« Pour un printemps des droites ! »
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Avec votre union de la droite, ne seriez-vous pas un peu mono-obsessionnel ?
J’applique la méthode dite du pic-vert. Comme lui, je frappe sans cesse au même endroit avec les mêmes mots, espérant percer l’écorce des préjugés, des vieux réflexes, des excommunications. Je suis persuadé que nous y arriverons. Laissons les uns et les autres régler – ou tenter de régler – leurs problèmes internes. Même si nous savons d’ores et déjà qui sera aux manettes du côté des Républicains comme des frontistes… Et, de notre côté, continuons à travailler. À regrouper, à partir de la base, des élus locaux. À renforcer ce maillage militant, ces projets alternatifs que nous mettons en œuvre.
Un peu à la manière des communistes au lendemain de la guerre ou de l’Église catholique du temps de sa splendeur ?
Exactement. Les écoles hors contrat, les mutuelles municipales, les scouts quand ils ne sont pas de simples garderies, les associations caritatives, le Puy du Fou… les exemples ne manquent pas de cette « contre-société » du bon sens, du bien commun que nous devons construire parallèlement au travail de conviction, de persuasion, d’élaboration. Pour cela, nous disposons maintenant d’un vrai réseau de médias alternatifs : TV Libertés, Le Salon beige, Fdesouche, L’Incorrect et, évidemment, Boulevard Voltaire. Nous pouvons également nous appuyer sur des intellectuels qui, au-delà de leurs divergences, ont en commun de questionner ce monde si difficile pour les plus modestes. Je pense à Éric Zemmour, Alain Finkielkraut, Michel Onfray, Élisabeth Lévy, Mathieu Bock-Côté, François-Xavier Bellamy, Michel Maffesoli…
Vous voilà donc optimiste ?
Mais je l’ai toujours été ! Je veux juste que nous cessions de nous cacher derrière de grands discours qui ne tiennent aucun compte de la réalité. Être pragmatique ne veut pas dire abdiquer devant les puissants. J’en sais quelque chose avec mes ennuis répétés devant la Justice. Le dernier en date étant la condamnation, par le Conseil d’État, de notre crèche du Noël 2014. Ce qui ne nous empêchera pas d’inaugurer une nouvelle crèche le 4 décembre prochain… Vous y êtes d’ailleurs invités ! Parfois, j’ai l’impression que nous ne savons pas mettre en avant ce que nous faisons. Peut-être faudrait-il créer un think tank, un laboratoire d’idées qui nous aide dans cette bataille d’idées dont le communiste italien Antonio Gramsci disait qu’il fallait l’emporter pour espérer gagner, un jour, sur le terrain politique.
Mais n’est-ce pas le rôle des Amoureux de la France ?
Je ne le crois pas. Avec les Amoureux de la France, nous sommes sur un terrain plus strictement politique. Et c’est essentiel. Il s’agit de reconstruire les droites en s’appuyant sur les militants des différents partis aujourd’hui coincés entre les Républicains et le Front national – Debout la France, le SIEL, le CNIP, le MPF de Philippe de Villiers, le RPF… - et d’aller chercher tous ceux qui partagent une vision et des valeurs similaires mais ne se reconnaissent pas dans ces différents courants de la droite. Quand je pense à la création d’une structure de réflexion, j’imagine une sorte de Terra Nova de la droite qui agrège des personnalités intellectuelles et des militants de terrain prêts à approfondir les thèmes que nous ne travaillons pas assez et faire ainsi refleurir la pensée de droite. Dans ce qu’on pourrait appeler le printemps des droites.
À quels thèmes pensez-vous ?
