Pourquoi le RN ménage Sébastien Delogu…

Capture d’écran © BFMTV
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C’est la polémique médiatique du moment : le jeune député mélenchoniste, Sébastien Delogu, a manqué son grand oral, ce lundi, en commission des finances. On sent qu’il peine à déchiffrer son texte. La lecture, tout comme l’élocution, sont laborieuses. Sa maîtrise de l’arithmétique paraît tout aussi hasardeuse. Bref, il se ridiculise en public. Le résultat ne se fait pas attendre, façon volée de bois vert, et venant d’une certaine droite parlementaire, souvent issue des beaux quartiers, Aurélien Véron, élu LR à la mairie de Paris, au premier chef : « L’école de la seconde chance ouvre une antenne à l’Assemblée nationale. » Sans surprise, la riposte de la gauche est immédiate : « Envie de vomir devant le mépris de classe et les moqueries que subit mon collègue Sébastien Delogu », affirme le socialiste Philippe Brun, député de l’Eure. Laurence Rossignol, sa consœur du Sénat, en remet une couche : « Ce buzz sur le manque de fluidité de sa lecture est indigne des valeurs de la République et de l’égalité des citoyens. Siéger à l’Assemblée n’est pas le privilège des élites et des premiers de la classe. »

Ce n’est pas du français qu’il nous cause, mais de la peine…

Voilà qui n’est sûrement pas faux, mais qui implique un brin de circonspection, d’où la discrétion des députés lepénistes sur la question. Tout en nuances, Caroline Parmentier, élue RN du Nord-Pas-de-Calais, nous confie ainsi : « Il y a évidemment une maladresse grossière des soutiens de l’extrême gauche vis-à-vis de Sébastien Delogu lorsqu’ils évoquent un "mépris de classe". Car cela sous-entend que lorsqu’on est issu des classes populaires, on ne saurait pas, par essence, maîtriser le français. Encore une réaction de bobos parisiens… » Il est vrai qu’on peut être d’extraction modeste et ne pas martyriser la langue de Molière, au contraire d’un Nicolas Sarkozy, pour ne citer que lui.

Pourtant, et quoi qu’on puisse penser de la personne et de l’itinéraire de Sébastien Delogu, ce dernier n’est pas loin d’être exemplaire à sa manière. D’origine à la fois algérienne, arménienne, italienne et espagnole, il est un de ces chauffeurs de taxi ayant mené la révolte contre la prolétarisation de sa profession, programmée par le géant américain Uber. À son corps plus ou moins défendant, il est donc le contre-exemple de ce qu’il dénonce aujourd’hui ; soit la prétendue interdiction faite aux Français de branche d’accéder aux mêmes fonctions que ceux de souche, puisque ayant réussi à siéger au palais Bourbon.

Sébastien Delogu rattrapé par son amateurisme…

Caroline Parmentier, toujours : « La seule chose que l’on peut reprocher à ce député, c’est peut-être de ne pas suffisamment travailler, parce qu’il découvre son texte sans manifestement l’avoir lu ni préparé avant ; ce qui est quand même un minimum. » D’où cet autre coup de griffe de notre interlocutrice : « Son arrogance au quotidien, tout comme ses comportements répréhensibles et communautaristes, telle son attitude de caïd de cité, toisant de façon menaçante Flavien Ternet, notre benjamin à l’Assemblée et refusant de lui serrer la main, au même titre que la benjamine, Hanane Mansouri, députée de l’Isère, élue sous les couleurs d’Éric Ciotti, rallié au RN, lui a sans doute valu ce peu d’indulgence de ces collègues. » Il est vrai que ces derniers ne se sont d’ailleurs pas plus que ça bousculés au portillon.

Au fait, à propos de « mépris de classe », que dire de celui impunément professé par l’ensemble des médias à propos de candidats lepénistes à la députation, pas toujours mieux affûtés que Sébastien Delogu ?

