Razzias et violences collectives : un phénomène qui se banalise ?

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Des hordes de plusieurs centaines de « jeunes » qui déferlent à partir « des quartiers des banlieues voisines ». Des vols, des dégradations, des agressions. Le Stade de France ? Pas du tout, une piscine publique, à Tours, le week-end du 18 juin dernier, pendant la canicule.

Si vous n’en avez pas entendu parler, c’est parfaitement normal car, en dehors de Valeurs actuelles, difficile de trouver la moindre information sur le sujet. Sur le site de France Bleu, on préférait évoquer des « incidents » impliquant « des dizaines de jeunes mineurs » qui avaient forcé l'établissement à fermer prématurément ses portes. D’après Valeurs actuelles (23/6/2022), ils étaient, en réalité, environ cinq cents à semer le chaos, qui durera trois jours de suite.

Face à eux, sept agents de police qui interviendront le samedi, non pas pour rétablir l’ordre, mais pour mettre à l’abri et évacuer les autres baigneurs par les sorties de secours. Des familles traumatisées dont les vestiaires auront été parfois défoncés afin de voler leurs vêtements et les clés de leurs voitures. Pendant ce temps-là, et plusieurs heures durant, les hordes continueront à profiter des plaisirs aquatiques sans être dérangées par personne.

L’année précédente, le centre aquatique avait déjà été confronté à la même situation impliquant des groupes de mineurs. La presse régionale s’en était fait l’écho. Sur France Bleu, un maître-nageur avait parlé d’un « phénomène de meute » avec « des regroupements de 60 à 80 personnes ». Le problème était donc parfaitement connu, mais la politique reste toujours la même : ne rien dire, ne rien faire et surtout étouffer l’affaire.

Ou plutôt « les » affaires car, le même week-end du 18 juin dernier, à Hagondange (57), des faits similaires à ceux de Tours ont eu lieu, ainsi que l’a rapporté Le Républicain lorrain : « Panique au centre nautique Aquarives : 400 individus forcent le passage ». Le directeur des ressources humaines du groupe gestionnaire du centre décrivait une scène « choquante, foudroyante et d’une rare violence ».

Il ne faudrait pas, cependant, abandonner ce type d’événements à la seule rubrique des faits divers. Il est probable que nous assistions au développement et à la banalisation d’une nouvelle forme d’action délinquante. Comme pour le Stade de France, on pense au départ à un acte isolé lié à des circonstances exceptionnelles. On se rassure ainsi à peu de frais. En réalité, dans une première phase, les délinquants testent de nouvelles limites. Lorsqu’ils constatent qu’ils peuvent agir en toute impunité, le phénomène, isolé au départ, commence à se banaliser et à croître.

C’est ce qui s’est passé avec les refus d’obtempérer qui font désormais régulièrement l’actualité. Le 9 juin dernier, à la suite des propos polémiques de Jean-Luc Mélenchon sur la police qui « tue », franceinfo publiait des statistiques qui montraient qu'ils étaient en constante augmentation, avec une explosion de 46,6 % entre 2010 et 2019. Thierry Clair, secrétaire général adjoint du syndicat UNSA Police, dénonçait des « suites judiciaires qui ne sont pas dissuasives ». Quand il y a « des suites » car, comme le reconnaissait franceinfo, une proportion importante de ces refus d'obtempérer font l'objet d'un classement sans suite par le parquet. C’est l’effet cliquet : lorsqu’un certain stade est atteint du fait du laxisme judiciaire, le nouveau phénomène délinquant s’installe et se répand, sans qu’il paraisse possible de revenir en arrière.

On ne peut donc que s’inquiéter de la multiplication des actes impliquant de plusieurs dizaines à plusieurs centaines d’individus. Les récents événements du Stade de France ne sont peut-être alors que l’illustration brutale d’un processus de contagion et de banalisation des razzias et des violences collectives.

Frédéric Martin-Lassez
Frédéric Martin-Lassez
Chroniqueur à BV, juriste

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