Racket des automobilistes : deux milliards d’euros pour la seule année 2023 !

radars

À en croire la Cour des comptes, le racket des automobilistes s’est monté à deux milliards d’euros, en 2023, soit une hausse de 7 % par rapport à l’année précédente. Il est vrai qu’avec « la lutte contre le cancer » et « l’intégration des handicapés », « la sécurité routière » faisait partie des « trois chantiers » de Jacques Chirac annoncés le 14 juillet 2002 à la suite d’une réélection pour le moins ubuesque. Ce n'est donc pas d'hier.

L’ordre public délégué au secteur privé

Dans le même temps, le nombre et la puissance de radars ne cessent d’augmenter : « 4.661 en 2023, contre 4.530 en 2022 et 4.446 en 2017 ». Pour tout arranger, outre les radars fixes, il y a désormais les radars mobiles, embarqués dans des voitures banalisées, qui font la fortune d’entreprises privées. Étrange contradiction que celle-là : quand des voisins s’organisent entre eux pour effectuer des rondes, histoire de tenter d’assurer un peu de tranquillité dans leur quartier, certains médias sonnent le tocsin contre des « milices privées » ; mais quand l’État délègue l’ordre public à des sociétés privées, ces mêmes médias n’y trouvent rien à redire. De là à imaginer que ces gens sont privés de bon sens, il n’y a qu’un pas.

Puis il y a encore cette nouvelle étape franchie dans la répression, avec les municipalités ayant maintenant le droit d’installer des radars où bon leur semble ; mesure qui a été officialisée par un décret signé le 9 mars 2024. Résultat ? 30 radars sont d’ores et déjà prévus à Toulouse, 50 à Marseille et à Montpellier et 100 à Lyon. Un racket qui sera bientôt aggravé avec des PV pour excès de vitesse en ville de 135 euros ; c’est-à-dire de dangereux délinquants roulant à 55 km/h plutôt qu’à 50… 135 euros pour un « crime » aussi grave ? Les législateurs comprennent-ils seulement à quel point de telles amendes sont susceptibles de grever le budget des familles les plus modestes ?

Des amendes au montant délirant

Mais au fait, où en sommes-nous, du principal : la mortalité routière ? Lors d’un colloque organisé au Sénat, le 20 mars dernier, la Ligue de défense des conducteurs rappelait que depuis dix ans, « le nombre des morts sur la route s’était stabilisé à 3.500 ». Une statistique qui mérite d’être mise en regard avec celle de 1972, année noire où l’on compta jusqu’à 18.034 décès. Depuis, le parc automobile a augmenté de façon exponentielle, tandis que la mortalité routière n’en finissait plus de baisser. La principale raison de toutes ces vies sauvées ? L’amélioration de la sécurité des véhicules, entre freins ABS, airbags et autres innovations technologiques.

Ce qu’a confirmé, lors de ce colloque, Jean-Yves Le Coz, médecin et enseignant en biomécanique à l’École nationale supérieure d’arts et métiers : « Entre les véhicules équipés de systèmes de sécurité active et passive et ceux qui n’en ont pas, on obtient moins 70 % de risques de blessures graves et mortelles ».

Mieux vaut être délinquant que conducteur

Un avis également partagé par Bernard Darniche, ancien champion de rallye : « L’endroit où on est autorisés à rouler le plus vite, les autoroutes, c’est là où il y a le moins d’accidents. » Et de poursuivre : « Les règles, aujourd’hui en France, bien malin celui qui dit "je les respecte et je les décrypte toutes". C’est juste impossible. […] Tant qu’on ne déconnectera pas la sécurité routière du monde politique, on sera dans un système qui ne marche pas. » Du coup, affirme Rémy Josseaume, avocat au barreau de Paris et président de l’Automobile-Club des avocats : « Aujourd’hui, il vaut mieux être un délinquant de droit commun qu’un délinquant routier, devant un tribunal. »

Mais comme les seconds rapportent plus à l’État que les premiers, la répression vaudra toujours mieux que la prévention pour ces honnêtes citoyens ne demandant rien de plus que pouvoir se déplacer sans être en permanence traqués et rackettés.

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Nicolas Gauthier
Journaliste à BV, écrivain

Vos commentaires

37 commentaires

  1. Moi personnellement j’aimerai un jour avoir le ratio des chiffres précis des PV dressés par rapport à ceux réellement encaissés. En tenant compte de tous ceux qui ne font pas de changement d’adresse, de changement de carte grise après achat, de tous ces véhicules immatriculés en Espagne, Roumanie et autres conduits par des gens que nous accueillons avec nos impôts de contribuables. Ne pas oublier les voitures étrangères conduites légalement par des ressortissants de ces pays mais où il n’y a pas d’accord pour la transmission des PV.
    Cela on vous ne le dira jamais car l’automobiliste Français se lèverait avec un gout amer de la justice et de l’égalité devant la loi.

  2. Rouler à 55km/h quand la circulation est nulle et à la même vitesse quand la circulation est
    intense ce n’est pas pareil, le radar fait-il la différence ?

  3. Non pas « de dangereux délinquants roulant à 55 km/h plutôt qu’à 50… » mais roulant à 35 km/h plutôt qu’à 30… ce qui devient aujourd’hui la norme !
    L’état n’est plus qu’un éleveur de veaux, mais de veaux consentants, puisque la majorité de ces derniers reconduit imperturbablement les mêmes lorsqu’on lui demande son avis !

