Protocole national de déconfinement : de quoi s’arracher les cheveux !

s'arracher les cheveux

Lâcher de ballons lundi prochain. J’entends d’ici la clameur : « On sort ! » Peut-être… Pas sûr… Ça serre les fesses dans tous les coins, et pas seulement à cause du thermomètre.

Précautionneux, le gouvernement déjà accusé de tous les maux – zaviéka, fallékon, zaviékapa, yoréfalluke, etc. – a dressé des barrières et ouvert des parachutes en nombre. Avec la CGT en embuscade derrière les masques jaunes, on n’est jamais assez prudent. Donc, ça s’appelle « Protocole national de déconfinement pour les entreprises pour assurer la santé et la sécurité des salariés » et c’est paru dimanche. À l’attention des crétins, nombreux, et des illettrés itou, c’est assorti de jolis petits dessins :

- bulle n° 1 : un Covid à picots barré de rouge,
- bulle n° 2 : des flacons de gel hydroalcoolique,
- bulle n° 3 : des gants de ménage, une éponge et du détergent,
- bulle n° 4 : une dame à longue chevelure assise bien droite sur sa chaise de bureau.

C’est bien, la dame, ça évite les récriminations sexistes, néanmoins, les cheveux longs font un peu cliché… On aurait pu lui mettre une barbichette, façon Conchita Wurst. Les trans ont ceci de bien qu’ils mettent tout le monde d’accord. Ou pas.

Donc, voici les « règles universelles » à l’attention des entreprises et des associations.

Tout d’abord, on ne se fait plus la bise en arrivant, on tousse dans son coude, on ne se gratte pas le nez et ON SE LAVE LES MAINS !

Pour les forts en maths, on s’efforce de trouver 4 m2 par employé. Et commenkonfé ? On se base sur « la surface résiduelle de l’espace considéré, c’est-à-dire la surface effectivement disponible pour les occupants, déduction faite des parties occupées ». Exemple : « Un établissement disposant d’une surface résiduelle de 160 m² pourrait accueillir simultanément 160/4 = 40 personnes ou salariés. » Toutefois, on veillera aux « flux de circulation [qui] sont plus difficiles à maîtriser et des phénomènes de concentration difficiles à éviter ». Par exemple l’embouteillage à la porte des toilettes pour aller se laver les mains. D’où ce conseil du ministère : « Une régulation excessive des circulations peut conduire à des pratiques de contournement, éventuellement dangereuses, si elle entrave trop les déplacements. »

« Il faut identifier les risques de rupture de la distanciation physique », nous dit-on. Un conseil pratique : munissez-vous d’une pince à cornichons ou d’une perche à selfie si vous devez tendre un document au collègue. On conseille aussi un giratoire et des horaires échelonnés pour ceux qui oseraient encore se rendre à la machine à café ou sur le trottoir pour fumer leur clope. Je ne vois pas bien comment, d’ailleurs, puisqu’il faudra porter un masque. Avec un trou pour passer la paille ou la clope, peut-être ?

Ah, les masques, parlons-en… On a pu voir, dans les innombrables reportages sur les cousettes impliquées dans l’effort de guerre, que des marques de luxe commençaient à se positionner sur ce créneau porteur d’élastiques. Un fabriquant de lingerie fine en confectionne avec dentelle noire, assortis au porte-jarretelles. Bientôt, assurément, on verra sortir des masques griffés Vuitton, Lacoste ou Dior. Hélas, « les EPI sont un complément des mesures de protection collectives et ne sauraient s’y substituer », aussi les masques devront-ils être collectés par l’entreprise, enfermés dans des sacs doubles et gardés un jour dans un « espace clos réservé à cet effet ».

Bon, j’arrête là l’énumération, ça me déprime. Je préfère rêver au prochain 14 Juillet. Je l’imagine glorieux : défilé des héros sur les Champs-Élysées, blouses blanches et brigades sanitaires de l’Étoile à la Concorde, charlottes à picots sur la tête pour évoquer le méchant Covid… Salut ému du chef de l’État, décoration des anciens combattants, embrassade des nouvelles pupilles de la nation…

Alors, pour finir, une suggestion : remplaçons désormais le 11 Novembre par le 11 mai. Et vive la France, nom d'une pipe !

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Marie Delarue
Journaliste à BV, artiste

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