[POINT DE VUE] SNCF : à nous de vous faire détester le train

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Cela faisait longtemps.

On annonce 70 à 90 % de grévistes chez les contrôleurs de la SNCF, de vendredi à lundi prochain. Soit pour le week-end de milieu de vacances scolaires pour la zone C et au début de celles de la zone A. Une attention particulière, nous dit-on, sera portée au trafic en direction des Alpes afin de ne pas trop perturber les départs vers les stations de sports d’hiver. Quand l’on sait que moins de 8 % des Français vont skier, ces vacances sont surtout l’occasion, pour les Français, de retrouver leurs familles. Un petit tour sur les réseaux sociaux montre l’ire des Français, pris en otage, une fois encore, une fois de trop.

Les syndicats de gauche, une force décidément anti-familles

Quelles sont les revendications des futurs grévistes, pour la grande majorité affiliés à SUD Rail et à la CGT ?

Julien Troccaz, secrétaire fédéral de SUD Rail, l’explique sur le plateau de LCI lors d’une interview assez lunaire : les grévistes réclament la revalorisation d’une prime de travail (qui existe déjà, en plus de leur salaire de base) « qui prenne en compte les spécificités du métier de contrôleurs, des engagements sur la prise en compte de la pénibilité pour l’allongement des fins de carrière, le respect des engagements signés en 2022 à l’issue de la grève de Noël ».

Le journaliste un peu interloqué lui rappelle qu’il y a eu 30 grèves, nationales ou locales, en 2023, et déjà 8 en 2024, et que les salariés de la SNCF bénéficient de nombreux avantages, dont la circulation quasi gratuite sur tout le réseau, la réduction de 90 % pour le conjoint, les fortes réductions pour les enfants, les 16 voyages gratuits par an… avantages dont rêvent une bonne partie des Français, surtout depuis l’augmentation vertigineuse des tarifs de la SNCF. Se déplacer est devenu un luxe.

Un peu dépité, Julien Troccaz évoque les 1.500 euros de salaire de départ, hors prime de travail, la pénibilité non prise en compte.

« Quelle pénibilité ? » lui demande le journaliste. Ils travaillent parfois dès 6 heures du matin, et même parfois le dimanche, s’indigne le représentant de SUD Rail.

Comme beaucoup d’autres professions qui, elles, n’ont pas la possibilité ni même l’idée de bloquer tout un pays.

Mais la grève de la SNCF, c’est encore la journaliste Emmanuelle Ducros qui en parle le mieux. Dans une chronique enlevée sur Europe 1, elle rappelle que la SNCF a quand même recruté 450 contrôleurs en 2023, 650 en 2024, que 87 % des trains roulaient avec deux contrôleurs en 2023 et ce sera 100 % en 2024, qu’en trois ans, les salaires à la SNCF ont augmenté de 17 %, jusqu’à 21 % pour les salaires les plus bas, alors que l’inflation sur la période est de 13 %. Il n’y a pas de smicard à la SNCF, poursuit-elle, les plus bas salaires sont 10 % au-dessus du salaire minimum. Sans compter les primes sur les bénéfices, les primes de logement, les primes de transport.

Selon un sondage BFMTV/Elabe, 27 % des Français seulement soutiennent ce mouvement de grève, 52 % lui sont hostiles et 21 % indifférents.

C’est une première, qui montre l’énervement des Français face à une grève de salariés qui disposent de nombreux privilèges en sus de la sécurité de l’emploi, qui apparaissent ainsi déconnectés du réel, à rebours des protestations des agriculteurs qui, il y a à peine quinze jours, étaient massivement soutenues par les Français.

Et à l’opposé de la situation réelle de ces mêmes paysans dont la principale revendication était de pouvoir vivre de leur travail. Loin, bien loin de la reconnaissance d’une quelconque pénibilité, d’un réveil trop matinal ou de la traite des vaches « même le dimanche » !

Les réactions politiques ne se sont pas fait attendre. Florence Portelli (LR), sur X, dénonce : «Ce mépris récurrent des Français qui espèrent partir en vacances et sont pris en otage par les éternels pratiquants de la grève est un fléau français. »

Véronique Besse, quant à elle, a publié un communiqué où elle demande que soit réexaminée une de ses PPL pour limiter le droit de grève en période de vacances scolaires, pour trouver « un juste équilibre entre ce droit fondamental (le droit de grève) et le droit des citoyens à la mobilité, particulièrement pendant les périodes où ils se réunissent en famille ou profitent de leurs vacances ».

En bon adepte du en même temps, Gabriel Attal déclare « qu’il y a aujourd’hui chez les Français une forme d’habitude à chaque vacances scolaire à voir arriver la grève […] les Français savent que la grève est un droit constitutionnel, mais les Français savent aussi que travailler, c’est un devoir, notamment pour des Français qui travaillent toute l’année et qui, pour quelques jours, ont probablement envie de retrouver leurs familles. J’appelle à la plus grande responsabilité pour les Français. »

Cet « appel à la responsabilité » lancé à des grévistes du rail, aguerris et entraînés, sera-t-il suffisant pour stopper le mouvement ?

