[POINT DE VUE] Nouvelle-Calédonie, quelle solution ?

©Bastien Preuss/Wikimédia
©Bastien Preuss/Wikimédia

La situation en Nouvelle-Calédonie fait évidemment l’objet de toutes les attentions dans les mondes médiatique et politique. Chacun donne son angle de vue, mais un certain nombre de biais, d’oublis plus ou moins volontaires et de manipulations directes ou indirectes se percutent, tout cela dans un exercice assez classique, mais qui excède fortement bon nombre de Néo-Calédoniens.

À propos du racisme anti-Blanc

Il faut arrêter de parler de racisme anti-Blanc. Certes, cela est largement entendu depuis quelques jours, et même avant. Mais nous avons affaire ici, pour l’essentiel, à des meutes de délinquants avec le niveau intellectuel idéal pour avaler et hurler des slogans dont on leur aura bourré le crâne, comme, déjà, lors des manifestations précédant les émeutes, avec des « On va brûler Nouméa » et « On va tuer l’économie » qui semblent d’ailleurs découler tout droit d’une stratégie bien huilée. « Sale Blanc » venant compléter le tableau, avec une cible bien déterminée certes, mais à analyser de la même façon - pour prendre un exemple au hasard - que les échanges habituels entre fanatiques de l’OM et du PSG, dans quelques travées des tribunes, quand il serait donc inepte d’affirmer que Marseille et Paris seraient en guerre. Il convient donc d’arrêter de parler de racisme anti-Blanc comme si c’était une généralité, d’autant que l’immense majorité des Néo-Calédoniens veulent vivre en paix, ce qu’ils faisaient déjà, toutes ces ethnies se mélangeant avec bonheur dans tous les domaines de la société, à l’école, au travail, dans le sport, au culte, dans la rue et même sur les barricades de Voisins vigilants.

Un clivage qui n'est pas celui qu'on croit

Découlant de ce qui précède, il faut noter qu’un nombre non négligeable de Mélanésiens ou Kanaks veulent rester français et ne veulent pas de l’indépendance. Il faut donc se garder d’opposer Kanaks et Caldoches, ce qui est absurde. On peut, effectivement, remarquer que ce sont essentiellement des Kanaks qui sont indépendantistes et des Caldoches pro-français, et qu’on a donc des gens à peau foncée d’un côté et à peau claire de l’autre, ce qui, pour les esprits simples, évoque un problème de couleur. Non, la question est ailleurs, simplement idéologique.

La question de la partition

Les politiques loyalistes de Nouvelle-Calédonie n’abordent jamais et même réfutent la solution qui consisterait à proposer aux indépendantistes une partition de la Nouvelle-Calédonie. Ou, au moins, d’en discuter, et bien évidemment dans le cadre d’un protocole qui permettrait aux provinces Nord et Îles de se développer correctement, mais dans leur propre pays. La province Sud resterait, quant à elle, attachée à la France. Cette option de partition aurait l’immense intérêt de donner à chacun un territoire sans plus jamais de revendications. Cela coûterait un peu au Sud de rapatrier quelques personnes du Nord et des Îles, notamment en terres agricoles (qui pullulent), mais infiniment moins cher que les dégâts actuels. L’argument souvent prononcé pour réfuter cette option est l’exemple de Mayotte. Par ailleurs, l’équation est totalement différente, mais on pourrait aussi pointer une autre expérience, celle de la Norvège qui, jadis, s’est séparée de la Suède, dans quelques frictions, mais finalement avec le succès qu’on connaît. Intelligence et courage font souvent très bon ménage.

La solution

Et enfin, comment sortir de la crise actuelle ? Par un référendum local, mais cette fois-ci avec une autre question à laquelle souscrirait sans aucun doute l’immense majorité des Calédoniens : « Êtes-vous d’accord pour que tous les résidents de Nouvelle-Calédonie puissent y vivre en toute liberté, égalité et fraternité ? » Avec une règle additionnelle, celle consistant à rendre le vote obligatoire sous peine d’être radié des listes électorales pendant un temps. On aurait là une image parfaite de ce que veulent les Calédoniens, ce qui pourrait conduire les politiques, locaux et nationaux, à s’inscrire dans un projet politique fidèle à une réelle majorité de citoyens. À défaut, ceux qui refuseraient cette logique électorale conforme au modèle des votations helvétiques pourraient alors organiser leurs propres référendums dans leurs provinces respectives pour éventuellement s’acheminer vers leur indépendance.

