Prisons attaquées : l’État visé… à l’arme de guerre

Des milliers d'armes en vente libre ? Les narcotrafiquants le savent, les activistes d’ultra-gauche aussi.
@Miguel MEDINA / AFP
@Miguel MEDINA / AFP

Tout a commencé dans la nuit du dimanche 13 au lundi 14 avril. À Agen, sept véhicules ont été incendiés sur le parking de l’École nationale d’administration pénitentiaire, entraînant, rapporte Le Monde, « l’évacuation de plus de 1.000 élèves, logés à proximité du sinistre ». Peu après, le véhicule d’une surveillante pénitentiaire a pris feu, mais à plusieurs centaines de kilomètres, à Réau, en Seine-et-Marne.

Attaques coordonnées

Ce n’est que la nuit suivante que s’est dévoilé ce qui ressemble à un véritable plan d’attaques coordonnées visant, chacune, des bâtiments et véhicules ayant à voir avec la surveillance carcérale. Des incendies de véhicules ont eu lieu dans le sud, Valence (Drôme), Nîmes (Gard) et Aix-Luynes (Bouches-du-Rhône), où une caméra de vidéosurveillance a capté les images d’un groupe tirant vers la façade, mais aussi en région parisienne, à Nanterre (Hauts-de-Seine) et Villepinte (Seine-Saint-Denis). Au même moment, à Marseille, « des véhicules ont été tagués et un incendié près de locaux de la Protection judiciaire de la jeunesse, sur le parking d’une résidence de logements sociaux occupés par de nombreux agents de l’administration pénitentiaire ». À Toulon (Var), la porte de la prison a été criblée de balles de fusil d’assaut (de type AK 47 Kalachnikov). Et la série s’est poursuivie depuis, comme à la prison de Tarascon (Bouches-du-Rhône), où des incendies se sont produits, mercredi 16 vers cinq heures du matin, « "sur un parking isolé, réservé aux personnels, grillagé et l’accès sécurisé par un digicode", a indiqué à l’AFP le procureur de Tarascon, Laurent Gumbau », précise Ouest-France, qui note par ailleurs que près du centre pénitentiaire de Meaux-Chauconin-Neufmontiers (Seine-et-Marne), « le hall d’un immeuble où habite un surveillant pénitentiaire a connu un début d’incendie ».

Revendications du « DDPF »

Un fait a immédiatement interrogé : c’est la découverte, dans ce hall d’immeuble comme sur plusieurs voitures et murs ou portes de prison attaqués, d’un sigle alors inconnu, DDPF (pour Défense des droits des prisonniers français), « tagué » à la peinture aérosol. Une revendication que l’on a retrouvée sur plusieurs messages diffusés sur les réseaux sociaux. Sur Telegram, rapporte Le Parisien, un message explique : « Les équipes de sécurité pénitentiaire (ELSP) de Luynes, vous allez tous mourir pour le mal que vous avez fait […] sachez que notre mouvement s’étend dans toute la France. » D’autres, pour certains accompagnés de vidéos montrant des taguages et aspersions d’essence, ont été diffusés sur un canal DDPF Telegram mais aussi sur Signal, ces deux réseaux permettant de chiffrer les messages, pour compliquer leur sourçage.

Qui se cache derrière ces opérations ? Deux pistes sont suivies par les enquêteurs. Celle des narcotrafiquants, en guerre ouverte (pour des raisons « commerciales ») à la fois contre les services de police spécialisés et la surveillance des prisons, mais aussi celle de l’extrême gauche qui a (entre bien d’autres) les mêmes ennemis, mais pour des motifs idéologiques. Si les milieux activistes anarcho-marxistes, au contraire des narcos, n’utilisent guère de Kalachnikov, et que le mot « français » (dans DDPF) n’est pas trop dans le vocabulaire des milieux internationalistes, « je n’exclus rien », a cependant déclaré le ministre de la Justice Gérald Darmanin. Rien, et pas même une possible « convergence des luttes » politico-criminelle, comme cela s’est parfois vu, et notamment dans les années 1970, durant lesquelles une grande porosité a été constatée entre une frange des gauchistes et les milieux criminels.

30.000 armes illégales, en France ?

Mais dans tous les cas, l’affaire a été jugée suffisamment grave pour que le parquet national antiterroriste se saisisse de l’enquête, ouverte pour « association de malfaiteurs terroriste en vue de la préparation d’un ou plusieurs crimes d’atteinte contre le personnel pénitentiaire, tentative d’assassinat en relation avec une entreprise terroriste commise sur une personne dépositaire de l’autorité publique et dégradation ou détérioration en bande organisée du bien d’autrui par un moyen pour les personnes en relation avec une entreprise terroriste ». Et la qualification « terroriste » a justifié que l’enquête soit confiée à la police judiciaire (DCPJ) ainsi qu’à la Sécurité intérieure (DGSI). Ces services devront notamment élucider la question des tirs au fusil d’assaut.

Leur emploi est devenu courant, dans les règlements de comptes entre trafiquants. Mais là, on a franchi un palier, puisque les tirs ont visé des services de l’État, même s’ils n’ont fait aucune victime - du moins, pour l’instant. Or, la France est un très vaste et riche hypermarché d’armes au noir. Si les chiffres sont forcément approximatifs, une enquête du Figaro estime à plusieurs dizaines de milliers, peut-être aux alentours de 30.000, le nombre d’armes à feu illégales, en France. De son côté, l'Institut des hautes études du ministère de l'Intérieur (IHEMI) propose, sur son site, un article qui donne quelques précisions intéressantes. Les principales filières d’approvisionnement seraient les vols (officiellement entre 9 et 11.000 par an), les milieux d’amateurs et de collectionneurs (un parc inchiffrable) et les transactions sur Internet.

Vente en ligne

Les volumes de ventes en ligne sont d’autant plus impossibles à évaluer qu’ils passent principalement par le Darknet (réseau caché illégal) et proviennent des quatre coins de la planète. Or, de véritables filières sont actives. Au sein de l’UE, des fabricants tchèques et slovaques contourneraient les réglementations en vendant des matériels au départ inoffensifs mais facilement « convertibles » en armes létales. Mais le marché est surtout alimenté par de gros pays producteurs (États-Unis mais aussi Turquie) et par des zones de conflits (ou d’anciens conflits) : Balkans, Proche-Orient, Ukraine, Afrique sahélo-saharienne et subsaharienne…

Quelques billets suffisent pour acquérir une des milliers de « kalach » en circulation, en France. Les narcotrafiquants le savent, tout autant que certains activistes d’ultra-gauche et autres islamo-gauchistes, devenus très énervés, ces temps-ci.

Vos commentaires

5 commentaires

  1. Voici le résultat de la complaisance depuis longtemps entretenue envers les mouvances d’ultra-gauche. Il devient indispensable de mobiliser les forces de l’ordre pour protéger le personnel pénitentiaire ainsi les magistrats, en surplus de leurs nombreuses autres missions. Qui bientôt protégera les simples citoyens ?

  2. Une chose m’interpelle toutefois dans votre article : l ‘ Ukraine fournirait des armes , des armes que l’UE lui envoi pour faire la guerre ? Qui s’en étonnerait …..

  3. Amusant de vouloir défendre les prisonniers français.
    Alors que les prisons françaises sont majoritairement remplies de binationaux et d’étrangers.

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