Quand France Inter célèbre étrangement la fête des mères…

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Dimanche, chaque média a célébré la fête des mères. Le site de France Inter l’a fait aussi, à sa façon, avec un choix éditorial que chacun appréciera : « L’instinct maternel : une vaste supercherie, finalement assez récente », c'était le titre de l'article. Ce j’y-fous-tout au glaçage universito-historique n'est, en réalité, pas très innovant : il est assaisonné, sans la citer, de nombreux parti pris d’Élisabeth Badinter développés il y a déjà quarante ans dans son livre L’Amour en plus (Livre de poche). La conclusion, surtout, ne surprend personne : « Le mythe de l’instinct maternel [est] le creuset des inégalités hommes-femmes. » Nous y voilà !

En un sens, ce n’est pas faux. Car l’inégalité, par essence, entre hommes et femmes réside bien là : dans « le privilège exorbitant d’enfanter », comme l’appelle Françoise Héritier. Et son corollaire, ce formidable instinct, irrépressible, un peu effrayant par son intensité, qui se lève, pour la plupart des femmes, le jour où elles font un test de grossesse, et qui les transforme en mater dolorosa si, par malheur, elles font une fausse couche quinze jours plus tard. Au grand dam de leur conjoint, démuni et éberlué : il ressent, quant à lui, bien sûr, tristesse et déception de voir ce joli projet s’évanouir. Mais comment comprendre cette tempête affective pour un petit être à peine esquissé et jamais rencontré, excepté dans le brouillard fugace d’une échographie ?

Pour France Inter - comme pour Élisabeth Badinter -, ce qui lie une mère à son enfant, c’est à la rigueur l’amour mais pas l’instinct : on distingue les deux par une argutie spécieuse. C’est pourtant l’amour instinctif d’une mère qui lui fait accepter, durant neuf mois, de sacrifier alcool, cigarette, foie gras, saumon et tutti quanti, de rester allongée toute la sainte journée s’il le faut ou de virer impitoyablement le chat « autour du paddock sous prétexte qu’il perd ses poils », comme dans la chanson « En cloque » de Renaud.

Avant d’être enceinte, une jeune femme se projetant dans l’avenir s’imagine assez facilement déposer froidement son nourrisson à la crèche dès potron-minet ou partir des semaines - pourquoi pas des mois, comme dans l’armée - loin de lui, pourvu qu’il soit entre de bonnes mains. C’est une autre affaire quand l’instinct maternel survient. Pour la plupart des hommes, quitter longtemps un enfant est difficile. Pour la plupart des femmes, c’est proprement déchirant.

Selon Élisabeth Badinter, c’est le fait qu’au XVIIe siècle tant d’enfants aient été confiés sans moufter par la mère, aristocrate ou bourgeoise, à des nourrices, au risque de la maltraitance, qui prouve le caractère socialement construit de l’instinct maternel. Et pourquoi ne pas inverser l’hypothèse ? C’est peut-être le regard de la société, les activités mondaines et futiles auxquelles les assignait leur classe sociale qui ont empêché nombre de ces femmes, dans une secrète souffrance subie, de garder auprès d’elles leur bébé ?

Pour France Inter, c’est la révolution industrielle qui a forgé de toute pièce, au XIXe, l’instinct maternel afin de mettre un terme aux révoltes sociales en stabilisant les foyers. Il fallait « pousser les femmes à rester plus à la maison », quitte à rémunérer mieux les hommes pour qu’ils subviennent aux besoins de la famille, faisant d’eux, de facto, le chef de famille. Dans le temps long, pourtant, c’est tout le contraire qui est arrivé : l’activité salariale éloignée du foyer induite par la révolution industrielle a poussé, par une force centrifuge, les parents à passer de longues heures physiquement loin de leurs enfants. C’est toujours le cas. Et si le télétravail rencontre tant de succès, en particulier auprès des femmes, c'est qu'il répare un peu cela.

Bien sûr, comme tous les instincts - sexuels, de survie… -, l'instinct maternel ne s’exprime pas chez toutes de la même façon. Certaines se sentent un instinct maternel très développé, d’autres pas du tout, au point qu’elles peuvent penser en être dépourvues. Certaines en jubilent, d’autres en souffrent et le trouvent encombrant car culpabilisateur ou dévorant. Et parce que la nature humaine est complexe et la vie cyclique, certaines passent successivement par tous ces sentiments.