Bertrand Mathieu
Bertrand Mathieu
Retraité du système bancaire (Tahiti, Nouvelle-Calédonie)

Vos commentaires

29 commentaires

  1. On parle de racisme anti-blancs, mais si les « colons » étaient Mélanésiens que dirait on ? Quand les USA ont envoyé des descendants d’esclaves noirs coloniser le Libéria je suppose que les peuplades autochtones noires forcément n’étaient pas ravies et étaient anti-noirs. Il y avait confrontation entre culture coutumière et culture importée des USA. En Nouvelle Calédonie il se trouve que les colons sont majoritairement blancs . Que peut bien penser un Kanak autochtone tradi de notre culture « universelle » française ? RIEN. Ce n’est pas pour cela qu’il a tord. Un peu d’humilité que diable. L’arrogance nous coûte plus d’un milliard d’Euros

  2. Soyez rassuré, le pyromane – pompier est parti là bas. Nous pouvons être assuré que la pire solution sera prise. Il est parti attiser le feu qu’il a allumé.

  3. Votre solution de partition a déjà été évoquée, mais ne marchera jamais. Elle ne rentre pas dans les plans des indépendantistes mélanésiens, pour une raison économique, qui avait, à l’époque, été annoncée à la télé locale par JM Tjibaou, et qui m’a été répétée par des indépendantistes de la tribu voisine de chez moi :  » Après l’indépendance, ne t’inquiète pas, ta maison restera bien à toi, on ne va pas te la prendre. Mais elle est bâtie sur le sol de Kanaky, et nous kanaks avons avec notre terre un rapport charnel, sacré. Donc le terrain où est bâtie ta maison n’est pas à toi, et tu nous paiera un loyer. » Et oui, c’est le plan ! Ils ont donc besoin que les blancs restent, et c’en est une des raisons. Par contre, quand les Accords de Nouméa ont été rendus publics, un politicien local m’avait dit qu’il comportait de petites lignes, en bas, qui restaient secrètes. Elles affirmaient que cet accord devait déboucher sur l’indépendance, avec le gel du corps électoral et trois référendums successifs si nécessaire ! C’est loupé, mais la promesse de l’Etat Français reste valide, dans l’esprit des mélanésiens.
    Par ailleurs il faut savoir que les natifs n’on jamais eu de langue commune, mais une trentaine de dialectes différents. Ce n’est que la langue Française qui leur permet de se comprendre entre eux. Or on ne peut parler de peuple que pour des gens qui parlent la même langue. Il n’y a pas de peuple Kanak en dehors de la France.
    La solution d’avenir pourrait être celle proposée par Pisani dans les années 80, et qui est reprise aujourd’hui par le mélanésien J. Lalié : une indépendance en partenariat ou association avec la France, formule dans laquelle chaque communauté pourrait trouver des motifs de satisfaction, au prix de concessions communes. Et qui aurait l’énorme avantage de bloquer l’ingérence chinoise, très voyante dans le Pacifique.

  4. Vous avez parfaitement raison en ce qui concerne le racisme anti blanc. C’est un slogan révolutionnaire qu’on leur a inculqué. Il n’y a pas de racisme en Calédonie et il n’y en a jamais eu. Par contre, la partition est impossible. C’est un doux rêve. Il est évident que le Nord serait attiré par la richesse du Sud et l’immigration entretiendrait la haine. Quant à l’obligation de vote, c’est pire. Notre démocratie s’oppose à la culture Kanak qui défend la Coutume, loi tribale fondée sur la famille et la spiritualité. Les médias se targuent de dire que la comparaison avec l’Algérie n’est pas possible. C’est faux. C’est exactement la même chose : un peuple vernaculaire colonisé par une politique de peuplement étranger. Rien à voir avec la France où c’est nous qui avons organisé l’immigration. Aujourd’hui, la seule solution définitive est l’indépendance. Les Caldoches et les autres choisiront entre le départ vers une autre contrée (certainement pas la France) ou la pauvreté.

