[Point de vue] Nouveauté : les pharmaciens peuvent délivrer des antibiotiques

PHARMACIE

Il existe depuis toujours, en France, des médecins dits propharmaciens (environ deux cents aujourd’hui) qui ont le droit de vendre à leurs patients les médicaments qu’ils prescrivent. Parce qu’ils sont installés dans des communes rurales ou de montagne, très peu denses, dépourvues de pharmacie avec, souvent, une clientèle âgée et peu mobile.

Pour éviter les tentations mercantiles, cette pratique est heureusement très encadrée, tant par l’Ordre des médecins que par les préfectures, qui ne les autorisent que par arrêtés.

Nouveauté depuis le 19 juin, les pharmaciens peuvent également délivrer - en clair, vendre au bénéfice de leurs propres entreprises - des antibiotiques face à une angine ou à une cystite. Il s’agit, bien sûr, de pallier, quoique très modestement, la difficulté d’accès aux soins consciencieusement organisée par nos élites politiques depuis des décennies.

Ce furent d’abord des délégations de tâches techniques à des paramédicaux, mais toujours sous le contrôle et la responsabilité du médecin. Puis le premier renouvellement d’ordonnance sans repasser par le prescripteur. Puis le transfert total de tâches aux infirmières, sages-femmes, kinés, opticiens, etc. Enfin, aujourd’hui, la prescription de médicaments par celui qui les vend ! Alors quel sera l’épisode suivant ?

Et ne serait-il pas équitable qu’en échange, les médecins puissent, demain, prescrire et vendre des savons amincissants, des pastilles contre la mauvaise haleine, des oreillers anti-ronflement ou des crèmes contre les mains moites ?

Redevenons sérieux et ne vous inquiétez pas, « ça va bien se passer », comme dirait Darmanin : les pharmaciens disposeront d’une aide au diagnostic en ligne.

Mais la médecine, c’est un peu comme la natation, ça ne s’apprend pas par correspondance. Alors, espérons que cette aide évoquera l’hypothèse d’une leucémie aiguë devant une angine unilatérale traînante ou celle d’une pyélonéphrite débutante devant une cystite, et croisons les doigts pour que le système fasse moins de victimes que l’attente sur des brancards aux urgences...

On pourra taxer les syndicats médicaux de corporatisme, mais au tarif actuel ridiculement bas de la consultation, si le médecin ne conserve pas dans son activité un volant de consultations simples, à faible valeur ajoutée, plus courtes, qui lui permettent de garantir le modèle économique de son activité, le système libéral est mort.

Mais c’est peut-être le but d’un pays en voie de sous-développement...

Richard Hanlet
Richard Hanlet
Médecin en retraite, expert honoraire près la Cour d'appel de Versailles

Vos commentaires

59 commentaires

  1. Qui se souvient encore de ce vieux dicton plein de sagesse :  » Chacun son métier, et les vaches seront bien gardées. »

    • Pour continuer dans la métaphore animalière, un autre proverbe dit : « faute de grives, on mange des merles ». Il n’y a plus personne pour garder les vaches et nous manquons de grives, si la France continue sur cette lancée, on finira par manquer aussi de vaches et de merles … comme ça, plus de problème !

  2. Je ne suis pas un perdreau de l’année, hélas et je n’ai jamais vu un tel « foutoir » dans le système de santé. En ce qui concerne la prescription d’antibiotiques par un pharmacien, vu les délais d’attente pour avoir un rendez vous chez un médecin, ce sera peut-être un moindre mal, pour traiter précocement une affection médicale, à condition de limiter ces prescriptions dans le temps. D’autre part les pharmaciens, tout comme les médecins, peuvent avoir accès à un logiciel, qui les oriente dans le choix des médicaments en fonction des symptomes de la maladie, en effet lorsqu’on voit le médecin regarder avec insistance son écran, c’est pour avoir ces information la.

    • Dans le cas présent, la prise en charge est limitée à des situations très précises, la délivrance d’antibiotiques est limitée à quelques molécules. Le pharmacien est littéralement « sur des rails ». Si les conditions ne sont pas remplies, il doit orienter le patient vers une consultation chez un médecin ou aux urgences.

