Pour ou contre la chasse au renard ? La Justice s’en mêle

Le 31 mars dernier, le tribunal administratif de Rouen a annulé un arrêté du préfet de Seine-Maritime qui avait autorisé l’abattage de 850 renards
renard

Le 31 mars dernier, le tribunal administratif de Rouen, saisi par l’ASPAS (Agir pour le vivant et les espèces sauvages, AVES France) et la Ligue pour la protection des oiseaux (LPO), a annulé un arrêté du préfet de Seine-Maritime qui avait autorisé l’abattage de 850 renards en 2020. Depuis plusieurs années, le débat fait rage entre partisans et adversaires de la chasse au renard, chasseurs contre défenseurs des animaux. Désormais, les tribunaux sont de plus en plus saisis et les défenseurs du renard espèrent que cette décision fera jurisprudence. Pour vous aider à y voir plus clair, nous republions l'analyse d'un de nos contributeurs, publiée il y a trois ans (NDLR).

Le renard roux est présent dans toute l’Europe. Plusieurs pays le protègent : l'Angleterre depuis 2004, le Luxembourg depuis 2015 et certains cantons de Suisse, dont celui de Genève, où toute chasse est proscrite depuis 1974. Aucun désordre écologique n'a été relevé depuis ces décisions. En France, il est classé nuisible ou « susceptible de causer des dégâts » sauf en Savoie, en Haute-Corse et dans la ceinture parisienne où il est protégé.

On estime à 600.000 le nombre de renards tués par an, mais ce nombre est très certainement sous-estimé car il ne prend pas en compte les petits qui meurent de faim au fond du terrier et le braconnage, également du fait des particuliers.

Les moyens utilisés pour sa destruction sont :
- le tir à balles de jour et de nuit avec phare, lunette et, depuis peu, silencieux ;
- l'empoisonnement, qui détruit des animaux non visés et provoque la mort dans des conditions atroces ;
- le piégeage, qui occasionne de grandes souffrances aux animaux pris, et ceci, pendant plusieurs heures avant d'être achevés ;
- le déterrage, qui consiste à accéder au terrier en creusant pour y faire entrer les chiens qui font sortir les renards, petits et adultes, que l'on tue ou donne vivants à la meute en guise de récompense.

Ces méthodes de « destruction », quand elles sont connues du public, déclenchent un rejet catégorique de la chasse au renard. La cruauté de ces pratiques n'est plus en correspondance avec le désir d'environnement et d'éthique d'une grande partie de la population. Ces méthodes sont jugées, à juste titre, barbares et d'un autre temps.

Les prétextes invoqués pour justifier cet écocide sont facilement démontables :
- L'impact sur les élevages de volaille qui peut être facilement empêché par des moyens de protection efficaces. Plutôt que d'accorder des subventions à ceux qui tuent, aidons les volaillers à installer des clôtures.
- La prédation sur le petit gibier, faisans et perdrix, par exemple. Ces animaux sont issus d’élevages et relâchés quelques jours avant l’ouverture de la chasse, ils n'ont appris ni à se défendre des prédateurs, ni à se nourrir. Il est évident qu'ils deviennent la cible privilégiée des renards et autres carnassiers. Est-il bien raisonnable et honnête d'utiliser cet argument ?
- La prolifération. Le renard, comme tous les carnassiers (rapaces compris), ne se reproduit qu'en fonction de l’étendue de son territoire et de la quantité de nourriture disponible, il s'autorégule, donc, pas de surpopulation en vue. Les craintes des chasseurs après la protection de la buse en 1974 ont été vite balayées. Aucune invasion ni surpopulation ne s'est produite.
- Le dernier argument, et le plus utilisé, est que le renard est porteur de maladies comme l'échinococcose. Il est malade mais on envoie les chiens dans les terriers au risque qu'ils attrapent eux-mêmes cette maladie. Cela ne tient pas. Bien au contraire, le renard, par sa prédation des rongeurs (environ 6.000 par renard et par an), évite leur prolifération et, ce faisant, l'augmentation du nombre de cas de plusieurs zoonoses, comme la borréliose (maladie de Lyme). Des études récentes très sérieuses ont montré que les cas de borréliose étaient en augmentation dans les régions où le renard était absent ou en nombre insuffisant. Les rongeurs étant des réservoirs importants de la bactérie borrélie et autres microbes.