  5. La position stratégique des iles du Pacifique et d ailleurs devraient être prise plus en considération par les gouvernants futurs et actuel .
    A part les mines de nickel rien qui crée de la richesse
    L état doit développer une activité manufacturière créatrice d emplois et de richesse, peut le tourisme .
    L ile est située idéalement pour ça au milieu du Pacifique. Mais il est plus facile pour des gouvernants incapables de prendre ces décisions rationnelles .Ils achètent la paix sociale avec des € .La relative proximité de celles ci avec l Asie et l Australie devrait leurs donner des idées.

  6. Problème racial NON? la plupart vivent en bon intelligence. Problème des quelques familles qui tiennent l’ile et en font un microcosme très onéreux ou tout est deux fois plus cher qu’ailleurs. Et les couts d’importation n’y sont pour rien. Puis il y a la culture Kanak chez les jeunes qui veulent vivre des rentes des tribus prélevées sur tout l’économie mais pas avoir un travail et pas apprendre à l’école. Le système des droits coutumiers, des droits de vote sélectifs, toute cette discrimination positive perverse au nom de la couleur ou des droits des tribus n’est pas une république et l’égalité des citoyens.

  7. Il serait utile de connaître le montant des transferts financiers du continent au profit de ce caillou. Il n’y a pas de solutions convenables. L’indépendance conduit à des migrations coûteuses comme l’ont démontré les indépendances africaines. La poursuite de la présence française est elle aussi ruineuse.

    • Un rapide calcul effectué sur la base des chiffres de la cour territoriale des comptes de NC et ceux du Haut-commissariat de la République permet d’évaluer ces transferts de l’Etat à environ 180 mds de CFP (soit 1.5 md d’€) qui comprennent les subventions au territoire et communes, les investissements propres de l’Etat pour l’exercice de ses compétences, les salaires des fonctionnaires d’Etat, les pensions civiles et militaires, la défiscalisation métropolitaine (par vraiment un transfert, mais plutôt un « manque à gagner » dans les recettes fiscales en métropole). Ces transferts représentaient en 2022 env 16% du PIB de la NC.

  8. Tout à faire d’accord avec Bertrand Mathieu. La partition des régions ou les indépendantistes sont majoritaires est la solution. Il s’agit d’un problème identitaire . Ils veulent être maître sur un territoire. Ce territoire existe. C’est la région Nord et les îles loyautés.

  9. Amen, dans quel monde vivez vous pour nier le racisme anti blanc, je l’ai vécu et je peux vous assurer que ce n’est pas une vue de l’esprit.

  10. Si un problème existe, il se doit d’être identifié, mais toute violence se doit d’être réprimée. Il faut donc, urgemment, mais équitablement que se réunissent toutes les parties locales pour que soient exposées les difficultés afin d’essayer de dégager une solution de compromis. Ces débats se doivent d’être honnêtes, c’est à dire non orientés comme sait si bien le faire le locataire actuel de l’Elysée.

  11. Ras le bol de payer les pots cassés pour tous les dégénèrés de la terre en mal de liberté. La première des libertés à leur accorder est celle de réparer leurs exactions mais ne rêvons pas Macron s’y rend avec le porte-monnaie des imbéciles qui paient leurs impôts… Nihil novi sub sole

  12. La solution: démission de macron et pas que pour la nouvelle calédonie, mais pour toute la France !

  13. Il ne faut tout de même pas se leurrer : si un mouvement indépendantiste (purement politique donc) existe et restera insensible à ce qui ne le satisfera pas, il existe une séparation économique très nette (il faut être aveugle pour ne pas la voir) entre Caldoches (Blancs « colons ») et Mélanésiens (Kanaks). Une certaine comparaison avec l’Algérie est possible : le colon travailleur, qui a mis le territoire en valeur, et le Kanak, à qui revient d’être (comme en Nouvelle-Zélande ou en Australie) la main-d’œuvre bon marché. Prolétaire sur sa terre, car il n’est pas un migrant. Et ce n’est pas caricatural. Ce n’est pas nécessairement la faute au colon, bien qu’il ait sa part ; plutôt à la société locale, les Kanaks étant bien soumis à des coutumes et lois tribales d’un autre âge qui ne leur amènent strictement plus rien, surtout lorsque la jeunesse voudrait sa part d’une vie moderne « à la française ». Et à l’état français, qui lui a failli malhonnêtement (se cachant derrière des accords politiques pour ne rien faire) des années durant à présenter (comme partout ailleurs) une politique économique usant des atouts locaux (taille de l’île, ressources marines, etc.) digne de ce nom. C’est de ces fautes que profitent les indépendantistes. Seule l’économie pourra les contrer. Mais déjà que le « ruissellement » est une farce et attrape en métropole, pensez-donc, là-bas !