La culture. Quand vous regardez les programmes des partis à la droite des Républicains – qui, eux-mêmes, sont terrorisés à l’idée de se mettre à dos un milieu encore largement acquis à la gauche la plus sectaire -, leurs ambitions culturelles finissent par se réduire à la défense du patrimoine. C’est un peu court même si, dans ma ville, j’en ai fait une priorité. Mais on ne peut pas arriver au pouvoir avec ce seul objectif agrémenté d’une critique – que je partage également – d’un art contemporain qui frise parfois l’escroquerie pure et simple. Même chose sur les médias. Nous passons notre temps à les critiquer, à dénoncer leur rôle de chien de garde du système mais, dans les programmes de ces mêmes partis, rien sur les subventions massives dont ils bénéficient, rien sur les avantages fiscaux accordés aux journalistes, rien sur les alternatives à imaginer tout en respectant la liberté de la presse… Voilà deux chantiers sur lesquels nous pourrions nous mettre au travail.
Mais, pour revenir à votre ambition d’union des droites, comment s’allier à des gens qui ne veulent pas de vous ?
Vous voulez parler des leaders de la droite. De ces leaders qui jouent les bravaches, les matamores de tribune mais tremblent devant le moindre éditorialiste qui les somme de montrer patte blanche. Des leaders qui ont repris les grands thèmes que le Front national n’a cessé de mettre en avant – immigration, islam, assistanat, préférence nationale… - mais qui continuent à lui cracher à la figure. Des leaders qui nous font le coup de la distinction entre les responsables frontistes – forcément infréquentables – et les électeurs du même Front – forcément trompés, dupés. Comme si, électeur de Marine Le Pen, vous étiez trop stupide pour comprendre pour qui vous votez. Ou alors seulement poussé par le désespoir et jamais convaincu par des arguments. Bel exemple de mépris de classe !
Mais il faudra bien faire avec eux !
Ou les contourner ! Faire un détour par la base, par la province. N’oubliez jamais que plus de la moitié des Français vivent dans des communes de moins de 10.000 habitants. N’oubliez jamais ces 35.500 conseils municipaux, véritables viviers de bénévoles. C’est avec eux, notamment, que nous pourrons construire l’alternative dont nous rêvons.
C’est pour les rallier que vous vous faites le chantre des provinces ?
Bien sûr que non. Je suis simplement persuadé que si nous ne revenons pas vers les citoyens, au plus près d’eux, nous ne changerons jamais la politique et la façon de la faire. De droite comme de gauche, nos responsables ont été biberonnés au jacobinisme. Ils n’imaginent d’avenir qu’à Paris. La décentralisation elle-même a été confisquée par de petits notables qui singent les mœurs parisiennes. Le pouvoir ne s’est pas rapproché du citoyen, il a été accaparé par des politiciens professionnels qui se servent des régions comme d’un marchepied dans la conquête de la capitale. Ils n’ont pas de convictions mais des plans de carrière.
D’où la « révolution municipale » que vous prônez…
Oui, j’appelle à une véritable révolution municipale. Qu’on redonne ses lettres de noblesse au beau mot d’autonomie. Il y a des talents dans nos territoires, dans nos villes moyennes, dans nos villages. Il faut cesser de traiter ces Français de bouseux, d’arriérés, d’incultes, et la France qu’ils incarnent de rance et de moisie. Dans ma ville de Béziers, le pouvoir communal remonte au XIIIe siècle. Il s’est construit contre l’évêque et contre le pouvoir central. Il irrigue ma cité. Il imprègne les supporters de notre équipe – mythique – de rugby. Il anime mes concitoyens quand ils sont des milliers à saluer la crèche dans l’hôtel de ville tout comme la messe dans les arènes en début de feria. Pas seulement parce que catholiques – ils ne le sont pas tous et ceux qui le sont ne récitent manifestement pas le "Notre Père" tous les dimanches… - mais parce qu’attachés à ces traditions qui nous offrent les racines qui nous permettent de grandir. Si nous savons réunir tous ceux qui ne veulent pas d’un monde hors-sol, d’un monde privé de mémoire, d’un monde impitoyable pour les plus humbles, les plus fragiles, alors tout est possible…
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