Pologne : une loi permettant de tirer sur les migrants agressifs à la frontière

© Platforma Obywatelska RP
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Confrontée à la recrudescence des assauts de migrants violents en provenance d’Afrique et du Moyen-Orient à sa frontière avec la Biélorussie, la Pologne renforce son arsenal juridique. Plus précisément, il s’agit, après le scandale lié à l’arrestation, en avril, par la gendarmerie, de trois soldats qui avaient tiré en direction de migrants agressifs, de clarifier les conditions d’utilisation de leurs armes par les militaires, les gardes-frontières et les policiers déployés à la frontière orientale du pays.

Lors du vote, la semaine dernière, de la loi « modifiant certaines lois afin d'améliorer l’action des forces armées de la République de Pologne, de la police et des gardes-frontières en cas de menace pour la sécurité de l'État », 401 députés (sur 460) ont voté pour. Seuls 17 ont voté contre, dont trois députés du parti libéral Plate-forme civique du Premier ministre Donald Tusk et 14 du groupe de La Gauche, qui fait lui aussi partie de la coalition gouvernementale.

La nouvelle loi précise qu’il n’y a pas délit lorsqu’un membre des forces de l’ordre ou de l’armée utilise son arme sans respecter les procédures s’il est confronté à un passage en force de la frontière. Elle précise aussi qu’un policier, un garde-frontière ou un militaire ne doit être arrêté pour avoir utilisé son arme de service qu’en dernier recours. En outre, tout policier, garde-frontière ou militaire faisant l’objet de poursuites judiciaires au pénal pour avoir utilisé son arme en violation des règles aura droit à un avocat commis d’office pour défendre sa cause.

Des couteaux attachés au bout de leurs bâtons

Ces derniers mois, les cas de passage en force par des groupes de ces migrants amenés en masse en Biélorussie par le régime de Loukachenko se sont multipliés. Ces migrants seraient, selon les médias polonais, instruits et entraînés par les services biélorusses et ils se servent souvent d’armes de fortune, comme des couteaux attachés au bout de longs bâtons, pour attaquer les Polonais en uniforme présents le long de la barrière construite par le précédent gouvernement du PiS. Cette barrière avait été décriée par Tusk et ses amis quand ils étaient dans l’opposition, et Donald Tusk lui-même avait condamné la politique de refoulements à la frontière du PiS en des mots très durs, expliquant à ses compatriotes que ces migrants sont de pauvres gens à la recherche d’une vie meilleure qu’il conviendrait d’accueillir.

Depuis qu’il a formé son gouvernement le 13 décembre dernier, Donald Tusk semble toutefois avoir fait volte-face, en tout cas en apparence. Après l’annonce de la fin des refoulements à chaud faite en décembre par le président de la Diète Szymon Hołownia (chef du parti centriste Pologne 2050, également membre de la coalition gouvernementale actuelle) puis réitérée en janvier par Donald Tusk lui-même, cette politique a finalement été maintenue.

Ces annonces semblent toutefois avoir été entendues dans les pays d’origine des migrants souhaitant s’expatrier sans autorisation en Europe, puisqu’on est passé, dans les mois suivants, de quelques dizaines de tentatives de passage forcé par jour à plusieurs centaines de tentatives quotidiennes au printemps. Et lorsque l’affaire des soldats arrêtés a éclaté, en juin, dans les médias, c’est un nouveau signal qui a été envoyé aux candidats à l’immigration illégale en Europe, leur signifiant que les forces polonaises qui surveillent la frontière orientale de l’UE n’ont pas le droit de tirer, même contre des groupes de migrants violents. Autrement dit, les portes de l’UE sont ouvertes sur la route passant par la Biélorussie.

Véritable revirement ou posture politique ?

Précisons que le parquet polonais, qui est à l’origine de l’arrestation des trois soldats, est depuis le mois de janvier sous le contrôle direct du gouvernement de Donald Tusk. En janvier, le ministre de la Justice Adam Bodnar a en effet réalisé un véritable putsch sur le parquet en remplaçant le procureur national sans l’accord du président de la République Andrzej Duda, alors qu’un tel accord est clairement exigé par la loi polonaise. Depuis, ce sont des centaines de procureurs mais aussi de présidents et vice-présidents de tribunaux qui ont été remplacés en violant les procédures en vigueur. Bodnar est un ancien Défenseur des droits (nommé sous l’ancienne majorité du parti de Donald Tusk avant l’arrivée au pouvoir du PiS en 2015, en place jusqu’à l’expiration de son mandat en 2021) mais aussi un juriste militant très marqué à gauche et ouvertement opposé au refoulement à chaud des immigrants illégaux à la frontière.

Au même moment, les médias polonais font état, depuis le mois de juin, de milliers d’immigrants illégaux arrivés par la Pologne qui sont renvoyés dans ce pays par l’Allemagne, et les habitants des zones frontalières, aussi bien à l’ouest qu’à l’est du pays, se plaignent de la présence de groupes de jeunes migrants de sexe masculin parfois agressifs, ce qui est une chose totalement nouvelle dans ce pays.

La nouvelle loi votée par la Diète doit encore passer au Sénat et être signée par le président Andrzej Duda pour entrer en vigueur. Marque-t-elle un véritable revirement de Donald Tusk et de ses amis en matière de lutte contre l’immigration illégale ou bien s’agit-il juste d’une posture électoraliste de façade après la mort d’un jeune soldat tué à l’arme blanche par un migrant qui tentait de forcer la frontière à la fin du mois de mai ?

 

 

Cela reste à voir, mais beaucoup de mal a déjà été fait en seulement quelques mois. Il se peut que, à l’instar du Président français Emmanuel Macron pour la loi Immigration, le Premier ministre polonais Donald Tusk compte sur sa Cour constitutionnelle pour censurer cette nouvelle loi.

Olivier Bault
Olivier Bault
Directeur de la communication de l'Institut Ordo Iuris

Vos commentaires

24 commentaires

  1. cette loi est appliquée depuis longtemps dans les pays du Golfe sans que nos bonnes âmes y trouvent à redire!

  2. On ne peut que compatir au sort des militaires polonais confrontés aux assauts d’immigrants illégaux convaincus qu’ils ont tous les droits et de pouvoir bénéficier d’une impunité systématique….

  3. Ca fait peur pour les élections présidentielles aux USA avec un Biden qui ne fera même pas campagne comme il y a quatre ans et annonçait tranquillement au public que tout était organisé, ne pas avoir peur, tout va bien se passer.

  4. Encore un jeune soldat, mort en héros en tentant de faire son travail avec honneur, et tué à cause des traitres mafieux et corrompus, qui au pouvoir, l’utilise comme un simple pion sans importance, sur l’échiquier de leurs magouilles, de leurs lâchetés et de l’ignominie qu’ils incarnent.

  5. Excellente mesure. Et en plus il faut expulser et envoyer en Afrique tous les membres des Associations Immigrationnistes puisqu’ils aiment bien plus les étrangers que les Français.

  6. Il devraient essayer la culture du muguet derrière leur frontière. Un brin de muguet c’est sympa, ça adoucit les contacts. Et puis ça occuperait les gardes-barrière. Non ?

  7. Il n’y a pas ´espoir, tout est verrouillé. Les conditions dans lesquelles se sont déroulées les élections législatives en France en sont la preuve.

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