[RAISON GARDER] Pourquoi Trump a gagné

trump

Soyons très honnêtes : je n’ai pas la réponse à cette question car je ne suis ni un spécialiste des États-Unis ni un sociologue averti. Mais, également, parce que les organes d’information ne m’ont pas donné à temps les informations et les analyses nécessaires.

Bien sûr, après l’élection, les « prophètes du passé » se déchaînent sur les médias. Ils nous expliquent par a + b que la victoire de Trump était prévisible, parce que ceci ou cela… Dommage qu’ils n’aient pas pris la peine de nous le dire avant !

En vérité, les médias officiels, qui se vantent d’être des éléments décisifs de la vie démocratique, n’ont absolument pas rempli leur rôle à propos de la présidentielle aux États-Unis. Tous (y compris la presse « bourgeoise » comme Le Figaro ou Valeurs actuelles) ont répété les mêmes slogans moralisateurs (anti-Trump) plutôt que de nous éclairer sur les enjeux proprement politiques qui émergeaient au cours de la campagne.

Il n’y avait là rien d’impossible. Nous ne demandons pas que les médias prédisent le vainqueur : l’alchimie électorale est complexe et les sondages donnaient systématiquement les deux candidats dans un mouchoir de poche. Mais nous attendons d’eux, avec raison, les clés politiques du choix en cours, et c’est sur ce point que les médias ont défailli.

Pourtant, ce n’était pas très difficile. Car même un béotien comme moi, en décryptant les médias (sur des points que lesdits médias négligeaient, justement, d’approfondir), avait pu remarquer que la campagne de Kamala Harris semblait un peu bizarre. Pour résumer, elle privilégiait trois axes : la personnalité de Trump ; la démocratie ; l’avortement.

Son discours sur Trump était simple : c’est un méchant. Mais une telle affirmation s’avérait plutôt inutile, car les États-Uniens connaissaient le Trump politique depuis huit ans : les dénonciations ne pouvaient guère avoir d’effet, et Kamala Harris perdait donc du temps et de l’énergie sur ce thème.

De plus, ce qui frappait, c’était l’étonnante maturité politique qui s’exprimait lors des « micros-trottoirs ». Les réponses étaient souvent structurées ainsi : « Je sais que Trump est grossier, ou raciste, ou misogyne, ou hâbleur (rayez les mentions inutiles), mais pour l’économie, ou pour l’immigration, ou pour la sécurité, il semble meilleur que Harris. » Les dénonciations ne pouvaient donc pas avoir d’effet, les défauts de Trump étant déjà pris en compte.

Le discours de Harris sur la démocratie était également simple : avec Trump, la démocratie est menacée. Mais les États-Unis sont profondément polarisés et des portions importantes de la population n’ont plus un « ressenti » commun. Beaucoup d’États-Uniens estiment (à tort ou à raison, peu importe) que c’est « l’État profond », le Parti démocrate, les élites de Washington, etc., qui menacent la démocratie. Cette invocation de la démocratie ne pouvait donc pas avoir de grande portée et Harris perdait du temps et de l’énergie sur ce thème.

La question de l’avortement était certainement un point fort pour la candidate, puisqu’elle pouvait notamment servir à mobiliser un certain nombre de femmes. Toutefois, l’analyse électorale a montré depuis longtemps que les choix sont déterminés premièrement par les questions politiques et sociales, et secondairement seulement par les questions sociétales et culturelles. L’avortement était une variable intéressante pour Kamala Harris, mais en complément d’une offre politique et sociale.

Or, sur les questions proprement politiques et sociales qu’agitait Trump, parce qu’elles préoccupaient les électeurs, le discours de Harris était flou, souvent à côté de la plaque, ne réussissait pas à se démarquer de l’héritage Biden et, surtout, ne « s’incarnait » pas. Sur l’immigration, par exemple, l’image proposée par Trump était concrète : le fameux » mur » à la frontière mexicaine. À l’inverse, il est impossible de savoir, encore aujourd’hui, ce que proposait concrètement Harris sur cette déterminante question migratoire.

Ceci ne signifie pas qu’il était possible de dire à l’avance que Trump gagnerait aussi largement. Mais cela obligeait des médias qui se veulent « les remparts de la démocratie » à aller fouiller en profondeur plutôt que de ressasser, tous autant qu’ils sont, des slogans anti-Trump.

Car le rôle des médias, contrairement à ce qui se pratique massivement aujourd’hui, n’est pas de nous dicter une « bonne conduite » mais, plus prosaïquement, de nous raconter le monde et de le décrypter pour nous, afin de nous aider à poser des choix personnels fondés.