  3. Ayant travaillé à l’étranger dans des zones désertiques, j’étais dans une équipe pourvue d’une valise de pharmacie assez complète, et j’ai souvent pratiqué l’automédication. Aujourd’hui je vis en Asie dans un pays avec beaucoup de médicaments en vente libre. Je suis toujours vivant, le bon sens remplaçant la fac de médecine. Cette pénurie de médecins, que je crois fermement organisée par le Conseil de l’Ordre pour garder une demande de malades supérieure à l’offre de médecins, met la population dans une situation intenable, même pour trouver un généraliste, dans certaines parties du territoire. Alors qu’on ne vienne pas se plaindre que des médicaments commencent à circuler sans avoir été prescrits. Les médecins étaient bien contents d’avoir des queues à l’entrée de leurs consultations, faire attendre la clientèle et même la trier le cas échéant, mais ils ont trop exagéré.

  4. Exit la médecine libérale, les médecins devenant trop âgés et leur clientèle pléthorique, quel sera l’avenir du système médical en France ?

    • Désopilant : pour faire faire des économies à la Sécurité Sociale, il nous est aujourd’hui interdit d’aller voir un spécialiste sans être d’abord passé chez notre généraliste. Vous avez mal à l’estomac ? Pas question d’aller directement voir un stomato. Vous devez d’abord consulter votre médecin traitant qui va vous rédiger la lettre pour pouvoir y aller. Coût total : 26 Euros de consultation de généraliste qui s’ajoutent aux 100 Euros du spécialiste. Total, 126 Euros au lieu de 100. C’est la manière de faire des économies des Énarques… c’est ce genre de petites choses répétées 100 000 fois qui fait que la France a aujourd’hui une dette de 3 300 milliard d’Euros. Et ce n’est pas fini…

  5. Les économies, les restrictions, et en plus les vexations, pour les fourmis bossant ou ayant bossé toute une vie. Les gabegies, les désordres et un mépris profond envers les premiers par ces cigales, venues souvent pour cela de pays exotiques. Et ceux qui nous servent de politiques appellent cela l’égalité et la solidarité. Ba voyons…

  6. Pourquoi ne pas autoriser le pharmacien à prescrire des antihypertenseurs ? Le médecin fait une ordonnance pour la prise de tension. Le patient se rend à l’officine, le pharmacien prend la tension (il suffit de poser le brassard et d’appuyer sur le bouton, c’est dans les compétences du pharmacien d’appuyer sur un bouton). Si c’est au-dessus des valeurs recommandées le pharmacien délivre un traitement choisi dans une liste de médicaments fixés par décret. Vous commencez à voir où ça cloche ? Non ? C’est pourtant évident. Le médecin est censé prendre la tension lors de la consultation et décider ou non de la prescription, en sachant qu’une tension élevée sur une seule mesure n’est pas synonyme d’hypertension artérielle, cela doit être confirmé sur plusieurs mesures. Si on met sur le dos du pharmacien des tâches qui ne relèvent pas de sa compétence et sont sous-rétribuées, c’est parce qu’il n’y a plus personne pour les faire dans un délai et des conditions acceptables pour le patient (distance, facilité d’accès, temps d’attente, médecin n’acceptant pas de nouveaux patients, etc.) . Une téléconsultation (sans auscultation directe) est facturée 25€, une consultation en présentielle, c’est 26,50 € (30 € en décembre 2024). L’acte pour un dépistage cystite simple (infection urinaire) en pharmacie est facturé 10€ si le pharmacien ne délivre pas d’antibiotique, 15€ si le pharmacien délivre l’antibiotique, en sachant que dans tous les cas, la bandelette urinaire sera obligatoirement réalisée, ce qui n’est pas imposé au médecin pour le prix de sa consultation et d’ailleurs rarement réalisé en médecine de ville. Ce qui se profile derrière tout ça, c’est que l’état n’a plus les moyens matériels d’assurer les soins, on délègue donc le travail à d’autres professions (pharmaciens, infirmières,…) qui les réalisent dans des conditions très strictes, mais pour une moindre rémunération … car si les médecins manquent, l’argent manque lui aussi !

    • Je n’ai jamais vu un médecin faire faillite sauf peut-être s’il s’agit d’un fainéant chronique en bord de mer qui préfère le surf aux patients. Que les consultations soient plus élevés ok mais a condition de passer le temps nécessaire avec le patient ce qui est loin d’être le cas aujourd’hui. La majorité des médecins généralistes ne travaillent plus les samedi, dimanche et mercredi et pour certains les heures d’ouverture ne sont que de 7 h/jour et moins encore pour certains quand c’est l’heure du surf c’est d’ailleurs la même chose avec les véto tant pis pour l’animal ou faut-il dire tant pis pour les animaux qu’ils soient a deux pattes ou à 4

