Qui est l’habile Chems-Eddine Hafiz, recteur de la grande mosquée de Paris ?

©FISOM7691/Wikimédia
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Dans son billet hebdomadaire, le recteur franco-algérien de la grande mosquée de Paris Chems-Eddine Hafiz s’inquiète de « la montée de l’extrême droite », assimilable à « des politiques d’exclusion, de discrimination et de division. Les conséquences pour les musulmans pourraient être particulièrement sévères, poursuit-il, allant de l'augmentation des actes islamophobes et des discriminations au renforcement des lois restrictives visant les pratiques religieuses et culturelles. Une telle victoire pourrait exacerber les tensions sociales, poursuit-il, renforcer les stéréotypes négatifs et marginaliser davantage cette communauté, compromettant ainsi les principes fondamentaux de liberté, d'égalité et de fraternité. ». Rien que ça ! Farouchement opposé au Rassemblement national et à Reconquête, le recteur de la grande mosquée de Paris multiplie les déclarations politiques à destination d'une communauté musulmane qui déclare, pour 70 % d'entre elle, son intention de voter pour une liste de gauche aux européennes.

Issu d’une famille très impliquée dans la lutte contre la France durant la guerre d’Algérie, l’actuel recteur de la grande mosquée de Paris est né à Alger en 1954. Il n'a pas connu la misère. Ce presque septuagénaire a derrière lui une riche carrière d’avocat. Spécialisé dans le droit international des affaires, il prête serment en 1986 et s’inscrit au barreau de Paris en 1991. Dès lors, il grenouille dans les milieux politiques franco-algériens et devient l’avocat de la grande mosquée de Paris et de l’État algérien en France. En 2001, il fonde l’association des avocats algériens de France au barreau de Paris et poursuit, au même moment, pour « injure et complicité d’incitation à la haine raciale », l'écrivain Michel Houellebecq, auteur de Plateforme, qui avait osé qualifier l’islam de « religion la plus con ». Tant de hauts faits lui permettent de prétendre au titre de chevalier de l’ordre national du Mérite (2003, puis officier en 2012) et de chevalier de la Légion d’honneur (2007, devenu officier en 2022). Proche collaborateur de l’ancien recteur de la grande mosquée de Paris, il a été élu à sa succession en 2020 et multiplie, depuis, les prises de position contre l'extrême droite.

Un recteur mi-figue mi-raisin

Sorte de Macron bis, adepte du « en même temps », Chems-Eddine Hafiz cultive une certaine ambiguïté politique, entre progressisme et radicalisme. Très « moderne » (il s’était opposé au port du voile au sein de l’Assemblée nationale), il affirme, en avril 2022, que « les lois de la République sont au-dessus de toutes les lois, même la loi divine ». Et il manifeste son soutien à l’écrivain Salman Rushdie, victime d’une attaque au couteau par un islamiste et sous fatwa depuis plus de trente ans.

Pourtant, le recteur tient des positions très radicales sur la question palestinienne, refuse de marcher contre l’antisémitisme et n’hésite pas à se montrer en compagnie de personnalités controversées. C’est ainsi qu’on le voit tout sourire aux côtés de Rima Hassan, keffieh sur les épaules. La numéro 7 de la liste de Manon Aubry pour les européennes affirme pourtant la légitimité de l’action du Hamas dans sa guerre contre Israël. Dans son communiqué, la grande mosquée de Paris précise que « le recteur Chems-Eddine Hafiz était particulièrement heureux d'accueillir Rima Hassan, juriste de renom, dont le combat pour les personnes vulnérables en exil est exemplaire […] elle force le respect ». Le mérite de la clarté...

Chems-Eddine Hafiz aime également se montrer en compagnie de Frères musulmans bien identifiés. S’il aime à affirmer que « les islamistes ne m’aiment pas », il s’affiche volontiers aux côtés d’Amar Lasfar et Larabi Becheri, deux figures reconnues des Musulmans de France, une organisation liée aux Frères musulmans, reconnue terroriste par les Émirats arabes unis.

Qui finance la grande mosquée de Paris ? 

« La grande mosquée de Paris est d’abord algérienne et ne sera jamais rien d’autre. » C’est par ces mots que l’ancien ambassadeur d’Algérie en France, Mohamed Antar Daoud, qualifiait le lieu de culte tenu par Chems-Eddine Hafiz. Historiquement liée à la communauté algérienne, elle a toujours été administrée par des recteurs venus de l'ancienne colonie française. En 2015, le gouvernement algérien avait ouvertement fait part de ses intentions. Dans une déclaration de l’ambassade d’Algérie en France, le ministre des Affaires religieuses de l’époque annonçait des procédures visant à acquérir la grande mosquée de Paris.

