Quand France 2 milite pour un plus large enseignement de l’arabe

livre arabe

Dans la série « La France est coupable de tout ! », France 2 vient de nous livrer un documentaire dont le service public a le secret. Le titre de ce « docu » ? « Mauvaise langue ». Diffusée lundi dernier dans l’émission Infrarouge, on peut le revoir sur le site de France 2. Le sujet ? L’enseignement de l’arabe en France. La « problématique » ? Citons France 2, cela ira plus vite. « La communauté arabophone en France est celle qui transmet le moins sa langue d'origine. Alors que l'arabe est la deuxième langue la plus parlée du pays, avec entre 3 à 4 millions de locuteurs, elle n'est enseignée que dans 3 % des collèges et des lycées, moins que le russe et le chinois. Pourquoi les enfants d'immigrés venus de pays arabes ne parlent-ils pas la langue de leurs parents ? Pourquoi tant de Français de culture arabe ont-ils honte de leur langue maternelle ? Pourquoi chaque débat politique sur l'apprentissage de l'arabe à l'école républicaine se transforme-t-il en pugilat ? Pourquoi l'arabe est-il vécu comme un tabou ? » D’emblée, on notera que toutes ces questions entérinent de fait la communautarisation de la société française. Curieux paradoxe, alors que renvoyer les gens à leurs origines est bien souvent assimilé à une forme de racisme.

La faute à la France

L’idée maîtresse que l’on veut faire passer dans ce documentaire est claire et à peine voilée : de toutes façons, c’est la faute de la France ! Nabil Wakim, réalisateur du film, né au Liban et arrivé très jeune en France avec sa famille, à travers des interviews de personnes, voire de personnalités (Najat Vallaud-Belkacem), parfaitement intégrées à la société française, nous fait le récit des regrets, de la nostalgie, voire de la souffrance de ces personnes de ne pas parler l’arabe, la langue de leurs parents. Ces derniers ont tout misé sur la réussite scolaire de leurs enfants, sur la nécessité de s’intégrer, ce qui est tout à leur honneur, et, donc, de ne surtout pas parler arabe. Mais ce mérite passe au second plan. Une jeune femme, d’origine marocaine, évoquant son père, déclare : « Après, j’ai compris que ce n’était pas à cause de lui, que c’était à cause d’une société qui rejette aussi cette langue. » « À cause de »… Autrement dit, « la faute à ». « Moi aussi, j’ai fini par comprendre que cette absence de transmission n’était pas forcément la faute de mes parents », insiste le réalisateur du film. « Pas forcément la faute de mes parents. » Et, donc, la faute à qui ? À la société française, bien entendu.

Mais, à bien y réfléchir, est-ce à la société française, par l’intermédiaire notamment de l’institution scolaire, de prendre en compte ces « histoires personnelles » et leur part de souffrance ? Souffrance de l’enfance d’être moqué par la famille lorsqu’on retournait au bled et qu’on ne comprenait pas ce que racontaient les grands-parents. Souffrance actuelle d’adultes boboïsés de ne pas connaître, pratiquer leur langue maternelle. L’institution scolaire qui, déjà, peine – le mot est faible – à transmettre les bases de la langue française, devrait donc en plus enseigner l’arabe plus largement, parce que c'est la langue maternelle de millions de personnes ? Entre nous, la République n'a pas eu ces délicatesses avec les petits Bretons, au siècle dernier...

Une revendication soft mais réelle

Toute immigration a sa part d’arrachement, de souffrance, de renoncement. Les migrants italiens, polonais, espagnols, portugais, yougoslaves connurent cet arrachement, cette souffrance, ces renoncements. Pas ces revendications, semble-t-il. Car derrière ce film intimiste, touchant parfois, on a bien compris qu’il s’agit de revendiquer, de manière « soft » certes, et par le biais du récit d’histoires personnelles, que l’arabe soit plus largement enseigné dans notre pays. Que la langue arabe ne mérite pas tous les procès qu’on lui fait, c’est évident. Mais est-ce bien raisonnable, par ailleurs, d’alimenter une revendication linguistique en mettant notamment en avant le nombre de personnes parlant l'arabe, non dans le monde, mais en France, alors que le communautarisme (on dit « séparatisme », maintenant) prospère dans le pays comme jamais ?

Le plus terrible, dans ce documentaire, vient peut-être à la fin. On y évoque un spectacle joué par des enfants à Saint-Denis sur cette question de la transmission des langues maternelles. Une petite « Gauloise » récite son texte : « Moi, j’ai une théorie : notre cerveau marche comme un disque dur. La France a fait un formatage des cerveaux, tu vois, et elle a supprimé tous les chemins d’accès. » Un « formatage » de la société française plus ou moins bien réussi en ce domaine, lorsqu'on considère le niveau de français des jeunes et moins jeunes. En revanche, on voit que le reformatage de nos « chères têtes blondes » marche à bloc…

Georges Michel
Georges Michel
Editorialiste à BV, colonel (ER)

Vos commentaires

47 commentaires

  1. Ben voyons ! A tout prendre, je préfère que soient enseigné le latin, source de tout, ou le russe, source d’espoir à l’heure actuelle… Ma petite-fille parisienne apprend le polonais usuel avec sa Babcha, pure parisienne depuis 50 ans, les mercredis , we et jours de vacances; Ne viendrait pas à l’idée de personne dans l’entourage de l’imposer aux autres ! En outre, quand on entend les éructations rauques et criardes de l’arabe ..Rien à voir avec la suavité douce du polonais ni la musicalité de l’italien Au fait, descendants d’italiens en France : combien ? Ils ont souffert chez nous ?

