Pologne : l’européiste Tusk veut mettre un coup d’arrêt à l’immigration !

© Platforma Obywatelska RP
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Donald Tusk, le nouveau Premier ministre polonais depuis un an, n'est pas n'importe qui : chef historique du parti libéral de centre droit (PO), il a été une première fois Premier ministre de 2007 à 2014 avant d'exercer d'importantes fonctions européennes quand le parti conservateur Droit et Justice (PiS) était au pouvoir dans son pays : il a été, ainsi, président du Conseil européen (2014-2019) et chef du PPE (2019-2022), le groupe du Parlement européen rassemblant les eurodéputés de centre droit. Des postes qui lui ont permis de continuer sa bataille politique intérieure via les instances de l'UE, en œuvrant pour que son propre pays soit condamné par l'Union européenne pour « dérives illibérales ». La dernière de ces condamnations remonte à juin 2023, quelques mois seulement avant les élections qui l'ont ramené au pouvoir, à la tête d'une coalition.

Or, voici que cet européiste pur jus, qui n'a eu de cesse de pourfendre ses rivaux conservateurs de Droit et Justice, justement sur les questions d'immigration et sur leur opposition aux exigences de l'UE en la matière, vient d'opérer, ce samedi 12 octobre, un spectaculaire retournement. Il a en effet annoncé qu’il voulait suspendre « partiellement » le droit d’asile pour les migrants qui entrent illégalement dans son pays et qu’il demanderait à l’UE d’avaliser cette mesure ! À l'occasion d’un rassemblement de son mouvement, Coalition civique, il a tenu un discours très dur contre l'immigration, annonçant que la Pologne allait lutter « sans merci » contre l’immigration illégale. « Je dis tout haut aujourd’hui, a-t-il déclaré, que parmi les éléments de la stratégie de migration figurera la suspension territoriale temporaire du droit d’asile ». Le Premier ministre polonais a multiplié les attaques contre le pacte migratoire de l'UE : « Nous n’allons respecter ou appliquer aucune idée européenne qui […] enfreigne notre sécurité, et je pense ici au pacte migratoire et au contexte d’immigrations ». Des phrases historiques que ne renieraient pas une Giorgia Meloni ou n'importe quel chef des partis anti-immigration, à commencer par ses rivaux de Droit et Justice.

Si l'européiste Tusk a pris soin de justifier son revirement par la pression migratoire exercée par la Russie et la Biélorussie, avec la guerre en Ukraine, cette nouvelle position épouse sans le dire celle de la majorité de la population polonaise horrifiée, comme en Hongrie, des conséquences délétères de l'immigration africaine ou islamique dans l'UE. Le Premier ministre centriste polonais, lui, n'a pas eu peur de lier immigration et insécurité, en déclarant : « La Pologne doit être un pays sûr. Les Polonaises et les Polonais doivent se sentir libres. En sécurité et libres dans leur propre pays. D’où l’importance de notre politique migratoire ». Il a pris parti pour une politique d’immigration contrôlée par l’État : « L’État est là pour veiller à ce que viennent en Pologne des personnes qui veulent y travailler honnêtement, payer des impôts, s’intégrer dans la société polonaise et étudier ».

Par ce revirement historique, le Polonais Tusk vient de jeter par-dessus bord les anathèmes lancés contre les partis anti-immigration par les européistes dont il fut, il y a encore quelques mois. A-t-il senti que le vent tournait, aussi, dans les autres capitales, avec le durcissement du chancelier Scholz ? Quelle que soit la sincérité de cette volte-face, elle devient un argument puissant pour demander aux autres gouvernements de l'UE - et au nôtre ! - d'adopter enfin une réelle fermeté migratoire. C'est visiblement cette ligne que vont défendre les ministres de l'Intérieur auprès de la nouvelle Commission d'Ursula von der Leyen. Le Point rapporte que Bruno Retailleau, lors de leur réunion à Luxembourg, jeudi, a trouvé des alliés chez ses homologues allemand et néerlandais, l'Espagne seule s'accrochant à sa position laxiste, comme nous le dénoncions il y a quinze jours. Retailleau est plus isolé à Paris, face à son Président et son gouvernement, qu'en Europe désormais ! Les déclarations de Tusk viennent, en tout cas, de désavouer et de ringardiser nos immigrationnistes nationaux, à commencer par Macron.

Frédéric Sirgant
Frédéric Sirgant
Chroniqueur à BV, professeur d'Histoire

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