Pour Olivier Dussopt, il n’y a pas de « crise démocratique »… Vraiment ?

DUSSOPT

Olivier Dussopt, ministre du Travail, du Plein Emploi et de l’Insertion, c’est un peu l’homme de quart du Titanic qui, à l’approche de l’iceberg fatal, affirmerait au capitaine : « C’est embêtant, mais au moins ne manquerons-nous pas de glaçons pour nos whiskies. » Ainsi, interrogé par BFM TV, ce jeudi 6 avril, diagnostique-t-il : « Quelle crise ? Il y a une crise sociale, une crise politique, mais il n’y a pas de crise démocratique ! » T’as qu’à croire, Grégoire.

Et pourtant, crise démocratique il y a, déjà finement analysée par l’essayiste Mathieu Bock-Côté dans Le Figaro du 17 mars : « Emmanuel Macron, à la dernière élection présidentielle, n’a obtenu, au second tour, qu’une majorité par défaut, qui fonde une légitimité essentiellement négative. Le système politique français ne parvient plus à produire une adhésion populaire profonde. » Ce qui peut assez bien correspondre à l’idée qu’on peut se faire d’une « crise démocratique » ou, pour le moins, d’une crise de régime.

Ce que confirme le pétulant Québécois : « Le pays ne serait pas aussi inflammable s’il n’était engagé dans une crise de régime de longue durée, qui n’ose dire son nom, et que la plupart des commentateurs refusent d’envisager sérieusement. Elle se dessine depuis trente ans et culmine dans la situation présente, où la classe politique autorisée semble de plus en plus se barricader dans les institutions de la République. »

Ce qui amène fort logiquement Marine Le Pen à prétendre que pour sortir de cette « crise », Emmanuel Macron n’aurait plus que deux solutions : « le référendum ou la dissolution ». En quel cas, le remède pourrait se révéler pire que le mal.

Le référendum ? Plus que sur la réforme des retraites, la question posée se transformerait immanquablement en référendum anti-Macron. La dissolution ? Depuis le coup de génie stratégique de 1997, théorisé par Dominique de Villepin, l’homme qui parlait jadis à l’oreille du Président Chirac, l’option semble incongrue. Ce, d’autant plus que les sondages, les uns après les autres, donnent immanquablement les mêmes résultats : catastrophiques pour Renaissance et LR ; triomphaux pour le RN et, dans une moindre mesure, pour LFI.

Si tel était le cas, la simple « crise de régime » pourrait bien laisser la place à une véritable « crise démocratique », tel que pressenti par l’éditorialiste Guillaume Tabard, sur Radio Classique, évoquant l’un de ces mêmes sondages, réalisé en vue de l’élection présidentielle de 2027 : « Si la majorité est représentée par Bruno Le Maire, Gérald Darmanin ou François Bayrou, c’est lui, Jean-Luc Mélenchon, qui se qualifierait au second tour face à Marine Le Pen. C’est dire qu’un choc des extrêmes est une hypothèse plausible. Ce serait le cauchemar pour Renaissance et pour LR. »

En effet, Renaissance n’existe que par la personnalité de son fondateur, Emmanuel Macron ; mais qui, pour les raisons qu’on sait, ne pourra briguer un troisième mandat. Quant aux LR, il y a aussi péril en la demeure depuis le score calamiteux de Valérie Pécresse à la dernière élection présidentielle (4,78 %), qui aura à peine fait mieux que la candidate socialiste, Anne Hidalgo (1,75 %). Pis : Éric Zemmour ferait jeu égal ou distancerait n’importe quelle tête de gondole de la défunte UMP. Bref, la droite libérale et conservatrice, c’est lui, désormais.

C’est-à-dire que les candidats des deux partis ayant, des décennies durant, formaté la vie politique française en seraient réduits à faire de la figuration. Et que, surtout, pour la première fois de sa vie politique, Marine Le Pen pourrait compter sur un important report de voix au second tour, entre celles de Nicolas Dupont-Aignan, Jean Lassalle et Éric Zemmour, au contraire d’un Jean-Luc Mélenchon, traînant la radicalité de ses jeunes troupes tel un fardeau, ou d’un Édouard Philippe et son passé juppéo-macronien, autre repoussoir.

La « crise démocratique » n’est donc peut-être pas loin. Mais il en est qui peuvent parfois se révéler salutaires, n’en déplaise à un Olivier Dussopt persistant à prétendre que « tout va très bien, monsieur le marquis ».

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

18 commentaires

  1. N’oubliez pas François Asselineau
    Il y a de plus en plus de gens qui voudraient sortir de l’Europe,

Commentaires fermés.

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