PUF : après la censure, le coup de force ?

Après avoir censuré un livre anti-woke, les PUF changent de pied et prévoient subitement de le publier. Retournement.
livre woke PUF

Emblématique des blocages encore en cours dans les milieux intellectuels, le feuilleton du livre anti-woke aux PUF connaît un deuxième épisode. Rappel du premier épisode : à la suite des propos de Patrick Boucheron, moralisateur en chef du Collège de France, les Presses universitaires de France s’étaient retrouvées sous pression. Le 7 mars, l’universitaire sans étudiants avait reproché publiquement à la sacro-sainte maison des PUF de publier un ouvrage anti-woke (Face à l’obscurantisme woke). Une campagne de terrorisme intellectuel dont la gauche a le secret se mettait alors en branle. Le directeur des PUF, Paul Garapon, cédait et annonçait par courrier aux trois codirecteurs et aux vingt-deux coauteurs que l’ouvrage ne serait finalement pas publié : « Les conditions nécessaires à un accueil serein de ce livre collectif ne sont plus réunies », arguait-il. Les raisons officieuses : dénoncer le wokisme, c’est faire le jeu du trumpisme. Qui plus est, l’ouvrage est lié à l’extrême droite puisque, parmi les auteurs, certains appartiennent à un laboratoire d’idées universitaire qui a reçu des financements de Pierre-Édouard Stérin, l’ogre millionnaire, bête noire de Libération. Une « cabale » que dénonce l’anthropologue Florence Bergeaud-Blackler, coauteur, est lancée.

Le livre est dénigré, les auteurs sont humiliés comme étant des universitaires de seconde zone, affiliés à la mouvance réactionnaire la plus indigeste. Pierre Vermeren, qui a codirigé l’ouvrage, dénonce, quant à lui, « une censure préalable d’un livre qui n’a pas été distribué, que personne n’a lu en dehors de l’éditeur, qui était d’ailleurs très content, qui nous a félicités, qui nous a dit que ça correspondait parfaitement à ce qu’il voulait ».

« Il faut se réjouir de la capitulation des PUF »

Coup de tonnerre. Quinze jours plus tard, le directeur des PUF écrit à nouveau aux contributeurs du livre pour leur annoncer, cette fois-ci, avoir « décidé de publier l’ouvrage le 30 avril prochain ». C'est le deuxième épisode, et dernier en date. Dans un courrier envoyé le 21 mars, que BV a pu consulter, Paul Garapon l’assure : « Toutes les sensibilités doivent trouver à s’exprimer aux PUF », en ajoutant : « La volonté de publier votre ouvrage ne m’a jamais quitté. » L’universitaire Xavier-Laurent Salvador, codirecteur de l’ouvrage, se félicite auprès de BV : « Il faut se réjouir de la capitulation des PUF. » Le maître de conférences en langue et littérature médiévales insiste, goguenard : « C’est une bonne nouvelle, un ouvrage anti-woke édité par une maison d’édition temple du wokisme ! »

À l’annonce de la censure, une dizaine de maisons d’éditions s’étaient manifestées auprès des auteurs. Après s’être offert soigneusement une campagne de blanchiment, le directeur des PUF peut souffler. Alors que Le Nouvel Obs l’accusait « d’être à deux doigts de se trumpiser », avec Libération et Mediapart à l’affût en chiens de garde, Garapon peut fanfaronner et dénoncer lui-même, dans son courrier, « une campagne uniquement fondée sur l’amalgame ». Grâce à cette tentative de censure annoncée, les PUF sont désormais lavées de tout soupçon. Oui, les auteurs du livre sont affiliés à l’extrême droite, puisque certains « sont membres de l’Observatoire de l’éthique universitaire (dont les activités ont été soutenues par le projet Périclès/Le Bien commun de Pierre-Edouard Stérin) », mais non, cet observatoire « n’a jamais, au grand jamais, aidé à l’édition de l’ouvrage », se défend-il dans son courrier.

Ne pas abandonner l'ouvrage à la concurrence

Constatant que l’affaire faisait grand bruit, que des maisons d’éditions prenaient le relais, vexé, ne pouvant laisser partir à la concurrence une aubaine lucrative, le directeur des PUF a préféré prendre tout le monde de court et annoncer une publication rapide de l’ouvrage sans aucune concertation avec les auteurs. On vous censure, on vous humilie, on vous contraint. D’autant que les PUF maîtrisent le contenu de la publication. D’après nos informations, un article de Michèle Tribalat, démographe de renom, qui analysait et mettait en perspective le phénomène de l’immigration, avait été refusé au prétexte qu’il ne se soumettait pas parfaitement au dogme universaliste.

La mobilisation autour de l’ouvrage aura démontré une chose : le mouvement anti-woke est dynamique et ne se laisse pas faire. Pour Xavier-Laurent Salvador, « c’est une victoire ; ils ont vu qu’il y avait une indignation très forte à l’annonce de leur censure préalable ». Aux PUF, une curieuse conception de l’édition et du débat intellectuel a été contrainte de reculer.

Picture of Yves-Marie Sévillia
Yves-Marie Sévillia
Journaliste chez Boulevard Voltaire

Vos commentaires

32 commentaires

  1. Ce qui est rejouissant, c’est de savoir de plusieurs maisons d’édition, sachant que les PUF pliaient le genou devant les Wokistes, se sont proposées pour les remplacer. Le livre va donc sortir, bénéficiant, grâce à la gauche, d’une publicité rêvée, comme les gauchos « intelligents » ont su le faire pour Transmania, les livres de Bardella, de Villiers et autres. Il suffit qu’ils interdise quelchose pour que ça devienne un « must » que tout le monde s’arrache… Les grands noms de la pub ont trouvé leurs maitres…

  2. Merci de toutes ces précisions dans les arcanes du PUF. On pressant que le vent commence à tourner, que la liberté montre le nez, que les auteurs, conditionnés par une contention idéologique ambiante retrouvent leurs plumes et leur moi. Ce n’est qu’un début d’un combat de longue haleine. Le printemps de ma vérité vaincra.

  3. Comme disait Jacques Dutronc « … Je retourne ma veste… »
    Donc PUF retourne sa veste, plus par intérêt financier que par adhésion aux objectifs de cet ouvrage à contre courant de l’idéologie qui dirige les université…

  4. Je ne connais pas le monde de l’édition mais une chose est sûre, si j’avais été l’auteur de ce livre et qu’après l’avoir accepté, mon éditeur m’aurait dit avoir changé d’avis, puis en troisième lieu, se permettant de revenir sur son refus, c’est le mien qu’il aurait reçu en pleine « page ». PUF ou pas, j’aurais refusé de revenir à lui. Un affront pareil ne se pardonne pas. Maintenant, eux c’est eux, et moi c’est moi. Je me serais fait un plaisir en dernier ressort de lui rire au nez.

Laisser un commentaire

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Cette augmentation des cambriolages devrait inquiéter ceux qui se croient à l’abri
Marc Baudriller sur CNews
Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois