franchi dans la redéfinition de la « cobelligérance ». Quand on donne des avions de combat à un pays, quand on forme ses pilotes, on peut peut-être considérer qu'on passe les bornes. C'est peut-être ce que considérera la Russie. Sergueï Lavrov, ministre des Affaires étrangères de la Fédération de Russie, a affirmé en juillet que la décision de livrer des F-16 à l'Ukraine serait considérée comme une menace « nucléaire ». Certes, les Russes sont familiers de l'intox et on ne compte plus les menaces de bombardement nucléaire qu'ils ont brandies depuis qu'ils possèdent la bombe. Ce n'est pas une raison pour les provoquer.

On oublie souvent une chose assez importante, dans le conflit russo-ukrainien : ce n'est pas une guerre sainte. Il n'y a pas de gentils. Les pro-Russes béats sont aussi stupides que les ukrainolâtres. Aux admirateurs de Poutine, qui murmurent « ça, c'est un chef… » avec une fascination femelle pour les « gorilleries » du Kremlin, on rappellera que le président russe (outre sa communication discutable) est un patriote, mais un patriote russe - et que nous ne sommes pas russes, nous (certains youtubeurs ont l'air de l'avoir oublié). Aux laudateurs de Zelensky, qui pensent qu'il a suffi de quelques mois à cet humoriste pour assainir un pays rongé par la corruption, on opposera les tripatouillages de son entourage, avec ou sans implications outre-Atlantique. La Russie a envahi un État souverain, mais l'Ukraine, appuyée sur les fourbes accords de Minsk, se réarmait en secret. La Russie se veut rempart de l'Occident chrétien, mais elle a des taux apocalyptiques de divorces, suicides, consommation de drogues dures et GPA à prix d'or. L'Ukraine voudrait être le flambeau des valeurs humanistes, mais beaucoup  de ses élites (hors du célèbre bataillon Azov) admirent toujours le nationaliste pro-nazi Stepan Bandera. Rien n'est donc simple, rien n'est manichéen, et ce n'est certainement pas le discours pour idiots des chaînes d'information qui va nous aider à y comprendre quelque chose.

Alors, cette livraison de F-16, un tournant ? Pas vraiment. Les vrais changements de paradigme ont lieu ailleurs : la Pologne réarme massivement et va peut-être sortir de sa soumission aveugle à l'Amérique pour retrouver une politique de défense autonome ; l'Allemagne, malgré le lavage de cerveau de la « dénazification », a eu le courage de trouver cent milliards pour se reconstruire une armée (preuve que ce peuple qui, depuis 1945, porte des sandales à scratch n'est jamais bien loin de remettre ses bottes). Si l'Ukraine et ses alliés communiquent sur cette livraison, c'est probablement parce qu'un tel « affichage » fait oublier l'enlisement de la « contre-offensive » ukrainienne et, plus généralement, du conflit.

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