De plus, en limitant le nombre des rongeurs, les goupils contribuent à la protection des cultures de céréales, notamment, et du matériel agricole abîmé par les butes de terre que construisent les campagnols. De nombreux agriculteurs voient le renard comme un allié plutôt qu'en ennemi.

De là à dire que les acteurs de cet écocide, qu'ils soient décideurs (élus ou fonctionnaires), soutiens (financiers ou politiques) ou chasseurs et piégeurs sur le terrain, sont responsables de l'augmentation du nombre de cas de maladie de Lyme et autres zoonoses, beaucoup en sont convaincus. Mais le sujet est, pour l'instant, peu relayé. Le ministère de la Santé devrait s'emparer de ce dossier épineux et donner son avis concernant la destruction irresponsable des renards.

Vivons avec nos animaux sauvages plutôt que contre eux !

Picture of Éric Madigand
Éric Madigand
Militaire retraité

Vos commentaires

27 commentaires

  1. « Excellent » article contre la régulation des nuisibles , on y trouve de tout pêle-mêle , et les commentaires qui vont avec sont bien entendu des plus intéressants. J’adore le grillage pour préserver les élevages , comme Ici dans le Gers où l’on retrouve des renards au fond d’un terrier creusé à 6 m dans l’enclos , le grillage étant la panacée de la protection comme chacun le sait surtout les professionnels du canard et l’echinococcose alvéolaire , maladie inventée par les méchants piégeurs

  2. Bravo pour ce magnifique article. Le Bien-Être Animal que je défends en tant que Délégué de la FBB et anti-chasse au stade terminal est rarement abordé dans Boulevard Voltaire car il n’est pas considéré comme un sujet régalien. Un seul mot : bravo à Éric Madigand pour son magnifique article, lequel fait appel à des arguments qui sont tous parfaitement exacts.

  3. Question d’ignorant : Le renard, ça se mange ? Je sais qu’on mange du chevreuil, du sanglier, mais le renard aussi ? Ou c’est juste pour la passion de dégommer un animal qui ne vous a rien fait ?

  4.  » L’impact sur les élevages de volaille qui peut être facilement empêché par des moyens de protection efficaces. Plutôt que d’accorder des subventions à ceux qui tuent, aidons les volaillers à installer des clôtures. »
    C’est une plaisanterie ?
    On voit bien que vous connaissez très mal le sujet.
    Les renards grimpent sur la clôture comme des chats. Si vraiment elle est trop haute (3 mètres!) ils creuseront dessous la nuit. Quand on a vu ses poules massacrées on connait bien le problème.

    • je vous suis tout a fait . l argument qui consiste a dire élévons des clotures plutot que de chasser le renard me semble etre du mème ordre que celui qui dit : plutot que de punir les voleurs ,ne portez pas de bijoux , on ne vous les voleras pas

  5. Je présume que c’est sans aucune raison que sont organisées des battues administratives quand la population de renards s’accroit trop vite. C’est comme pour le sanglier, qui prolifère a qui mieux mieux mais qu’il faut laisser entrer dans les villes pour complaire aux écolos. La chasse est un moyen de réguler localement certaines espèces animales qui, en trop grands nombres, deviennent nuisibles. Mais rassurez-vous, vu le prix des cartouches beaucoup de chasseurs ne le tire pas !

  6. Rassurée de constater que Bd Voltaire n’est pas inconditionnellement contre les animaux et livre un article de bon sens pour la défense du renard. Cet animal, injustement classé « nuisible », est au contraire très utile. Et si ce n’était pas le cas comment ne pas s’insurger contre des méthodes atroces, dont sont également victimes les blaireaux ? Les adeptes de la chasse inculquent des idées fausses pour pouvoir satisfaire des pulsions malsaines. Le renard est le partenaire de l’agriculteur.

  7. Il faut relativiser le rôle des renards pour lutter contre les mulots. Fin du 18 eme siècle, dans le Doubs, alors que les peticides n’existaient pas, les proliférations de mulots étaient fréquentes et cycliques. Il y avait, malgé la présence de nombreux renards beaucoup de faune sauvage. Le déséquilibre est apparu avec les remembrements qui ont supprimés les haies refuges. La mécanisation, qui a augmenté les vitesses de fauche, et la circulation automobile ont conduit à des massacres.

    • En rando (3 par semaine) j’ai souvent observé les renards chassant les rats et autres.

