Pourquoi le monde arabe se rapproche d’Israël ?

Au mois de juillet dernier, Benyamin Netanyahou devait annoncer l’annexion, par Israël, de la Cisjordanie, au mépris des traités internationaux. De nombreux pays, dont la France, lui avaient demandé de n’en rien faire, mais le Premier ministre israélien semblait sourd à toute pression.

À la surprise générale, l’annexion n’eut pas lieu et l’on attendait de savoir pourquoi. La réponse est venue le 13 août avec l’annonce de la normalisation des relations entre Israël et les Émirats arabes unis puis, le 11 septembre, avec, cette fois, Bahreïn promu comme nouvel ami de l’État hébreu.

Ces deux pays sont les plus proches alliés de l’Arabie saoudite (en dépit de différends sérieux entre Abou Dhabi et Riyad concernant la guerre au Yéemen) et nul doute que cette normalisation a reçu le feu vert de Mohammed ben Salmane, l’homme fort du royaume saoudien.

C’est une grande victoire pour Netanyahou, qui redore son blason de façon spectaculaire après ses ennuis judiciaires concernant de graves accusations de corruption.

C’est aussi un tournant diplomatique majeur qui a atterré les Palestiniens. Au mois d’août, des effigies du prince héritier émirati Mohammed ben Zayed (MBZ) et de Donald Trump avaient été brûlées dans plusieurs villes de Cisjordanie.

La perspective de la création d’un État palestinien s’éloigne irrémédiablement et le plan Abdallah de 2002 est enterré. Établi par le roi saoudien du moment, décédé depuis, ce plan exigeait la création d’un État palestinien en échange de la reconnaissance d’Israël par les pays arabes. Cette exigence a donc disparu, sans doute définitivement.

Certains annoncent maintenant que l’Arabie saoudite va, à son tour, emboîter le pas aux deux éclaireurs. C’est peut-être un peu prématuré. En effet, l’opinion publique saoudienne n’est sans doute pas prête à un revirement de cette nature et le roi Salman ben Abdulaziz non plus. Mohammed ben Salmane ne prendra pas le risque de se fâcher avec son père. Il faudra donc probablement attendre un peu.

Derrière ces revirements spectaculaires, il y a un homme : Donald Trump. La présidentielle américaine arrive à grands pas et un succès diplomatique de cette importance est particulièrement bienvenu alors que le sortant est en retard dans les sondages.

Trump a donc voulu donner un éclat particulier à cet accord et c’est sur le balcon de la Maison-Blanche qu’il a proclamé « l’avènement d’un nouveau Moyen-Orient ». À ses côtés se tenaient Benyamin Netanyahou et les ministres des Affaires étrangères du Bahreïn et des Émirats arabes unis. Chacun a pu noter que les deux souverains ne se sont pas déplacés eux-mêmes, comme si une certaine gêne perdurait.

Mais qu’importe, Trump a su convaincre Israël de différer l’annexion de la Cisjordanie pour ne pas froisser les pays arabes à un moment crucial, annexion qui aura lieu un jour, n’en doutons pas. Il a su, aussi, faire comprendre aux souverains de la péninsule Arabique que le temps était venu de la réconciliation officielle entre les meilleurs alliés de l’Amérique. C’est un succès diplomatique incontestable.

Les Palestiniens sont, une fois de plus, laissés de côté et n’auront sans doute jamais d’État, mais qui s’en soucie ?

Antoine de Lacoste
Antoine de Lacoste
Conférencier spécialiste du Moyen-Orient

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