  2. Je suis d’origine Espagnole par mes grands parents, mon père parlait bien l’Espagnol, mais ne m’a pas transmis son savoir, j’ai fais Espagnol en 1ère langue au lycée, je parle, presque, correctement, mais je n’ai pas juger nécéssaire de transmettre l’espagnol a mes enfants, le lycée étant là pour ça, mais dans ma famille, (grands parents), parler Français était essentiel, parler espagnol a la maison était interdit, une manière pour eux d’apprendre le Français a l’âge adulte, mais enfants eux, ont choisi l’anglais!!, mais petits enfants, l’anglais, et le latin, comme quoi l’assimilation à la France, d’une famille Espagnole de 1920, a était une réussite, alors laissons faire, sans imposer.

  3. Peut-on douter de la sincérité des propos que tenait le Libanais Nabil Wakim à Najat Belkacem ? Il est peu probable que ses parents n’aient jamais appris le français au Liban puisque l’enseignement de notre langue faisait partie des programmes scolaires dans le privé comme dans le public. Il suffit de lire l’académicien franco-libanais Amin Maalouf pour en avoir confirmation. De plus, le Liban est un pays francophone. Certes, le Liban abandonne peu à peu le français au profit de l’anglais, mais le phénomène est relativement récent et il exprime plus un acte de désamour et de déception.

  4. Le 26 août 2014,ministre de l’Education nationale,de l’enseignement supérieur et de la Recherche.
    Najat Vallaud-Belkacem : “L’enseignement de l’arabe pourra se faire dès le CP”.Il ne faut pas oublier que l’arabe est déjà enseigné dans les écoles coraniques dans les mosquées

  5. Comme nos élèves n’apprennent plus le Français à l’Ecole de la République Française, on pourrait en effet leur enseigner comme langues principales l’Arabe, ou bien même encore le Wolof car il y a aussi de nombreux de Sénégalais en France

  6. La télévision publique milite pour l’enseignement de l’arabe à l’école, mais il n’y a rien de nouveau dans ça. L’article de Bd Voltaire cite Najat Vallaud-Belkacem comme bien intégrée. Cette référence tombe à point parce que c’est précisément cette politicienne franco-marocaine qui, en sa qualité de ministre socialiste de l’éducation nationale de François Hollande, est allée en Tunisie pour y signer le 31 mars 2017 avec son homologue tunisien Néji Jeloul un accord bilatéral en vue d’enseigner l’arabe dans les écoles primaires françaises. Cette convention intergouvernementale a été conclue dans le cadre du programme Enseignements de langue et de culture d’origine (ELCO) issu d’une directive de 1977 de l’Union européenne.
    Après l’échange des signatures, le ministre tunisien s’est ainsi félicité auprès de la presse : « Le programme débutera dès la rentrée 2017. Des professeurs tunisiens vont venir enseigner en France…/.. Ils seront recrutés et rémunérés par le ministère de l’Education nationale tunisien. Ce sera une option pour les élèves ».
    Rentrée en France, Vallaud-Belkacem a applaudi en défendant sur le JDD « L’égale dignité des langues étrangères dans la République », tout en dénonçant « la pensée identitaire qui prône [en France] l’exclusion et le repli sur soi d’une virulence inouïe et des objectifs profondément xénophobes ». Fermez le ban !

  7. Jusqu’à ces dernières années l’enseignement des langues proposées dans l’ enseignement au collège puis au lycée était axé sur l’anglais , l’allemand, dans une moindre mesure l’espagnol ou l’italien, c’était dans le but d’échanges commerciaux , industriels , etc… de nos jours il faut apprendre la langue arabe , et ce sous l’impulsion de Mme Belkacem , quel intérêt ? pas de grands échanges commerciaux ou industriels avec les pays arabes, le chinois serait plus de circonstance , rien n’empêche les enfants issus des communautés arabo-musulmane d’apprendre leur langue maternelle dans le milieu familial. Que l’éducation nationale se concentre sur la maitrise de la langue française et on aura fait un grand pas vers le vivre ensemble.

  8. La société française n’y est pour rien dans cette histoire, mes petits enfants sont nés en Espagne, ils parlent catalan, espagnol, français évidemment puisque qu’à la maison on parle français puis encore 4 ou 5 autres qu’ils ont apprises au gé des déplacements de leurs parents, dans aucun pays on leur a interdit de parler ou d’apprendre le français, en France personne interdit aux étrangers ou ceux issus de l’immigration de parler la langue de leur choix, d’ailleurs ils parlent souvent bien mieux la langue de leurs parents que le français.

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