    • 0n y arrivera à déléguer certaines tâches, a-t-on toujours besoin d’un médecin BAC + 10 ou 12 pour intervenir sur des cas récurrents à faibles risques ? Je vais chez l’ophtalmo, une personne prend la tension de l’oeil, un autre fait un champ visuel, un troisième vérifie ma vue, le rapport est envoyé sur l’ordinateur du praticien, si il y a une anomalie je suppose que le logiciel le signale, et encore bientôt ce sera l’IA que fera le travail, ophtalmo arrive regarde vaguement si quelque chose ne va pas, fait l’ordonnance, n’écoute pas parce que c’est trop long ce que vous lui expliquez si vous entez que ça ne va pas, et passe 50 patients dans la journée. Ceci a quand même ses limites. C’est comme ça que suite à une opération de l’oeil j’avais un fil sous la paupière, pendant deux ans l’ophtalmo n’écoutait pas ce que je lui disais un jour j’ai parlé un peu fort, il a regardé à enlevé le fil, mais comme il faut faire vite il n’a pas désinfecté, pas donne d’antibios et j’ai failli perdre mon oeil, 8 jours d’hôpital quand même.

  7. Ce n’est tout de même pas la vente libre des antibiotiques.
    Voilà le résultat de la politique de santé. De moins en moins de moyens pour soigner les personnes de plus en plus d’argent pour les labos.

  8. Du grand n’importe quoi mais tout est bon pour faire des économies sur le dos des gueux payeurs et puis c’est pareil pour le recrutement des enseignants . Les français ne leur servent que de vache à lait : bosser payer , crever …

  9. Si l’état se rabat sur les pharmaciens, il y a de bonnes raisons à cela, il n’y a plus de médecins généralistes (et je ne parle pas des spécialistes) qui reçoivent des patients en urgence. Les patients débarquent à la pharmacie, au bout de trois questions, le pharmacien botte en touche et envoie le patient aux urgences … déjà débordées. C’est toujours curieux de voir un patient débarquer à l’officine avec deux ordonnances : une pour un TROD angine, l’autre ordonnance, conditionnelle, avec l’antibiotique qui sera délivré si le test est positif. Pourquoi le médecin ne réalise-t-il pas le test lui-même lors de la consultation ? Parce qu’il a mieux à faire ? Que ce n’est pas payé en sus de la consultation ? La CPAM ne devrait pas payer un acte supplémentaire réalisé par le pharmacien alors qu’il devrait être compris dans le prix de la consultation. Pour les cystites, c’est très encadré, il s’agit de cas très simples. Le pharmacien doit réaliser un questionnaire à l’issue duquel il pourra, soit orienter vers le médecin, soit réaliser une bandelette urinaire. En fonction du résultat de la bandelette il prescrira ou non un antibiotique (seuls 2 antibiotiques sont possibles). Combien de médecins réalisent une bandelette urinaire au cabinet devant une suspicion de cystite ? Bien peu, je le crains … Si le pharmacien se retrouve à faire le travail du médecin, c’est parce qu’il n’y a plus de médecins disponibles, que les urgences sont saturées ou que les médecins ne reçoivent plus les patients dans des délais acceptables pour les patients. Le pharmacien est le professionnel de santé le plus proche et le plus disponible, avec un maillage de 22.000 officines sur tout le territoire, des officines ouvertes 6 jours sur 7 (plus les gardes) de 9H00 à 19H00 minimum. Le délai d’attente pour avoir un pharmacien au téléphone ou en officine est de l’ordre de quelques minutes. Quand les généralistes offriront un tel service urbi et orbi, le pharmacien pourra retourner paisiblement à ses chères boites de médicaments sans se préoccuper du reste. Mais, soyons honnêtes, ce n’est pas le travail du pharmacien, qui, à la base n’a pas été formé pour cela, c’est une réponse de l’état devant une situation qui est dégradée. Et cela ne concerne pas que la santé, loin s’en faut …

    • Excellentes remarques; l’incurie de Macron conduit le pays à la catastrophe sanitaire, car après les pharmaciens qui pourra prescrire des médicaments ? N’importe qui à condition d’être un électeur de Macron ?: il est à craindre qu’il ne soient pas assez nombreux.

  10. On pourra faire l’éloge de « la nouvelle société » en disant que tout va se bien passer avec la modernité comme Chaban Delmas mais la faible valeur ajoutée du syndicalisme deloriste à permis une manne financière des grands syndicats monolithique. De plus, dans un gouvernement de droite.
    La droite moderne c’est comme la gauche, on est obligé d’apprendre mais à la fin on finit tous par ronfler…

  11. Nous sommes dirigés par des incompétents qui considèrent que tout peut être réalisé par n’importe qui. N’a t’on point entendu de la part d’un Président que celui qui cherche un emploi n’a qu’à traverser la rue. Messieurs les politiques, ce n’est pas parce que vous croyez tout savoir alors que vous détruisez la France, que toutes les professions sont interchangeables. Que chacun reste à sa place et fasse consciencieusement la mission qui lui incombe et les vaches seront mieux gardées.

  12. Téléconsultations, délégations de tâches aux pharmaciens, formation aux patients délivrée par les médecins de plateaux TV, etc.
    C’est décidé, je passe un CAP de médecin et je m’équipe d’un endoscope avec port USB pour ne plus coûter un rond à la sécu.

    • C’est l’uberisation de la société… Tout le monde aura le temps d’espionner le voisinage, de réfléchir sur le support utiliser ou les voitures suspectes.
      Vous ne couterez rien à la sécu mais pour la connerie citoyenne vous serez surement bénéficiaire. Un CAP policier offert par l’Etat sera surement prévu dans le futur.
      Cela me permettre de continuer à ne rien couter à la sécu, de rester au pire des cas avec les allemands mais de ne pas faire partie des nombreux profiteurs.

  13. Une tisane pour les médecins à la retraite qui commencent en avoir marre de Darmanin et d’Attal, c’est déjà le début d’un pays qui prends conscience qu’il est voie de tiers mondisation. Il faut dire également que la nouvelle génération de médecins n’est pas la même que l’ancienne. Elle a souvent du mal avec les personnes qui vivent dans le monde rural, peut être par peur de la mauvaise haleine, des mains moites mais surtout de l’isolement. En effet, le système libéral est d’une certaine manière mort puisque c’est un système basé sur le capitalisme financier au lieu d’être un capitalisme de production.
    On préfère d’abord penser à sa carrière ou à ses intérêts avant de penser à l’Etat.
    Cela permet par exemple d’éviter de parler de la crise de l’hôpital public.
    Par ailleurs, il faut dire que c’est souvent cette nouvelle génération qui pousse à utiliser de nouvelle technologies mais Il est pour l’instant difficile à évaluer cette impact réel sur les nouvelles technologiques en raison du grand nombre de domaines concernés .
    Il y a des initiatives qui permettent d’oublier le corporatisme comme le paiement en équipe de professionnels de santé en ville (PEPS), qui consiste à mettre en place, pour des médecins généralistes et infirmiers exerçant dans une structure de ville (maisons ou centres de santé par exemple), une rémunération forfaitaire collective à la place du paiement à l’acte. Cela permettra d’oublier les savons amincissants pour l’Etat depuis plusieurs décennies, même si cela reste encore expérimentaux comme la carrière présidentielle de Philippe Juvin.
    En effet, c’est bien un parcours du combattant pour redresser ce pays…

    • « Marre de Darmanin et Attal » mais je parie qu’en 2027, ils sont tous préoccupés par la future présidentielles, les veaux Français continueront de voter pour l’un ou l’autre pingouins, ils possèdent l’art de la communication à la perfection.
      Quant à la délivrance des antibiotiques, à part s’informer, se former en ligne, le « malade » sera t-il vraiment sincère, sur ces symptômes lorsqu’il réclamera ce médicament ?

  14. Je ne comprends pas pourquoi les pharmaciens qui font 6 années d’études je crois ne pourraient pas délivrer des antibiotiques pour les affections les plus courantes.

    • A la base, nous n’avons pas été formés pour cela. Poser un diagnostic et prescrire un antibiotique n’est pas anodin, il existe des situations complexes qui peuvent cacher une maladie plus grave. Le problème est en partie d’ordre éthique, le pharmacien qui est dispensateur de l’antibiotique, devient également prescripteur, ce n’était pas le cas auparavant. L’autre problème est que le pharmacien réalise un travail pour 15€, alors que le médecin le fait pour 26,50€ … pourquoi la CPAM doit-elle payer 26,50 €, alors que le travail peut-être réaliser pour un moindre coût ? Finira-t-on par laisser à la charge du patient la différence de tarif ? L’idée va bien finir par germer dans la tête de nos énarques. Cela dénote d’un glissement de la médecine vers la pharmacie et c’est le signal d’une situation qui se dégrade d’année en année.

    • parce que ses 6 ans d’études ne sont pas consacré  » aux soins de la maladie d’un patient dont il ignore tout ou à peu près » mais à la connaissance des produits qu’il vend!

  15. Tout va á vau-l’eau dans ce pays.
    Trouver un spécialiste (ORL et dermato pour moi en ce moment), c’est le parcours du combattant.
    Qu’alors y faire ? Rien. Que dalle. Nada.

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