Quand une féministe nie l'instinct maternel, elle donne un blanc-seing à la société pour en faire autant et, donc, s’asseoir dessus. Notamment dans le monde du travail. Si rien ne différencie la maternité de la paternité, pourquoi ménagerait-on les jeunes femmes, au nom de leur nourrisson, quand il s’agit de projeter un ingénieur durant deux mois sur une plate-forme pétrolière à des milliers de kilomètres ? Pourquoi ferait-on partir à nouveau ce père dont l’enfant n’est, après tout, guère plus âgé ?

La vraie supercherie, avec la complicité de France Inter, c'est bien celle-ci.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

Vos commentaires

41 commentaires

  1. L’intinct maternel, comme l’instinct paternel, n’est nullement remis en cause par une grande majorité de parents! Les lubies d’un progressisme décadent ne valent pas la peine d’être commentées davantage…

  2. Donnez moi un journaliste de France Inter, je l’emmène en forêt profonde à l’approche d’une bauge, et je l’invite à aller attraper un marcassin devant les yeux de sa mère.
    L’instinct maternel risque de lui apparaître soudainement comme une évidence.
    Si son état le lui permet encore, je l’emmènerai ensuite approcher des canetons qui suivent leur mère. Là, il découvrira que la cane va faire semblant d’être blessé en s’éloignant de sa progéniture. Cette mascarade est destinée à éloigner les prédateurs de ses petits.
    Pas d’instinct maternelle qu’ils racontent?
    Qu’ils aillent demander à Darwin et à Lamarque, ils verront qu’ils sont beaucoup plus proche des canards ou des sangliers que des dieux qu’ils pensent naïvement être, probablement par peur de la mort.
    Désolé de leur apprendre, mais c’est l’instinct qui fait 90% de leur être, depuis le battement inconscient de leurs cœurs, jusqu’à leur peur du feu ou leur vertige.
    Sartre était un imbécile au sens premier, il n’avait aucune crédibilité scientifique, alors merci de se rappeler que l’existentialisme n’est qu’un délire de néophyte et demandez plutôt à votre neurologue ce qui dépend réellement de votre éducation, vous serez surpris de voir à quel point c’est insignifiant.
    Mais à notre époque, relancer le débat de l’inné et de l’acquis, c’est mettre 500kg de plomb dans l’aile des beaux discours démagogiques de notre époque, donc on préfère l’obscurantisme.

  3. Pourtant Madame Badinter a prouvé depuis qu’elle avait un solide bon sens!!! à mon avis elle était encore sous l’influence des féministes…maintenant elle a vu ce que valaient les féministes…

  4. L’observation du comportement des animaux, domestiques ou pas, montre que l’instinct maternel existe aussi chez eux.

    • Normal, c’est biologique, le moteur en étant la survie de l’espèce. Tout le reste n ‘est que délires « modernes ».

  5. Oui rester prudent par rapport à France Inter….Ecoutez les Radios subventionnées, et plus que de raison, c’est entrer dans leur Religion politicienne pour être un jour ou l’autre happé par leur folie…

  6. Bravo pour votre article Madame. Mais faut-il rappeler aux journalistes qui diffusent la propagande de la bienpensance et à leurs adeptes qui traite les gens de fachos lorsque nous sommes pas en phase avec leur idéologie que c’est Pétain qui a institué cette fête en 1941!!!

  7. Je ne sais pas si l’instinct maternel est une vaste supercherie, ce que je sais avec certitude c’est que la connerie est une réalité!
    Ces imbéciles qui pensent cela ont-ils seulement eu une « maman? » Demandez donc à un médecin l’intérêt qu’il a à écouter ce que ressent une mère sur l’état de son enfant qu’il l’inquiète. C’est cela entre autre, l’instinct maternel.

  8. En Afrique rurale, là où France Inter ne sévit pas encore, les mères partent et reviennent des champs avec leurs enfants, plus un sur le dos. Les vieux et les vieilles vivent leur vieillesse à la case alors que se sont encore des femmes qui veillent sur eux, jusqu’à ce qu’ils meurent entourés par leur famille. Les mères ont bien un instinct maternel.

