[Point de vue] Rima Abdul-Malak jappe contre Zemmour et Tesson

Rima_Abdul_Malak

Rima Abdul-Malak avait prévenu, au moment de laisser sa place à Rachida Dati : « Je quitte ce ministère, mais je ne quitte pas la culture. » Les deux tweets qu’elle a publiés depuis son départ sont parlants : l’un contre Zemmour, l’autre contre Tesson ! Elle qui reprochait à Justine Triet le « fond idéologique d'extrême gauche » de son discours à Cannes…

Javier Milei ayant montré l’exemple en Argentine, Éric Zemmour a dit vouloir supprimer le ministère de la Culture devenu, selon lui, « le ministère de l’endoctrinement woke ». Rima Abdul-Malak s’indigne : « Depuis que le général de Gaulle a créé le ministère de la Culture, il est le ministère de la liberté de création, de la rencontre entre les publics et les œuvres, toutes les œuvres. » Traduisons : de 34.000 av. J.-C. (date des peintures de la grotte Chauvet) à 1959, la liberté de création n’existait pas ?

De l’inutilité d’un ministère de la Culture ou des Beaux-Arts

Il semble, au contraire, que la liberté de création ait été grande par le passé et qu’elle se soit rétrécie avec les organes de gouvernement modernes. Rima Abdul-Malak a beau prétendre que le ministère de la Culture « ne sert aucune "idéologie" », il se fit le promoteur de l’art informel contre l’art figuratif au nom d’un progressisme définitif assumé par Malraux, avec un mépris non dissimulé pour les artistes fidèles au réel et condamnés à survivre dans les ténèbres extérieures au « monde de la culture ». Depuis les années 1990, ce ministère a élevé l’art contemporain au rang d’art officiel. Il impose partout un art en rupture avec tout (hormis avec les subventions). D’une subversion à l’autre, s’y agrège maintenant le wokisme dont Rima Abdul-Malak s’est fait le chantre.

En lieu et place d’un ministère de la Culture, Éric Zemmour souhaite « un ministère du Patrimoine et des Beaux-Arts ». L’intitulé est plus incarné, mais cela résoudrait-il les difficultés des artistes ? Pendant des siècles, ils s’en sont bien sortis en se gérant eux-mêmes, par le système des corporations. Après leur suppression (1791), la condition des artistes - et donc la création - se trouve dégradée. Les décideurs sont, au XIXe, des gens de lettres (cela ulcérait Paul Gauguin, cf. Racontars de rapin) ; au XXe, des marchands et des administrateurs. D’aucuns diraient : autant de parasites. Changer l’intitulé des bureaux est une chose. Rendre aux artistes la main sur leur destin en est une autre, ce qu’on appellerait « un changement de logiciel ».

Qui musèle qui ?

Éric Zemmour, selon Rima Abdul-Malak, ne souhaiterait que « museler les artistes ». Cela nous amène au second tweet, dans lequel elle publie un visuel orienté contre Sylvain Tesson et son parrainage du Printemps des poètes. Que signifie, au juste, « s’en prendre à un écrivain » sinon, d’une façon ou d’une autre, le museler ? Bien entendu, c’est permis parce que l’œuvre de Tesson est d’essence contemplative - autrement dit, « d’extrême droite ».

À ce sujet, l’écrivain Romain Guérin, auteur du Journal d’Anne France (Éditions Altitude, 2017), rappelle qu’il avait gagné le concours de poésie du diocèse de Lyon, il y a quelques années, et qu’alors, « les fils de Staline qui pétitionnent aujourd’hui contre Tesson » s’étaient acharnés contre lui. Ils auraient bien aimé que l’évêché retire son prix à « un activiste de la fachosphère. » (Son poème est à lire ici.)

L’ombre de Jean Genet plane sur la gauche

La gauche en est restée à Jean Genet, cet écrivain qui chanta les pervers, fit de l’inversion une valeur, du crime un acte vertueux, et s’engagea en faveur des Black Panthers… Un vrai profil de député LFI auquel il ne manque même pas « l’antisémitisme d’extrême gauche » dont il fut « un précurseur ». Ce soi-disant révolté contre la société fut gracié par le Président Auriol, défendu par Malraux à l’Assemblée, honoré d’un prix par Jack Lang. Genet est l’idole indéboulonnable de cette gauche, à laquelle Rima Abdul-Malak appartient en plein, et qui sort son revolver dès que la culture n’est pas la sienne.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

Vos commentaires

64 commentaires

  1. Dans quelques mois, personne ne souviendra plus d’elle, et c’est tant mieux. Mais au fait qui l’a nommée ministre si ce n’est Macron en toute connaissance de cause !

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