Quelques maux de la Justice… ou l’excès de confiance…

dupond-moretti

« C’est le propre de l’homme de se tromper ; seul l’insensé persiste dans son erreur. » Il n’est pas exclu que cette pensée de Cicéron puisse à elle seule résumer le fonctionnement de nombreuses institutions françaises. En matière de Justice, ce constat semble vraisemblablement partagé jusqu’au plus haut de l’État, puisque le ministre de la Justice a cru bon nommer sa loi du 22 décembre 2021 « Confiance dans l’institution judiciaire ». Ainsi, par cette nouvelle promesse de l’aube, les justiciables quels qu’ils soient pourraient y voir les prémices d’une heureuse espérance. Les Français pourraient renouer enfin avec le Glaive et la Balance, qu’ils décriaient tant jusqu’alors.

Il s’agit donc, pour le nouveau crédule, de parcourir cette loi nouvelle avec une foi toute naïve.

Plongé dans les termes techniques et, partant, les méandres incompréhensibles des rajouts ou des suppressions de « mots », « d’alinéas », de « mentions » et d’autres encore, l’impétrant cherche un peu de cette confiance promise.

Pour ce faire, il devra dépasser - ce qui fait l’orgueil du ministre - toute la série de récompenses due à l’homme condamné qui souhaiterait, une fois son parcours délictuel passé, travailler un peu, apprendre à lire et à écrire et se comporter correctement en détention. C’est, en réalité, ce que l’État serait légitimement en droit d’exiger de ceux qui décidèrent, un jour, de s’exclure du système. Remarquons, d’ailleurs, que toutes ces bonnes intentions n’évoquent à aucun moment les modifications des moyens mis à la disposition de l’institution. En cela, les sujets de l’augmentation du nombre de personnels des services pénitentiaires d’insertion et de probation et la redéfinition exacte de leurs pouvoirs ne sont guère abordés dans la loi.

Jusque-là dans le texte, seules les personnes condamnées pourraient éventuellement entrevoir une forme de nouvelle confiance. Qu’en est-il, alors, des autres ?

C’est ainsi que la découverte du titre V de la oloi nouvelle égaye notre curiosité. Le ministre a voulu « renforcer la confiance du public dans l’action des professionnels du droit ». Enfin, se dit-on, la problématique des relations de plus en plus délétères entre les professionnels du droit et le public va être traitée au fond.

Attentivement, on parcourt le texte et l’on apprend que plusieurs professions vont être pourvues d’un Code de déontologie, comme les avocats auprès du Conseil d’État et de la Cour de cassation, les notaires et les greffiers auprès des tribunaux de commerce. On poursuit la lecture et on comprend que quelques nouvelles règles complémentaires seront imposées aux (autres) avocats.

Et puis… on continue… Et puis… le néant… Et puis… rien. Rien ne concerne les magistrats… donc l’institution judiciaire. La loi nommée pompeusement « Confiance dans l’institution judiciaire » ne prévoit aucune disposition ayant trait à l’idée d’une responsabilité des juges. En d’autres termes, lorsqu’il s’agit de renforcer la confiance du public dans l’action des professionnels du droit, on omet d’y intégrer ceux qui décident, ceux qui ordonnent, ceux qui condamnent, ceux qui jugent tout simplement.

Éric Dupond-Moretti, lorsqu’il était avocat, dénonçait les errements, parfois ad nominem, de juges d’instruction, de procureurs et autres avocats généraux, de magistrats qu’il considérait comme incompétents. Aujourd'hui devenu ministre, dans les ors du pouvoir, il montre alors qu’il renonce à son combat et, avec lui, à ses valeurs.

Il est souvent évoqué les moyens matériels complémentaires comme l’alpha et l’oméga de la réussite en toute matière sociétale. Mais il doit être rappelé que ce sont les hommes qui conduisent les moyens et que les écarts ne sont pas qu’accidentels.

Refuser de s’attaquer à tous les problèmes de fond relatifs à l’institution des juges, c’est laisser certaines âmes à l’excès facile invoquer alors la toute-puissance judiciaire, la justice aux ordres, le contrôle d’une morale nouvelle organisée par des magistrats en quête d’avancement.

Or, on retrouve dans ces prises de position autant d’inexactitudes que de vérités.

