Quand l’Assomption de la Vierge était la fête nationale

ASSOMPTION

Les Français, qui aiment pourtant célébrer les anniversaires, ont tristement négligé, l’an dernier, le centenaire de la publication, par le pape Pie XI, de la lettre apostolique Galliam, Ecclesiae filiam primogenitam (« France, fille aînée de l’Église »), le 22 mars 1922. Ce pontife y déclarait et confirmait, « dans la plénitude de [son] pouvoir apostolique […] que la Vierge Marie Mère de Dieu, sous le titre de son Assomption dans le ciel, a été régulièrement choisie comme principale patronne de toute la France auprès de Dieu, avec tous les privilèges et les honneurs que comportent ce noble titre et cette dignité ». Sainte Jeanne d’Arc lui était associée comme patronne secondaire. Pie XI rappelait aussi que « selon un ancien adage […] "le royaume de France" a été appelé le "royaume de Marie", et cela, à juste titre ».

L’histoire corrobore l’adage. Dès 813, au concile de Mayence, réuni par Charlemagne, la commémoration, le 15 août, de l’Assomption de la Vierge Marie fut érigée en fête d’obligation dans tout l’Empire carolingien. Au XVIIe siècle, elle devint la fête nationale de la France, par l’effet du « vœu de Louis XIII ».

En août 1636, la France est en guerre avec l’Espagne. Après une série de revers français, l’ennemi menace Pontoise et Paris. Le roi Louis XIII décrète alors la levée du ban et de l’arrière-ban et prend la tête de l’armée. Implorant la Vierge, il fait aussi placer une lampe perpétuelle devant l’autel de Notre-Dame de Paris. La situation militaire se redresse et pour remercier la Mère de Dieu de sa protection, le roi de France décide, en décembre 1637, de lui consacrer sa personne, son État, sa couronne et ses sujets. Par lettres patentes, signées le 10 février 1638 à Saint-Germain-en-Laye, il ordonne que chaque année, lors de la fête de l’Assomption, des processions solennelles soient organisées dans toutes les paroisses du royaume en l’honneur de la Sainte Vierge, patronne principale de la France. La consécration religieuse a lieu le 15 août de la même année, en l’église du couvent des Minimes d’Abbeville. Le roi prévoit, en outre, de reconstruire le maître-autel de la cathédrale de Paris, auprès duquel sera placé un groupe statuaire le représentant agenouillé, offrant sa couronne à la Vierge représentée en pietà. Ce groupe ne sera réalisé qu’à la fin du règne de Louis XIV, qui y ajoutera sa propre effigie.

Contrairement à ce qui est parfois écrit, ce n’est donc pas la conception d’un dauphin qui fut directement à l’origine du vœu royal, mais les Français lièrent naturellement les deux événements. Depuis son mariage avec Louis XIII en 1615, la reine Anne d’Autriche avait fait quatre fausses couches et multiplié vainement les pèlerinages et dons aux sanctuaires pour avoir un fils. Les relations entre les époux étaient mauvaises. La reine, par ailleurs hostile à la politique de Richelieu, avait été récemment convaincue d’avoir trahi la France en renseignant ses frères, le roi d’Espagne Philippe IV et le cardinal-infant Ferdinand d’Autriche. Louis avait pardonné, mais Anne pouvait craindre d’être répudiée. Or, le 27 octobre 1637, le frère Fiacre, religieux augustin desservant de la basilique Notre-Dame des Victoires, à Paris, a une apparition mariale. La Sainte Vierge lui montre un enfant qu’elle présente comme « le Dauphin que Dieu veut donner à la France » et demande que la reine fasse dire trois neuvaines, l’une à Notre-Dame des Grâces à Cotignac, en Provence, les deux autres à Notre-Dame de Paris et à Notre-Dame des Victoires. Le jour où s’achève la dernière neuvaine, 5 décembre 1637, Louis XIII, se rendant à Saint-Maur, s’arrête au monastère de la Visitation Sainte-Marie, rue Saint-Antoine, à Paris, où Louise-Angélique de La Fayette, jeune femme dont il a été éperdument amoureux, fait son noviciat. La nouvelle religieuse l’incite à se réconcilier avec la reine. Or, lorsque le roi veut reprendre sa route, un violent orage l’en empêche, le contraignant à passer la nuit au Louvre, où se trouve Anne d’Autriche. Neuf mois plus tard, le 5 septembre 1638, la reine met au monde un fils, baptisé Louis Dieudonné – le futur Louis XIV. Le couple royal, comme ses sujets, attribue cette naissance à la protection divine.