  4. Décevant de voir Nicolas Gauthier employer le mot « racket » pour des contraventions que seules les contrevenants paient. Il n’a sans doute jamais été racketté pour mettre sur le même plan une contribution volontaire et une extorsion obtenue par la menace ….

    • S’il n’y avait pas la menace implicite, payeriez-vous de bon gré votre contredanse? Alors, quelle différence avec un racket?

    • Non, le mot racket est tout à fait approprié.
      On peut ajouter à la liste de monsieur Gauthier la multiplication des radars sur des tronçons où les limites de vitesse changent tout le temps, à des feux où les deux roues sont étrangement oubliés et, cerise sur le gâteau, les contraventions à la volée où c’est open bar pour la vidéosurveillance détournée en vidéoverbalisation.
      Oui, c’est du pur racket

  5. Et c’est combien pour chaque vélo qui ne respecte pas le code de la route : feux, priorité, sens interdits, etc… ?

  6. Dans ma région, de nouveaux radars, dits de chantier (polyèdres blancs, mobiles) se sont récemment installés sur une nationale que j’emprunte souvent.
    Rassurez-vous, avant même toute contestation jaune, toute coercition sanitaire et tout désaveu massif du locataire, les autres, fixes ou non, de mon département étaient déjà recouverts de peinture.

    Celui, donc, que j’évoque a très rapidement connu le même sort. Je pense que la colère sourde se fait déjà entendre.

    Mais je suis rassuré, tous ces prédateurs trouveront bien une parade. Le mouton peut encore se faire tondre.
    Par contre les « go-fast », les rodéos nocturnes sauvages….

    C’est inouï ce que l’homme est capable de développer comme ingéniosité lorsqu’il s’agit de nuire à son prochain, surtout si il y est disposé.

  7. C’est effectivement un racket organisé contre les gens « normaux » puisque les autres, comme à Lyon, coupables des infractions les plus dangereuses (feux rouges brûlés ou stop allègrement grillés) ne paient pas les PV …
    Forts avec les faibles et faibles avec les forts, encore et encore

  8. la délinquance routière est parallèle à la délinquance de droit commun. L’une comme l’autre progresse et sans doute y-a-t-il un cousinage entre ces deux manières d’être de certains dans notre pays.

  9. Bientôt les radars n’auront plus lieu d’exister puisque les voitures seront de série équipées d’un régulateur de vitesse automatique non déconnectable semble t’il. Il faudra alors que nos petits hommes gris imaginent d’autres sources de taxation. Vous voyez ce n’est pas facile tous les jours pour nos vils raquetteurs !

  10. Des sous des sous…et puis des français avec le mors dans les dents pour en faire des moutons

  11. RACKET ! Le mot est juste. Ce système n’a plus rien à voir avec la sécurité (comme pour les contrôles techniques). Ce n’est qu’une imposition supplémentaire inventé par Sarkozy (pour faire gagner du pognon à son frangin qui les construisait). Je parie que les mairies vont les installer sur les limitations à 30 qui se sont multipliées partout et totalement irrespectables surtout la nuit quand il n’y a personne dans les rues.

  12. Ce qui est regrettable dans cette liberté donnée aux communes, c’est de mettre, une fois de plus, entre des mains aux seules vue électorale, ce qui doit relever de la sécurité. Sur le fond, je trouve plus sécuritaire de contrôler la vitesse en agglomération, plutôt que de planter un radar pompe à fric au milieu de nul part. Malheureusement, l’état impecunieu réclame d’énormes moyens afin de pouvoir dépenser sans compter et sans contrôles.

  13. Bien sûr que les radars sont utiles. Qui ne redoute pas de perdre un enfant, un proche, tué par un chauffard criminel ? Mais là comme ailleurs, le gouvernement ne fait pas ce qu’il faudrait.
    Les radars pour contraindre à rouler doucement dans les passages dangereux doivent rester tels quels, bien signalés et avec une très faible marge de dépassement, ok.
    Les radars pour attraper les chauffards ne devraient pas être signalés, évidemment. Mais leur marge de dépassement devrait être de 15 ou 20 km/h. Il s’agit d’attraper des fous dangereux, non pas ceux qui roulent normalement, car on ne peut pas savoir à quelle vitesse on roule exactement, à 5 km/h près, sans que son regard soit scotché sur son compteur – ce qui est dangereux, en outre.
    Et, en parallèle, rectifions les délires de ces panneaux limitant la vitesse dans des zones où ce n’est pas du tout nécessaire, comme des panneaux « 50 » placés à des centaines de mètres des entrées de certains villages, des « 70 » abusifs, et les « 80 » de rigueur, alors que « 90 » convenait largement.
    Une telle mesure serait comprise et acceptée car elle correspondrait à une réalité de la conduite.

  14. Il fait régulièrement détruire les radars et défoncer les privés conducteur de mobiles

  15. Je ne me suis fait verbaliser que deux fois dans ma vie automobiliste. Et chaque fois j’ai fait un don de 150% de la valeur de la contravention à une association de mon choix (de préférence agissant contre les abus du gouvernement). Cela me coûte plus cher mais au moins, je peux récupérer (défiscalisation) le montant de la contravention et l’État ne gagne rien dans l’affaire. Si cette attitude se généralisait, je pense que l’État regarderait à deux fois avant de racketter les automobilistes.

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