L’élection de Trump est maintenant faite. Toutefois, les mêmes défauts médiatiques sont à l’œuvre à propos de l’attitude qu’il conviendra d’avoir face à lui : les médias nous proposent plus d’invectives et de condamnations morales que d’analyses politiques sérieuses. Le résultat risque bien d’être une nouvelle déconvenue.

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Alexandre Dumaine
Journaliste, écrivain

Vos commentaires

37 commentaires

  1. L’élection de Trump est une manifestation de la guerre des peuples contre les élites. Si les peuples se sont révoltés c’est que les élites occidentales leur font la guerre, du haut de leurs prétendues « lumières », depuis des décennies. L’élection de Trump est une forme de révolution populaire qui a été conduite contre 80% des médias US (99% des médias européens, notamment français). Ce parti pris médiatique est très inquiétant pour la démocratie occidentale. Il signe une main mise « élitiste » sur les moyens d’information grand public. Un fait apparait évident : les USA demeurent le pays occidental le mieux à même de laisser une petite place à la liberté d’information.

  2. Contrairement à ce qui est écrit, BV et VA avaient prévu la victoire de Trump avec un bémol concernant la nature du Président élu. Ce qu’ils n’avaient pas appréhendé, c’est le triomphe total. Les Instituts de Sondage sont des acteurs politiques cherchant à imposer leurs souhaits : des « influenceurs »sans vergogne .

  3. Hier lors de la réouverture de Notre Dame de Paris voir Mr Trump et Macron semblant bien ce parler mais il faut que Mr Trump n’oublie pas que Macron en parlant aux Américains qu’il faut voter K.Harris car Trump c’était le méchant le pire.

    • Trump est chrétien, le pourquoi d’abord de sa visite. Macron n’est qu’un pion pour lui, malheureusement pour la France , mais quand on a sa tête un narcissique mondialiste anti français, on voit le résultat. Trump et Poutine, qui le respecte trouveront un accord. Et Zélinsky se soumettra, ou fini l’aide. Quelques concessions russes , peut-être Odessa , Karkiv et la guerre est terminée. Ça va traîner un peu,le temps que les Russes confortent leurs rapides avancées sur le terrain.

  4. Il faut interdire les sondages politiques qui sont biaisés, on le sait, car des instruments du système.
    Les journalistes systèmiques seraient coincés et cesseraient leurs élucubrations.

    • Il faut interdire les monopoles journalistiques et sondagiers car ils ont les mêmes patrons. Et donc n’autoriser un média de gauche que s’il a participé au financement de son alter ego de droite. Facile, mais valable uniquement dans une démocratie, pas dans sa caricature totalitaire française.

  5. Il faut interdire les sondages politiques qui dont biaisés, on le sait, car des instruments du système.
    Les journalistes systèmiques seraient coincés et cesseraient leurs élucubrations.

  6. Les réponses à votre préoccupation sont dans votre texte. Tout est dit et applicable, nos médias devraient en tirer leçons : « aller fouiller en profondeur plutôt que de ressasser, tous autant qu’ils sont,… » « le rôle des médias, contrairement à ce qui se pratique massivement aujourd’hui, n’est pas de nous dicter une « bonne conduite » mais, plus prosaïquement, de nous raconter le monde et de le décrypter pour nous, afin de nous aider à poser des choix personnels fondés. ». Nous souscrivons totalement. Ajoutons, faudrait-il encore que le niveau de ces médias soit à la hauteur des enjeux. Nous savons tous que les produits de notre Education Nationale ne sont plus au niveau des meilleurs des classements mondiaux. Ainsi nos médias s’inscrivent dans cette France guimauve du « en même temps », du « oui, mais… ». Rien de tranchant, ce qui convient à l’Arcom et aux juges.

  7. C’est mon avis =  » le rôle des médias, contrairement à ce qui se pratique massivement aujourd’hui, n’est pas de nous dicter une « bonne conduite » mais, plus prosaïquement, de nous raconter le monde et de le décrypter pour nous, afin de nous aider à poser des choix personnels fondés. »

    C’est pourquoi je me méfie des journalistes et que je tiens à lire les avis opposés de ceux ci pour me donner une idée.
    Et quand ils sont tous d’accord entre eux, systématiquement, je subodore une magouille.

    • Prendre du recul, de la hauteur. Tel est le défit auquel est confronté chaque électeur. Les journalistes, comme souvent les politiques, n’ont pas véritablement de convictions chevillées au corps, ils vont, le plus souvent, à la soupe. Ils affichent les idées qu’ils croient être « dans le vent » sous le magister de quelques dangereux idéologues. Mais d’opinions tranchées, de réflexions sincères, de volonté d’être impartiaux sont des qualités qu’ils ignorent, voire même qu’ils méprisent… Il faut lire et écouter toutes les opinions (lorsqu’elles sont disponibles) et regarder aussi la presse étrangère si on peut les comprendre dans le texte. Mais voilà qui devient chose bien compliquée et que tous ne peuvent satisfaire.