    • Vous semblez oublier (ou peut-être ne le savez vous pas) dans votre approche que depuis maintenant 25 ans, avec le statut d’autonomie accordé à la NC, l’Etat n’a conservé sur ce territoire que les compétences régaliennes (+ enseignement sup et recherche), tout le reste ayant été transféré aux autorités locales, en particulier la santé, l’éducation (primaire et secondaire), la fiscalité, et l’économie. Donc non, l’Etat n’a absolument pas failli en ne présentant pas de politique économique : il n’avait pas à le faire puisque ce n’est plus de sa compétence… et autant vous dire que les autorités locales veillent jalousement sur leurs prérogatives.

      • Merci Monsieur, mais je n’oublie rien: le transfert des compétences par l’état est – sur les DOM-TOM comme sur les communes métropolitaines – une façon commode de s’affranchir de ses responsabilités. C’est un peu comme me dire que le chômage et la pauvreté sont la seule responsabilité des communes. On se demande pourquoi Macron fait-il alors des réunions « Bienvenue en France ». De toute évidence ça n’a pas marché en Nouvelle-Calédonie (NC). Où l’on ne parle, d’ailleurs, que de libérer Nouméa et la route de la Tontouta. (et le reste de l’île? Et Lifou, les Pins etc.) Les investissements dont a besoin la NC (et les autres Domtom) sont d’un importance bien trop grande pour pouvoir être réglées par la gestion locale. De cette dernière, le principe est à aussi regarder: l’argent part souvent en fumée en corruptions de tous genres; voyez Tahiti, voyez Mayotte, cette dernière ayant dû en son temps être repassée en département au vu de la gabegie. Mais vous avez bien raison en disant que les locaux veillent « jalousement » sur les prérogatives: attendez de voir en Corse, vous serez conforté. Bonne journée.

    • La phrase d’introduction de mon commentaire précédent n’avait pas vocation à « faire la leçon », juste à rappeler le cadre institutionnel qui régit ce territoire, très souvent inconnu du grand public et presque tout le temps éludé par les journalistes qui évoquent le sujet en ce moment. Si le ton vous a déplu, j’en suis sincèrement désolé. Il se trouve que je vis depuis suffisamment longtemps en Polynésie française pour, je pense, assez bien connaître le sujet de la répartition des compétences, et surtout celui de l’intérêt (indiscutable selon moi) de cette répartition, qui n’est pas une façon commode pour l’Etat de s’affranchir de ses responsabilités, mais au contraire une manière de responsabiliser pleinement les autorités locales (et à travers elles l’ensemble de la population qui les désigne). Est-ce que ce système fonctionne parfaitement ? Non évidemment (mais soyons honnêtes, et d’expérience, ce n’est pas pire qu’en métropole et le mille-feuille administratif). Est-il le plus adapté ? Assurément oui à mon humble avis, même s’il est parfois difficile à appréhender en métropole en raison d’une conception très centralisatrice du pouvoir (je pense même qu’il mériterait d’ailleurs d’être étendu aux DOM).

  14. Votre solution s’apparenterait à une communautarisation de la société de la Nouvelle Calédonie.Pourquoi pas , cela marche dans les pays anglo saxons .Je suis pour que la France conserve tous ses territoires d’outre mer parce qu’elle a participé à leur développement même si en ce moment pour de sombres calculs , les politiques de métropole laissent penser qu’ils se désengagent de nos contrées lointaines qui nous assurent tout de même une présence sur toutes les mers du monde . Mais l’heure est à la déconstruction et non la consolidation . C’est paradoxale alors que nos dirigeants se réfèrent au mondialisme de pratiquer cette sorte de vente à la découpe de tout notre patrimoine pendant que les pays anglo saxons redonnent vie à un commonwealth à l’occasion d’un brexit bien opportun … Est-ce que les australiens , les nouveaux zélandais , les nouveaux guinéens se posent ces questions tehniques par rapport aux maoris , aux arborigènes , aux papous etc alors que se forme une coallition pour contrer les vélléités économiques et territoriales d’une Chine très ambitieuse et qui a les moyens de celle ci ?

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