Le ministre dont on pouvait louer le courage d’avocat ne peut que décevoir, tant la loi qu’il propose est loin des véritables préoccupations d’un public davantage en recherche d’équité que de justice.

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Me Alain Belot
Avocat au barreau de Paris, chroniqueur à BV

Vos commentaires

23 commentaires

  1. Dupont-Moretti aurait dû rester l’excellent avocat qu’il était plutôt que de couler en tant que piètre et pitoyable chef de la garderie des sots.

  2. Les moyens financiers manquent ? Mais que fait le Ministère de la Justice dans ce bâtiments ostentatoire place Vendôme ? Un des lieux les plus cher du pays ? Comme les Finances ou le tribunal ou encore la Police, mettez ce Ministère, disons dans le 93, ainsi il sera mieux à pied d’oeuvre et puis ça fera de l’argent à investir en vendant au privé cet immeuble princier. Eventuellement quelques « redéploiements » d’effectifs aussi…

  3. La profession de magistrat est la plus irresponsable dans tous les sens du terme. On peut y faire les pires c… sans craindre ni pour sa carrière, ni pour ses revenus. Au pire, un « coup de pied au cul ascensionnel » vous enverra dans une autre juridiction à un échelon supérieur…

  4. La justice française est la pire d’Europe. Il lui faut certes des moyens décents mais avant tout révoquer les juges rouges lorsqu’ils n’appliquent plus la loi ( malgré le serment), sanctionnant les justiciables qui diffèrent de leur idéologie. Tout avocat aura été 3 ans juge auxiliaire. Et tout juge aura été 20 ans avocat. On n’aura plus besoin, sauf pour la formation permanente, de l’ENM. Enfin un code de déontologie pour les juges et une déclaration d’absence de conflit avant chaque audience

  5. je me doutais que cet avocat, ne ferait rien, mais rien de bon en tant que ministre, Un flop total, comme tout le reste d’ailleurs. Ha nous,nous en souviendrons longtemps de ces incapables, Ils ont juste réussi à diviser, et ce pour mieux régner .Mais qu’auront-ils récolté ? Dans tous les cas,ce ne sera pas la gloire .Si ce n’est que « Waterloo morne plaine . En tout cas ce Dupont où est-il passé ? Il se planque dans la case des abonnés absents .

  6. Ces supers cadors de McKinsey (un nom évocateur… ne sauraient ils pas ?) sont une espèce d’hybridation de Pavlov et Milgram qui auraient appris par cœur Orwell…
    Certains sinistres aux ordres élucubrent dans leur confortable incubateur et le cerveau des français (mais pas que) partent à la dérive !

  7. Le point fort de ce gouvernement est de mettre des mots à la mode après les avoir vidé de sens, ainsi est apparut le mot « résilience » (il nous parlent même de « résistance et résilience » curieux le dico dit que ce sont des synonymes !), la « guerre » contre un ennemi qui n’a pas de consistance (pas de nationalité), maintenant la « confiance » preuve qu’ils ont compris que les français n’avaient plus confiance en eux, donc la machine à répéter à tort et à travers ce mot s’est mis en marche !

  8. L’injustice de la justice n’est pas nouvelle et les justifiables le savent, ceux qui de victimes sont traités comme des criminels et ne font plus confiance à des juges qui dictent leur loi en omettant d’appliquer le droit. Une vraie réforme de la justice en commençant par l’école de la magistrature est indispensable pour que les citoyens fassent de nouveau confiance en leur justice.

  9. Si Macron l’ a nommé à cette fonction c’ était pour qu’ il serve de larbin. Le spécialiste de la défense des crapules riches ne va pas torpiller son gagne pain
    il suffisait d’ écrire que les crapules à double nationalité finissant leurs vacances tous frais
    payés par le contribuables perdraient la nationalité française et toucheraient en prime un billet de retour au bled. J ‘ entends des applaudissements

  10. Protéger les criminels reste sa priorité au détriment d’honnêtes citoyens .Ce sont encore une fois les victimes que l’on punit à la place des criminels .Rien de nouveau .Encore un à virer très vite.

  11. Le mot est d’autant plus employé que la chose existe de moins en moins. Blanquer veut une « école de la confiance » alors que l’école publique inspire de moins en moins confiance; même chose pour Dupond-Moretti avec sa « confiance dans la justice » .

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