  8. Trump est un homme d’affaires avec tout ce que cela comporte et l’Amerique n’aime pas ses comportements hors la loi comme ceux de Reagan pour lesquels il traîne quelques casseroles . L’avenir dira s’il ne vaut pas mieux fermer les yeux sur des défauts connus et privilégier la formule « America (ou France ) first… »

  9. Trump a ouvert la voie de la révolte du peuple face aux élites déconnectées, suivons son chemin.

  10. Trump est un excellent orateur et provocateur. Il a parlé dans le sens du peuple et non pour un concours entre professionnels de la politique. C’est ce qui manque en France et seule Marine le Pen devrait s’y remettre car la dediabolisation c’est terminé il faut foncer et réveiller les consciences, la France est sur la voie de la perdition et a besoin d’un grand chef. Les experts de plateaux télé , les donneurs de leçons, les professionnels de la politique n’ont pas la même assiette qu’une majorité du peuple lorqu’ils mangent. La réalité de la rue avec l’insécurité n’est pas connue de la majorité des décideurs, la réalité du caddie lors des courses alimentaires n’est pas connue des décideurs. Ils vivent entre soi et n’ont qu’une ambition, leur nombril.

    • Je préfère Sarah Knafo qui est plus stable, quoique très jeune, mais ce qu’elle dit et ce qu’elle propose est toujours très « éclairant ». Et elle est la seule (avec Eric Zemmour naturellement mais plus en retrait et il a raison car il s’est trop affiché sur une ligne qui le fait juger raciste, elle pas) à parler des économies et, pas n’importe lesquelles, de très, très grosses économies qui permettraient même de baisser les charges pesants sur les entreprises, ce qui leur permettrait d’investir, se développer, embaucher; et les impôts sur les particuliers ce qui améliorerait immédiatement le niveau de vie et le pouvoir d’achat. Reste à explorer ses opinions sur la politique étrangère mais sa formation et son expérience passée devrait l’y aider grandement. Posée, réfléchie, tenace et sans complexe elle a l’étoffe qui conviendrait. J’aimerais qu’elle associe un Charles Prat à ses équipes…

  11. Excellent article qui démonte les médias et le peuple commence (un peu tard) à comprendre.
    Quant aux qualificatifs donnés à Mr Trump ils sont inexacts et « dégueulés  » à longueur de journée par des médias anti. « Qui veut tuer son chien dit qu’il a la rage ». Mais la mayonnaise ne prend plus.

    • Cette mayonnaise comme vous dites aurait bien fait de ne pas prendre pour Fillon, on n’en serait peut être pas où nous en sommes..

      • Fillon, le prince de la repentance. « J’ai rien fait, mais je vais rembourser quand même ». Un vrai leader, çui-là.

  12. La sécurisation des frontières nationales martelée par Trump à chacune de ses interventions a été déterminante comme elle le serait en France si un candidat le faisait.

    • La mentalité américaine n’est pas transposable à la France. Chez nous, quoique l’on en pense, les gens conservent au fond d’eux une notion sociale qui complexifie le problème. Chez eux, protestants en majorité c’est tu compte sur toi chez nous avec notre ADN catholique c’est plutôt « il faut avoir une forme de charité » si bien qu’un discours là-bas fonctionne mais ici il est assimilé à du racisme. (Merci la gauche imbécile) il suffit de voir combien de procès ont été intentés contre E. Zemmour. L’argument « contre l’étranger » est à manier avec adresse, raisonnablement pour être entendu mais ne pas être dominant.

  13. Je crois que les médias qui nous dictent la bonne conduite ont « du plomb dans l’aile » çà a été bien long mais les gens (les Français ?) commencent à comprendre ce théâtre à coups de milliards qu’ils soutirent de leurs poches

  14. Il fallait voir la réunion ce soir entre le Trump macron et zelensky , réunion a l’Élysée de 30 mins .
    Un zelensky mal habillé en polo et basket..Trump et macron en costume cravate étaient plus en accord pour l’inauguration de la cathédrale

    • Remarque que j’ai posté sur fb concernant le président ukrainien trop pauvre certainement pour s’acheter un costume de circonstance pour Notre Dame. Quel manque de respect. Autre supposition il est venu mendier encore et encore des armes.

      • Pour mieux les revendre (les armes) aux groupes terroristes ! Ce criminel contre l’Humanité a laissé mourir toute la jeunesse ukrainienne dans les tranchées, ce qui fascine macron !

      • Antisysteme59, sans oublier les bombardement contre son peuple et toutes ses exactions contre certains entre 2014 et 2022

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