Le Roi-Soleil lui-même se rendra en action de grâce à Cotignac, en 1660. Par la suite, Louis XV et Louis XVI (en 1790) renouvelleront aussi le vœu de Louis XIII. La célébration de la fête de l’Assomption sera interrompue pendant la Révolution, mais Napoléon – né le 15 août 1769 – la rétablira comme fête nationale. En 1880, la IIIe République lui substituera le 14 juillet.

Éric Letty
Éric Letty
Journaliste

Vos commentaires

24 commentaires

  1. J’avais mis un commentaire sur cet article et aujourd’hui je me rends compte que j’ai eu deux réponses qui m’ont ahurie.
    D’abord celle d’un certain « Closer » qui m’affirme que la messe de paroisse style intégriste est la même que celle qui se faisait avant, là je suis fort étonnée car vu que mon catéchisme se situe entre 1954 et 1957, je me rappelle fort bien que les messes que j’ai connu à cette époque, n’avaient rien à voir avec une messe du mois dernier dans une chapelle de Toulon que je nommerai pas par discrétion , j’ai cru que j’étais entrée dans la cérémonie d’une secte !! ne vous en déplaise cher monsieur.
    La deuxième réponse d’un certain « Delor » là c’est la stupéfaction on me parle de Macron ami du pape François , et l’on me dit que j’aime leurs dérives !! Je le rassure je n’aime ni Macron , ni l’attitude de ce pape, moi vous savez c’est tout simple, pure française de souche , je pense qu’un Dieu domine le monde , mais pour moi aucune pratique religieuse actuelle ne me donne envie d’aller plus loin !! J’essaye simplement de me comporter correctement .Mais c’est avec ces genres de commentaires que les églises se vident cher Monsieur !!

  2. Tourner le dos au Catholicisme de la Chrétienté n’a pas arrangé la France pour son avenir, et surtout depuis 6 ans en particulier, où elle s’est vendue pour pas un rond, même qu’elle s’est mie toute nue, ridiculisée. Tous les curseurs sont au rouge…quand on abandonne Ses Valeurs il vaut mieux être puissant. Et si la France avait su conserver ses Valeurs elle n’irait pas tout doucement rejoindre le Chaudron de Satan de Loge maléfique en lien au delà de nos frontières…

  3. Je suis chrétien convaincu et croyant mais non catholique romain et je pense, pour le meilleur de la FRANCE, que les églises, toutes les églises catholique romaine, luthérienne, protestante, évangélique et toutes les autres confessions Israélite, musulmane ne devraient JAMAIS se mêler de la politique de la Nation. Ces confessions ont leur rôle à jouer mais dans le secret des cœurs et dans le respect complet de la conviction de chacun. La république n’a pas jouer se rôle car trop souvent, elle participe aux dénigrements de la conviction des croyants mais revenir à une époque où la simple foi chrétienne se trouve persécuté par le « mariage  » du sceptre et du goupillon d’avant les lois de 1901/1905 serait une faute politique effroyable…. Ce vœu de Louis XIII restera pour moi un abomination qui engendrera les répressions (avant gout des dragonnades de Louis XIV) et autres réjouissances, entre autre dans ma mémoire, « la pacification » du Languedoc en 1622. Plus jamais de ce principe « cujus regio, ejus religio ». Il est encore dommageable pour la France que la révocation de l’Édit de Nantes ait eu lieu, Notre bon ROI HENRI IV était plus sage que ce Louis XIIème du nom…….

    • Merci de ce bel article; Commentaires peu inspirés, chrétiens ou non, catholiques ou non, on ne refuse pas son héritage ni les gtâces, qui vont avec? Il est ridicule de lier la consécration de la France à Marie aux guerres de religion où les torts sont bien partagés .