Pas de compassion pour les candidats RN…

Car à l’occasion des élections législatives de 2022, il y a eu de la curée médiatique dans l’air, sans que cela n’ait eu l’air d’émouvoir les bonnes âmes. D’où une Sophie Carciner, aspirante à représenter le Territoire de Belfort au Parlement et humiliée en direct sur France 3 Franche-Comté. Mais qui reconnaît, touchante d’honnêteté : « J’ai eu le courage d’y aller, mais j’ai été plus que nulle… » De même Gérard Vollory, candidat dans le Rhône, qui, accusé de « racisme », ne trouve rien de mieux que d’exhiber devant les caméras de France 3 une photo de son épouse, d’origine africaine. Se rendant compte de cette demi-bourde, il s’excuse illico : « C’était peut-être une mauvaise réaction de ma part. Mais c’était mon premier débat et si cela a pu choquer, je m’en excuse. »

À défaut d’avoir fait ses universités, voilà au moins une France bien élevée, à rebours de celle qu’un Sébastien Delogu prétend incarner ; lui qui, au lieu de faire profil bas, persiste à jouer au malin sur X, en assurant : « Plus vous m’attaquez, plus ça me donne envie de vous combattre politiquement. »

Encore un qui n’est pas né le jour de la Saint-Modeste. Et qui oublie, une fois de plus, que seul ce qui est respectable est digne d’être respecté.

Nicolas Gauthier
Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

39 commentaires

  1. Si il a des difficultés à s’exprimer en français puisqu’il ne maitrise pas cette langue , et compte tenue de ses origines il a le choix si j’ai bien compris entre quatre langues , du fait de son quart d’origine algérienne je lui conseille l’arabe , au moins il a des chances d’être mieux compris par son électorat !!

  2. La conclusion de Nicolas Gauthier est idoine. Mais aussi, nous sommes en droit d’attendre d’un député qu’il ait certaines connaissances de notre belle langue et qu’il sache également compter. C’est la moindre des choses. Aujourd’hui tout est bon pour parader. Encore faudrait-il y exposer de belles plumes.

  3. Polémique totalement justifiée. On ne demande pas à un député d’être bardé de diplômes mais on devrait exiger un niveau minimum de culture et compétences. Ces élus proposent des lois, doivent lire des pavés. Quand on voit ce député à la peine pour lire un texte, on peut questionner quel sera son apport à l’Assemblée et s’il a les capacités pour représenter ses électeurs. Il n’est là que pour la symbolique, la figuration. Mais il n’est pas seul, Rachel Kéké avouait avoir le niveau CM2… Il n’y a pas de quoi être fier. Un adulte peut se former toute sa vie !

  4. On serait en droit d’excuser son inculture évidente , mais à l’inverse ce monsieur est un rustre tant dans son comportement , que dans ses propos acerbes que vous avez souligné dans cette chronique. A mon sens si l’Assemblée Nationale doit représenter toutes les tendances , il serait bien venu d’évaluer quelque peu le niveau de connaissances ( maitrise de la langue, de la compréhension et au premier rang les prérogatives, droits et devoirs d’un élu dans cette institution ) de certains prétendants pour la législature , le pays s’en trouverait hautement grandi.

  5. C’est plutôt le rôle de Yann Barthès de se moquer des gens plus simples moins cultivés. Je n’ai personnellement pas aimé la parodie de Cyril Hanouna sur L’élève Delogu, tout comme il est parfois méprisant envers Gilles Verdez. Et j’ai bien plus de sympathie pour Sébastien Delogu malgré son comportement racaille que pour Clémence Guétté ou Claire Lejeune, qui ne sont pourtant pas outrancières mais qui portent sur leur visage le mépris de classe. Je pense merle que Delogu est manipulé et dirigé par ses collègues qui ont le profil de mesdames ou mesdemoiselles Guétté et Lejeune.

  6. Lorsqu’on a le privilège d’être un élu du peuple , la moindre des choses c’est de s’élever par le travail, et d’avoir un comportement digne et respectueux.
    Toutes personnes méritent le respect à condition d’être respectable.
    Hors, Sébastien Delogu ne coche pas encore ces cases.

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