  9. Toucher un de mes enfants, même adultes maintenant et leur mère vous montrera ce que se là  » decivilisation  ».

    Sans la protection atavique d’une mère pour sa progéniture, aucun mammifère ne serait sur terre.

  10. Est ce un « instinct » c’est à dire une réaction mécanique ou un «  sentiment » c’est à dire un «  impondérable » qui gouverne une femme face à la maternité ?
    C’est surtout la notion qui prime d’une forte responsabilité de donner une vie à un être qu’on a le temps de voir grandir en soi ce qui est épargné au sexe masculin. On confond ensuite avec l’amour qui est un sentiment et comme le dit à Saint Exupery au petit prince c’est «  le mal que tu te donnes pour ta rose qui rend cette rose si importante » si on ne donne rien on ne reçoit pas grand chose.
    Ce qu’a voulu dire É Badinter c’est que L’amour vient en plus ..et quelquefois il ne vient pas et ce n’est pas sa faute , quand une mère n’aime pas son enfant et ça arrive plus souvent qu’on croit., elle continue à faire son devoir à l’élever le nourrir mais l’essentiel manque pour l’enfant quand cela ne le détruit pas. L’amour maternel n’est pas un dû et encore moins un instinct c’est un cadeau en plus.
    Il y a beaucoup de mères mais toutes ne sont pas des «  mamans »

  11. C’est aussui à cause de ce genre de stupidité que beaucoup de femmes refusent d’allaiter leur bébé, préférant le « nourrir » avec des laits extrêmement trafiqués, qui doivent certainement avoir un rapport étroit avec des intolérances, voire allergies alimentaires dont souffrent de plus en plus d’enfants ! Lorsque nous avons décidé de fonder une famille, mon mari et moi, j’étais contrainte à travailler, car il était encore étudiant à l’époque. Donc mes aînées ont connu la nourrice. A la naissance de notre cadette, j’ai pu prendre trois ans de congés ; quel bonheur que d’assister au premier pas, au premier mot… tous ces petits bonheurs qui, souvent, se produisent chez des étrangers ! Par la suite, j’ai repris mon travail à mi-temps, ce qui m’a permis de partager bien des choses avec ma petite. Ce furent les quinze années les plus heureuses de ma vie.

  12. Merci pour cet article . Enfanter, porter la vie dans son cœur et son corps, c’est un privilège fabuleux que Dieu a donné à la femme , et l’homme ne peut connaître cette joie mais il en connaît une autre, il patiente en attendant le grand jour; ne parlons jamais d’égalité ou d’inégalité entre les sexes mais de complétude ; la femme qui connait son enfant de l’intérieur a pour vocation de protéger l’enfant dans l’intimité de la « maison » , la maison au sens de l’environnement direct de l’enfant, le rôle du père complètera ce rôle en aidant l’enfant à grandir en ouvrant progressivement la fenêtre extérieure pour lui permettre d’évoluer.
    Ces 2 rôles sont différents et complémentaires et c’est bien cette complétude qui constitue la beauté de la famille traditionnelle que notre époque cherche à détruire

  13. N’en déplaise à Elisabeth Badinter, l’instinct maternel et le désir d’enfant existent et toute la biodiversité de la nature,nous en donnent de multiples exemples. Ce n’est pas l’IVG de plus de dix millions d’enfants dans le sein de leur mère, en France, depuis la loi Veil qui attestent le contraire. On doit à la famille Badinter la prohibition de la peine de mort, mais aussi, beaucoup d’indulgence pour l’IVG, qui commence à prendre la dimension d’un génocide. Si seulement le quart des IVG avaient été évitées, le problème des retraites ne se poserait pas, mais c’est devenu le moyen normal de contraception et qu’on le veuille ou non, la source de la « décivilisation » est bien là !

  14. « L’instinct maternel : une vaste supercherie, finalement assez récente » : c’est, aussi, de tels bourrages de crâne intenses qu, s’ajoutant aux autres,i font que les femmes françaises ne veulent plus faire d’enfants

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