    • Je me demande toujours pourquoi l’apôtre Jean, à qui Jésus avait confié la responsabilité du bien être de Marie sa mère ( Jean 19:25-27), et qui de toute évidence était bien placé pour connaître les événements particuliers de la vie de Marie, ne fait aucune allusion à son assomption ?
      Pour ce qui est de l’immersion de la religion dans la politique, je suis bien d’accord avec vous « rendez à César ce qui est à César et à Dieu ce qui est à Dieu »( Luc 20:25).

  4. Si l’assomption était encore la fête nationale, elle ne concernerait que les quelques pourcents de français qui pratiquent encore la religion catholique et dans laquelle il semble y avoir beaucoup de lecteurs de Boulevard Voltaire. Le 14 Juillet est beaucoup plus fédérateur, il est le symbole du début de la démocratie dans notre pays et par la même l’abandon des monarchies absolues dans la très grande majorité des pays dans le monde. Personnellement je n’imagine même pas vivre dans un pays où un Hollande où un Macron serait chef de l’état à vie… C’est pourtant ce que l’on a eu pendant des siècles en France. Ceci étant, si j’étais catholique pratiquant, dieu m’en garde je ne célébrerais pas cette fête. La pauvre, monter au ciel, quelle mauvaise idée. Déjà à 10km d’altitude il fait dans les -60 degrés, et encore plus haut dans les -150… C’était une idée en adéquation avec la vision du monde des platistes de l’époque. On retrouve cette idée de monter au ciel dans beaucoup de religions. Dans le coran, à sa mort, leur prophète lui aussi monte au ciel, sur un cheval blanc (un peu comme Lucky Luke a la fin de ses aventures mais il n’est pas dit si le cheval s’appelle Jolly Jumper)

  5. Il ne faut pas oublier que ce n’est qu’en 1950, lors de la constitution Munificentissimus Deus de Pie XII, que l’Assomption a été reconnue dogme de foi.
    Cette demande avait été faite en 1854 après proclamation du dogme de l’Immaculée Conception.
    Le 15 août était cependant déjà fêté depuis Louis XIII en hommage à Marie mère de Jésus.

  6. L’Assomption est pour moi et le demeurera la vraie Fête Nationale et Patronale de la France, le 14 juillet n’est que la fête de la république car instituée sous ce régime. Chaque 15 août je pavoise aux couleurs de la France de notre étendard tricolore frappé des Armes éternelles de la France, les trois fleurs de lys. Merci à Eric Letty pour ce rappel de notre histoire féconde où j’ai pris conscience de la véritable cause du vœu de Louis XIII de consacrer sa couronne, son royaume et la France à la Vierge Marie. J’étais resté sur l’idée, donc répandue, selon laquelle la future maternité de la Reine en était le motif. Les légendes ont quelquefois du bon, quand elle ne font pas de mal à la vérité.

  7. « La France ne pourra retrouver sa grandeur que guidée par un chef chrétien. C’est la Religion chrétienne qui a construit la France n’en déplaise à tous les contemplateurs de la révolution. » (Commentaire de Michell)
    Certainement, comme d’ailleurs tous les autres pays. Et ce chef, ce n’est pas compliqué, c’est tout simplement le Christ !
    En suivant le Christ, je veux dire si beaucoup se mettent à le suivre en obéissant à sa Parole – généralement on obéit au chef -, alors la France sera sauvée.

    • Puisse La Très Sainte Trinité, la Vierge Marie… et les Français vous entendre. Hélas nous sommes peu nombreux à comprendre que le temporel est soumis au spirituel. Et encore moins à nous y soumettre.

    • Oui @ Christode, comme le précise le livre des Actes 5: 29 à 31, lorsque Pierre et les apôtres, en réponse au grand prêtre parlaient de la résurrection de Jésus « …c’est Lui que Dieu a élevé pour siéger à sa droite, comme Chef suprême et Sauveur, pour accorder à Israël la grâce de changer et de recevoir le pardon de ses péchés ».
      Soyez béni,
      Phil

  8. Merci pour ce bel article et ce rappel plus que nécessaire a NOTRE histoire et à nos valeurs oubliées ! Pauvre France, chaque jour on descend encore un peu plus bas ! Merci BV !