  8. je suis assez étonné de lire dans bd voltaire un article avec en filigramme une tonalité anti chasse que je m attendais plutot a trouver dans une publication de messieurs mélenchon ou jadot ; sous prétexte de défense des animaux un catalogue de poncifs ou se distinguent des éléments de langage très utilisés par les « progressistes » : » écocide , barbare et d un autre temps  » les paysans qui luttent contre le renard depuis des siècles se seraient donc trompés ?

    • La pluralité des opinions est une marque d ‘ intelligence ; de plus , on peut être réac’ et defendre les animaux

      • d une part la pluralité des opinions n est en aucun cas une marque d intelligence sauf si on estime que toutes les opinions se valent et d autre part un réac qui adopte les éléments de langage de mélénchon ou de jadot ne m inspire aucune confiance tout particulièrement si il utilise une argumentation stéréotypée et univoque.

    • C’est comme pour les loups. Les éleveurs de moutons sont contre sa protection. Pour le renard, ce sont ceux qui ont un poulailler en plein air qui sont pour sa chasse. Ceux qui n’ont pas de poules ou qui les élèvent « en batterie » s’en foutent.

  9. Écrit depuis le Rouergue (province rurale et sauvage) : le renard est utile : il suffit de protéger les poulaillers. Le dernier abattage de renards a provoqué une invasion calamiteuse de rats taupiers. Ici loups (des centaines de brebis tuées) et grands vautours (en trop grand nombre et 2m60 d’envergure) sont protégés et sont nuisibles. Comme les goélands et les pies.

  10. Vivant en Normandie, j’ai vu toutes mes volailles massacrées (poules, canards, oies) par les renards et les blaireaux, alors affectueusement, j’emmerde leurs défenseurs.

    • Exactement, les défenseurs, les fesses calées dans un fauteuil moelleux, les yeux rivés sur les reportages animaliers aiment manger du cheval avarié Spangerro, du Hallal, des oeufs de m.. de poules élevées en cage; pendant ce temps leurs gosses sont victimes d’autres prédateurs et l’on voit pour quel monde ils votent, ces bobos connectés et déconnectés de la réalité.

    • Sot : Viens voir en Rouergue comment on fait pour protéger nos poulaillers. On sait faire nous. Et nous avons aussi en plus de toi lynx, loups et vautours. Les renards nous débarrassent des rats, belettes et putois, bien pires . Tu emm… leurs défenseurs ? Fan de Macron ? Pt’et ben qu’oui …?

    • Sans doute aurait-il fallu que vous preniez des mesures de protection dès la première attaque. Ce que vous avez apparemment négligé… De nos jours, les conseils ne manquent pas pour se protéger des prédateurs ! C’est le refus de la réaction adaptée qui mène aux excès de pouvoir de l’humain sur la Nature. Il est temps d’en être conscient et d’assumer ses responsabilités.

  11. Mon Dieu ! mais qu’on foute la paix aux animaux, à qui l’homme-prédateur a déja dérobé leur territoire , au point qu’ils doivent se cacher en nocturne. Et ….. ( bon : ça rappelle quelque chose de similaire ..)

  12. Utile? nuisible? c’est comme tout, question de nombre sur un territoire donné. Ce qui est vrai ici peut être faux 50 km plus loin.

  13. L’humain veut tout contrôler. Les monocultures ont eu pour conséquence de faire proliférer les campagnols. Pour les tuer, les agriculteurs déversent sur les cultures de la bromadiolone, produit chimique qui les condamne à une mort horrible en empêchant leur sang de coaguler. Par contre, un renard élimine annuellement environ 6000 campagnols et ce, de façon naturelle et sans aucuns frais. Le renard mange également les détritus abandonnés dans la nature par l’humain… Nuisible le renard ? NON !!

  14. La destruction des nuisibles, si tant est que le renard soit nuisible, ne consiste pas en sa destruction, mais plutot le mode de destruction organisé par quelques névrosés « nuisibles » !

  15. Très bon article , analyse instructive , constructive et intéressante qui , pour une fois , apporte une ouverture d ‘esprit , nouvelle et éclairée , prenant la défense des animaux qui ne doivent pas être les souffre -douleur des hommes ;
    Le ministère de la Santé , pourquoi pas ? à condition qu ‘ il ne soit pas corrompu car si macron , grand protecteur des chasseurs , garde le pouvoir , on sait ce qu ‘ il adviendra de ce sujet …

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