(POINT DE VUE) Zemmour en campagne : que d’erreurs sur la forme et sur le fond !
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Le 30 novembre, à midi, le polémiste Éric Zemmour a fait acte de candidature à la prochaine élection présidentielle à travers une vidéo postée sur la Toile, vidéo dont la scénographie se voulait originale. Or, il n’en est rien. Le clin d’œil à l’appel du 18 juin 1940 du général de Gaulle est grossier. La qualité stylistique du texte, totalement en phase avec les essais de l’ancien journaliste politique du Figaro, est indéniable. Pour autant, l’équipe de communication du désormais candidat s’est inspirée de la scène finale du film The King’s Speech (Le Discours d'un roi), de 2010, le long-métrage de Tom Hooper narrant les circonstances obligeant le roi bègue George VI à annoncer à son peuple du Royaume-Uni l’entrée en guerre de son armée dans le deuxième conflit mondial, avec une anaphore usée : « Ce pays… »
Un texte de neuf minutes lu devant un micro de cette époque, qui plus est sur le même fond sonore : la Septième Symphonie de Beethoven, deuxième mouvement. Pire encore, chaque phrase est ponctuée par un extrait de film ou de reportage qui montre soit la France des trente dernières années soit celle des racailles, djihadistes et gauchistes. Une succession d’images digne des scenarii hollywoodiens, un montage enregistré deux semaines auparavant, mais sans tenir compte des ayants droit, et dont la finalité est, à juste titre, de manifester le danger de disparition qui guette la France, entre « dépossession » et « remplacement ».
En réalité, le staff de Zemmour, jeune et inexpérimenté, a pris conscience qu’il y a le feu au lac. Des soutiens de poids s’en vont déjà : la figure du souverainisme français Philippe de Villiers et le financier Charles Gave. Contre une « école des fans » qui voudrait dépoussiérer la communication politique à la Macron, en ayant en tête que la masse électorale est essentiellement constituée par les natifs des années 35-55, à qui la santé, la prospérité et la liberté sont toujours garanties contre vents et marées.
Mais que d’erreurs, sur la forme, pour celui qui s’était construit l’image d’un intellectuel brillant et pugnace : son dérapage au salon Milipol (le 20 octobre), son point-presse improvisé devant le Bataclan (le 13 novembre) et son doigt d’honneur à Marseille (le 27 novembre). Sur le fond, sa sous-estimation de la gestion mondiale du Covid-19, en ciblant toujours les Chinois et si peu la Silicon Valley. Enfin, surtout, l’incompréhension d’une société française durablement américanisée qui n’a plus le sens de l’Histoire et encore moins du tragique. D’où, sans doute, la nécessité de singer George VI pour se faire pardonner des maladresses a priori ou a posteriori, en proclamant qu’il veut « sauver la France ».
Seulement, le potentiel roi se laisserait dicter sa loi par sa principale conseillère Sarah Knafo, jeune énarque proche des milieux libéraux conservateurs, de plus en plus critiquée en interne : « Quand la tour de contrôle se déplace en même temps que l'avion, ça devient compliqué ! », explique un proche en « off » à Boulevard Voltaire. Le héros métapolitique de la droite nationale risque d’apparaître aux yeux du camp d’en face comme une personnalité nerveuse, fragile, voire tyrannique. Ou comment donner les verges pour se faire battre…. « On peut être plus fin qu’un autre, mais non pas plus fin que tous les autres », avait écrit La Rochefoucauld.
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