  9. Je suis horrifié par l’intrumentalisation de la foi. Je comprends que les Français aient voulu se libérer du joug de l’église qui a retrouver son caractère privé. Pour autant la foi n’a pas faibli,

    • Une instrumentalisation de la Foi ou la Vérité?
      Et si seulement nous croyions aux miracles, peut être tout irait il mieux?
      De plus, je crois que le joug de l’Eglise (en tant que peuple croyant la même foi et non un Pape ou un Évêque ou un Imam., donc une démocratie..) est moins dur que le joug d’un gouvernant autocrate voire dictateur pervers narcissique chef d’une démocrassie.

  10. Il y a sans doute une part de légende dans cette approche de faits historiques mais déjà le « blanc manteau » de la France recouvrait ses épaules . La consécration fait suite au difficultés militaires et au désir d’héritier mais dans le peuple (questionnez François Villon) elle était de perpétuelle actualité .

  11. La France ne pourra retrouver sa grandeur que guidée par un chef chrétien. C’est la Religion chrétienne qui a construit la France n’en déplaise à tous les contemplateurs de la révolution.

    • Toutes les religions chacune dans leur version extrême sont à bannir. Pour avoir assisté à une messe de cathos intégristes, cela m’a suffi !!! les vrais cathos charitables et vraiment croyants se cherchent à la lanterne !! et mon vécu me l’a prouvé !!!pour les mosquées merci à ceux qui ont accepté leurs constructions en nombre si important et financés par qui ? Depuis 11 ans tout s’aggrave rien d’étonnant !! Une éducation spirituelle pour les enfants à condition de ne pas tomber dans l’excès !!!

      • Les intégristes comme vous dites en répétant le bourrage de crâne médiatique, ne font que célébrer la messe comme elle l’était depuis toujours et défendre les valeurs de l’Évangile.
        Mais si vous préférez François écolo, pro mariage gay et adepte des religions païennes, libre à vous.

      • « les vrais cathos charitables et vraiment croyants se cherchent à la lanterne !! » : comme l’a dit le Général de Gaulle « je vous ai compris » ! Et je comprends aussi, grâce à votre explication ce que M. Macron va aussi souvent chercher à la Lanterne ! N’est-il pas le chanoine honoraire de la basilique du Latran et le pape François n’est-il pas, de ce fait, son patron ? Ils marchent tous les deux mains dans la main (la mano en la mano) en matière d’immigration déferlant en France ?

  12. Le clergé d’une époque récente est en grande majorité responsable de cet oubli volontaire , nous assistons avec joie à un certain réveil spirituel, mais à force de se soumettre à l’idéologie laïcarde, les évêques en sont arrivés à avoir peur de sortir de nos églises,le Saint -Sacrement,la Vierge Marie et tous les saints demeurent confinés dans les sacristies et les greniers .
    Ce n’est pas le pape actuel qui les encouragera à agir autrement , il appartient lui-même à une génération sécularisée.
    On nous sort à tout bout de champ le passage de l’Evangile : »Rendez à César ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu! »,mais avant cela Notre-Seigneur demande de qui est l’effigie sur la pièce de monnaie, les empereurs romains étaient considérés comme des demi-dieux auxquels un culte devait être rendu ,il s’agissait donc de faux dieux ,voilà le sens que nous pouvons donner à ce passage de l’Evangile qui rappelle le décalogue: »Un seul Dieu tu adoreras ! ».
    Cela ne signifie en rien que Notre-Seigneur nous enseigne à vivre hors de la Cité terrestre ,si un élu encourage l’avortement ,il me semble évident qu’un chrétien ne puisse le soutenir ,les commandements divins sont exigeants, ,il nous faut choisir ,poser un acte politique ,même,et surtout, si notre patrie n’est pas d’ici-bas ,car nous devons nous préparer ,ainsi que les autres êtres humains, à la patrie céleste éternelle !
    Voilà ce que nous enseigne le voeu de Louis XIII en consacrant son royaume à la Vierge-Marie en son Assomption glorieuse .

  13. Nous tournons le dos à toutes nos valeurs chrétiennes, qui ont cimenté notre civilisation. Ça me désole profondément

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