[RAISON GARDER] Trump : ni notre ami, ni notre ennemi

Ils sont, l’un états-unien, l’autre russe, et c’est cette qualification qui les détermine.
@ROBERTO SCHMIDT / AFP
@ROBERTO SCHMIDT / AFP

Certaines personnes - disons de la droite nationale, ou souverainiste, ou patriote, peu importe le nom - estiment que Trump et Poutine seraient nos amis et nos alliés en raison des valeurs qu’ils portent (qu’ils porteraient).

Certaines personnes - disons de la droite libérale, du centre et de la gauche - estiment que Trump et Poutine seraient nos ennemis irrémissibles en raison des valeurs qu’ils portent (qu’ils porteraient).

La vérité - et il est capital de le comprendre si l’on veut être en mesure de leur faire face avec profit -, c’est que Trump et Poutine ne sont ni nos amis ni nos ennemis. Ils sont, l’un états-unien, l’autre russe, et c’est cette qualification qui les détermine : certainement pas une prétendue amitié ou une hostilité qu’on plaque sur eux ni même une ligne idéologique qu’ils affectent de suivre.

Bien sûr, si éclate pour une raison quelconque une polémique entre eux et nous (qui peut aller jusqu’à une forme de guerre, comme en Ukraine), eux diront des méchancetés sur nous et nous dirons des méchancetés sur eux. À l’inverse, si nous signons avec eux un accord quelconque, eux diront des compliments sur nous et nous dirons des compliments sur eux. Mais c’est du théâtre, rien de tout cela n’a de véritable importance.

Les Allemands, autrefois, disaient « Deutschland über alles ». Trump dit aujourd’hui « America First ». Je ne connais pas suffisamment le russe pour savoir exactement ce que dit Poutine, mais ce doit être à peu près la même chose, en russe. Ce qui est sûr, c’est que Trump entend s’occuper des États-Unis, que Poutine entend s’occuper de la Russie, que Xi Jinping entend s’occuper de la Chine, etc. Bref, la préoccupation de chacun de ces chefs d’État (et ce devrait être la préoccupation de tous les chefs d’État un tant soit peu responsables), c’est le bien du pays dont ils ont la charge.

Ces chefs d’État vont ainsi chercher à être les amis des pays dont ils doivent impérativement être les amis pour le bien de leur propre pays. Ils vont être indifférents aux pays qui ne comptent pas pour leur propre pays. Et ils vont être les ennemis des pays qui, structurellement ou bien de fait, sont les ennemis de leur propre pays. C’est tout simple et cela ne souffre pas de difficulté.

Donc, il n’y aura aucune « alliance mondiale des nationalistes ». Ni Trump ni Poutine ne régleront leur politique vis-à-vis de la France, par exemple, sur le fait que Marine Le Pen ou Éric Zemmour ou Marion Maréchal leur seraient sympathiques. Et ce sera la même chose pour ce qui concerne Meloni ou Orbán. Mais ni Trump ni Poutine ne régleront non plus leur politique vis-à-vis d’un gouvernement mal disposé à leur égard ou qui leur serait politiquement hostile, sur la base de sentiments transitoires : s’il le faut, ils seront prêts à aller dîner avec le diable, tout en prenant la précaution d’apporter une longue cuillère.

Le seul critère sera (pour Trump) : cela profite-t-il aux États-Unis ? Le seul critère sera (pour Poutine) : cela profite-t-il à la Russie ?

Et la France et l’Union européenne ne doivent pas s’affoler ou se rassurer (selon les cas) d’une ligne idéologique (apparente) qui leur serait favorable ou défavorable, d’une amitié déclarée ou d’une hostilité claironnée. Il faut, certes, accepter de jouer ce jeu d’ombres (c’est le propre de la diplomatie), mais sans être aucunement dupes.

Ce qui est vraiment important, et même vital, c’est de jouer la partie de façon très serrée, en évaluant ses propres atouts et en bluffant autant que de besoin ; en évaluant les atouts de l’adversaire (même si on l’appelle provisoirement « allié ») et en perçant son bluff. Et toujours en recherchant un seul but : garantir et préserver les intérêts (respectivement) de la France ou de l’Union européenne.

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Alexandre Dumaine
Journaliste, écrivain

Vos commentaires

31 commentaires

  1. Le héros du film « la 25ème heure » tenu par un acteur je crois Anthonny Quinn ( ça remonte..) demandait face à un sujet compliqué  » si c’est bon pour Fontana » , son village roumain.
    Quant aux proximités, en 1939 l’Allemagne attaque la Pologne, dotée pourtant d’un régime de style Franco en Espagne, aidé par l’Allemagne et en 1940, Mussolini attaque la Grèce dotée d’un régime quasi plus nazi que celui de l’Allemagne, selon les livres d’histoire autorisés actuellement. Tout est dit sur les affinités et amitiés en relation.