En 2022, lors d’une question à l’Assemblée nationale algérienne, le ministre des Affaires religieuses avait décidé de rendre publiques les contributions de l’Algérie à l’institution religieuse. Chaque année, le pays des fennecs verse à la mosquée de Paris 315 millions de dinars (environ 2 millions d’euros) et 580 millions de dinars (quelque 3,7 millions d’euros) consacrés à l’encadrement de l’activité religieuse et culturelle des émigrés algériens. Le montant perçu par la grande mosquée de Paris ne s’arrête pas là. Ne sont pas compris la taxe halal, qui lui rapporte environ 500.000 euros par an, les revenus locatifs de son restaurant et l’ensemble des dons de particuliers.

Julien Tellier
Julien Tellier
Journaliste stagiaire à BV

Vos commentaires

34 commentaires

  1. Recteur ce ne serait pas une fonction religiese mais seulement administrative ? Alors pourquoi le garder s’il dérape ? Par ailleurs on va finir par considérer que c’est un honneur de ne pas avoir la Légion d’honneur (je précise que cela déborde largement du cas de ce monsieur).

  2. « Issu d’une famille très impliquée dans la lutte contre la France durant la guerre d’Algérie, » Membre du FLN, n’ayez pas peur des mots.

  3. Chems-Eddine Hafiz recteur de la grande mosquée de Paris confirme sa haine de la France et des Français en critiquant le RN !
    Il ferait mieux de combattre les islamistes extrémistes et de permettre à ses concitoyens algériens de retourner dans leur pays dont ils adorent les moeurs et les us et coutumes , ils y vivraient bien mieux !!!

  4. Mr Tellier, historiquement, l’Algérie n’existe que grâce à la France, qui l’a unifiée et en a fait un de ses départements, soit un statut un peu différent d’une colonie, même si les statuts de ce départements n’étaient pas tous très « reluisants ».

  5. Avec sa belle cravate, sa jolie chemise et son costume de bonne coupe, il ressemble plus à un patron du CAC 40 qu’à un islamiste engagé.

  6. Moi ce qui m’inquiète c’est la montée de l’Islam rigoriste, fondamentaliste, obscurantiste, rampante, la multiplication de mosquées sans compter celles dirigées par des salafistes haineux et j’en passe.
    Depuis Giscard et sa loi sur le rapprochement familial c’est le ras de marée, souvenons nous pour l’avoir moi-même entendu, « par le ventre, nous vous aurons par le ventre », qu’ajouter d’autre si ce n’est, on peut le dire, que si les blancs n’avaient pas mis les pieds sur le continent Africain, où en serait l’Afrique aujourd’hui?
    Tout n’a pas été rose mais tout de même, de là à ce faire cracher à la figure il y a des limites et le but des arabos-musulmans nous le connaissons, surtout qu’ils ne lâche jamais rien depuis l’an 600, paver le monde de l’Islam! Ne nous loupons pas le 9 Juin!

  7. « Issu d’une famille très impliquée dans la lutte contre la France durant la guerre d’Algérie » …. Tout est dit là il me semble – même si sa vie lui a permis d’évoluer quelque peu, la contradiction reste en lui, rien à espérer d’autre donc que cette ambiguïté d’attitude et de propos.

  8. Il a sans doute peur de perdre sa place si le RN arrive au pouvoir et que les musulmans quittent la France.

  9. Un bien bel algérien, tout à fait digne de son pays d’origine où l’amour de la France a été érigé en quasi religion. Il serait normal de mettre fin aux privilèges accordés à ses ressortissants, tant que ce pays n’accepte pas de reprendre ses OQTF. Mais le courage manque, là aussi.

  10. Des centaines de milliers de musulmans morts pour libérer la France… Et quoi encore? Pourquoi pas des millions tant qu’on y est.

  11. Monsieur Chems-Eddine Hafiz, de nationalité algérienne, déclare « d’extrême droite » au moins les 41,46% de français qui ont voté Le Pen aux dernières élections présidentielles. C’est une pure diffamation. Tous ces électeurs n’ont absolument rien à voir avec le nazisme. La Démocratie est réellement en danger quand toute une prétendue élite « d’éclairés ». confisque le pouvoir et méprise le peuple.

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