Beaucoup de circonlocutions qui sont avant tout un aveu d’impuissance et de manque de volonté politiques face à une situation de blocage récurrente, signe tout à la fois de la toute-puissance et de la déconnexion des syndicats de gauche.

Marie d'Armagnac
Marie d'Armagnac
Journaliste à BV, spécialiste de l'international, écrivain

Vos commentaires

58 commentaires

  1. Effectivement, quand on compare les conditions de travail des agriculteurs avec les contrôleurs, on a plutôt envie de ricaner jaune !

  2. Nous allons vous faire aimer le train…Belle publicité. La plupart du temps, ils ne sont même pas polis et aimables pendant les contrôles.

  3. Indécent quand on compare aux revendication et à la précarité des agriculteurs.
    1500 euros ? C’est ce que touche un professeur débutant après 4 ans d’études.
    Puis quand il s’agit de combler les déficits récurrents de la SNCF, l’État, donc nos deniers viennent à la rescousse.

  4. Eureka ! Je crois que j’ai compris pourquoi les cheminots font grève au moment des vacances ! C’est justement pour partir en vacances ! Ces cégétistes sudistes sont décidément trop forts !
    Le hic ? Ben les trains ne roulent plus… ;)

  5. Je ne suis pas prêt à abandonner ma voiture et l’avion. Ces gens sont paraît-il payés des qu’ils quittent leur domicile.

  6. Si cela ne pousse pas les usagers à se tourner vers la concurrence… Quant aux politiques, ils seraient bien avisés au lieu de pleurnicher dans les coins de déposer une proposition de privatisation de la SNCF. Nous ne sommes plus dans le pays dévasté de 1945 que diable !

  7. Lorsque Clément Beaune fut nommé de manière éphémère (heureusement) sinistre des transports, cela m’a remémoré un vieux slogan publicitaire (véridique) de la SNCF : « laissez vous prendre par le train »…

  8. A la SNCF Toulouse, Marseille … depuis au moins 50 ans le travail est interdit et il faut déposer un préavis de travail pour ne plus « grèver ». Ne faites plus jamais confiance à cette entreprise pour vos transports

  9. Ce qui est choquant c’est de constater la double bêtise, celle de “nos” grévistes payés avec nos impôts qui bénéficient d’avantages extraordinaires jamais énoncés: régime de retraite avec âge avancé, en déséquilibre financier permanent mais compensé par le régime général c’est à dire nous, calcul des retraites sur un dernier salaire revalorisé, transport gratuit pour la famille , congés supplémentaires, maison de vacances etc; tout cela est payé par nos impôts et ces fonctionnaires ne trouvent rien de mieux que de pénaliser ceux qui les font vivre; quant à l’Etat ou plutôt ce qu’il en reste, il refuse de prendre des mesures d’interdiction de toute forme de grève à l’occasion des vacances , ne parlons même pas des syndicats qui se fichent du bien être des français, bref les cocus c’est toujours nous le peuple bon à payer toujours plus

  10. c’est curieux cette propension à la SNCF, les grèves sont déclenchées toujours au moment des vacances… Ces pôvres cheminots tout de même, – avec les cadences infernales, – le charbon à charger pour faire marcher la locomotive, sans arrêt, – la biscotte qui se casse au moment même de faire « tchou ! tchou ! » Alors que les paysans se la coulent douce sur leur paille cé vraiment pa juste !

  11. Vraiment les Français ont une atrophie de la mémoire , les voir aujourd’hui, en majorité de sondage contre cette grève me réjouit, j’ai toujours été contre le pouvoir démesuré de ces syndicats de nantis, mais il y a peu de temps, lorsqu’ils étaient bloqués sur un quai de gare, passant la nuit dans l’attente et.dans le froid, ils disaient comprendre le mouvement des planqués du service ferroviaire.

  12. Celui qui en parle le mieux, c’est Karim Zeribi sur Cnews.
    Pensez donc : père cheminot, un beau-frère contrôleur et lui-même qui a travaillé et milité durant une quinzaine d’années au sein de ce joyau qu’est la SNCF !
    Grève justifiée car la « pénibilité » du métier de contrôleur n’est pas suffisamment prise en compte !
    Et il sait de quoi il parle, c’est son beau-frère qui le lui a dit. Et surtout, salaires bloqués depuis 7 ans ! Quand sur le plateau on lui rappelle les très généreux rattrapages opérés depuis, il réplique que c’est loin de les satisfaire !
    Alors oui à la pluralité d’opinion sur les plateaux d’info TV car celle de ce chroniqueur, majoritaire au sein de la SNCF, est essentielle au débat, parfois houleux mais nécessaire.

      • Je vous rejoins, mais il y a aussi des centres de vacances d’entreprises privées ou également des sommes confortables versées par l’employeur (chèques cadeau….).
        Il y aussi des colonies gratuites par les mairies, etc.
        Donc, soit on refuse tout pour tout le monde soit on accepte.

  13. Les QUINZE personnes de la CGT qui occupent des postes « clé » il faut les mettre dehors! et interdire les grèves pendant les vacances scolaires comme en ITALIE . Ce sont des « nantis » !

    • Pourquoi seulement pendant les vacances? Toute entreprise en situation de monopole ne devrait pas avoir le droit de grève.

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