  2. Dans vos articles faire référence à l’union européenne c’est faire perdurer une fiction. L’Union Européenne n’existe pas, ce n’ est pas une nation. Il existe des États Européens susceptibles de coopérer parfois de façon étroite.

      • J’ai simplement fait un peu d’économie et comme ça fait partie de mon métier, j’ai vu et étudié toutes les crises et leurs répercussions depuis mai 68 avec des résultats d’ailleurs quelquefois surprenant, par exemple qui aurait pensé que mai 68 allait apurer le marché et que le commerce de détail ferait son chiffre d’affaires entre septembre et décembre, enfin ceux qui n’avaient pas déposé le bilan.

  3. Un plaisir de lire ce papier. Il ne fait pourtant que traiter d »une évidence mais je suis frappé par le nombre de Français qui font de l’un ou l’autre, un monstre, un fou, un ingrat que sais-je encore alors qu’ils se préoccupent seulement de leur pays – avec plus ou moins de pertinence, c’est un autre sujet. Souhaitons nous des gouvernants vraiment « nationaux » et courageux, plus soucieux des intérêts de la France que de leur gloriole personnelle sur des sujets extérieurs. Il y a déjà largement de quoi faire…

  4. Trump et Poutine ne sont pas nos amis , ce sont de joueurs de poker qui ont lancé une partie qui risque de mettre l’Europe a leurs bottes si cette dernière n’entre pas dans la danse avec des cartes plus fortes que les deux autres.
    Les Américains n’ont jamais été nos amis depuis le début du siècle dernier , ils ont toujours essayer de faire de l’Europe leur marché privé, la création de l’Europe que nous connaissons actuellement est leur oeuvre, le « bébé » doit maintenant s’émancipé et prendre sont indépendance ,cette crise est une occasion en or afin de mettre fin a cela et surtout de mettre fin a l’hégémonie du $ , monnaie de papier qui ne repose sur rien puisque non gouvernemental (gestion, impressions faite par les 5 plus grandes banques d’affaires Américaine), juste un billet de monopoly ; des présidents ont essayer de récupérer cette gestion et cela leur a couté la vie , le dernier en date est Kennedy qui avait commencer l’émission de billet fédéral.
    Derrière chaque crise financière, politique qui ont conduite a une guerre , ce cache le système bancaire international qui ne cherche que le profit pour une minorité de personnes pour qui cette argent sert a corrompre afin d’avoir le POUVOIR , le pouvoir de détruire des pays, des vies , ces personnes savent très bien dissimulé leur fortune, vous ne verrez jamais leur nom dans le who’s who forbes.
    Pour que l’Europe gagne cette « guerre » il faut que tout le monde ce retrousse les manches , arrêtent de demander tout et n’importe quoi a l’administration , a l’état, que certains syndicats ce mettent au travail au lieu de battre le pavé…….

  5. Donald Trump « est » américain, au cas où ça aurait échappé à quelques-uns…
    Il a été largement élu « par » les américains !
    Donc, comme il l’a promis, il travaille d’abord « pour » les américains !
    Honnêtement, on n’a pas le droit de le lui reprocher.
    Pour une fois qu’un homme élu respecte la feuille de route sur laquelle il a été élu, plutôt que, au mieux le montrer du doigt, au pire passer son temps à l’insulter, qu’on se pose la bonne question : « pourquoi pas le nôtre ? »
    Pourquoi notre dirigeant ; bien ou mal élu, suivez mon regard ; ne respecte pas sa feuille de route, le programme dont il s’est gargarisé, qu’il nous a promis ?
    Ben oui, pourquoi ?
    D’autant que Macron, plutôt que s’occuper du bien-être des français, ils les insulte à chaque occasion, détruit leur outil de travail, les appauvrit, souille l’image de la France dans le monde, magouille avec les règles de la République, liste négative non exhaustive…
    Et oui, Donald Trump « is making America Great Again ! »
    Étrange non ?
    Ben oui, pour certain c’est étrange, un concept auquel ils ne sont pas habitués !
    Alors, c’est plus simple de traiter Donald Trump de nationaliste, d’égoïste, de menteur, de manipulateur, etc., quand ce n’est pas « facho », vous savez, ce mot à la mode… À gauche, mais pas seulement !
    Comme ce serait bon de croire en Macron s’il disait honnêtement : « Faire de la France un Grand Pays Encore »…
    On peut rêver, c’est pas encore taxé !

  6. Trump a fait des promesses électorales. Il dit ce qu’il va faire, il fait ce qu’il a dit. En France ils ont tous fait des promesses qu’ils n’ont jamais tenu et fait tout le contraire et c’est pour cela que depuis 30 ans on marche à l’envers. En France ils jouent pour leur place et non pour la nation. Tant que ce principe ne sera pas écarté nous irons à la dérive voire une catastrophe annoncée. Négliger le peuple souverain ne durera qu’un temps.

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