Réforme du lycée : la grogne s’étend, et il y a de quoi !
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Nos enfants actuellement en classe de seconde sont en train de choisir leurs « spécialités » pour la première. Et cette réforme du lycée suscite la perplexité chez beaucoup d'élèves et de parents. Perplexité accrue quand ils découvrent que leurs professeurs, et les proviseurs, sont parfois aussi peu informés qu'eux sur les modalités concrètes de cette réforme : horaires, épreuves du bac, contenus d'enseignement, etc. En effet, tout le monde navigue à vue. Cette réforme sent beaucoup l'impréparation. Et ce qui se dit dans les milieux bien informés, c'est que, cette année, encore, ce n'est rien, mais l'an prochain, avec la montée en terminale...
Dernière preuve ? Pas plus tard que jeudi, le ministère a dû publier un communiqué sur la place des mathématiques dans l'architecture du nouveau lycée : à côté de la spécialité « Mathématiques », il y aura une option « Mathématiques complémentaires » et une autre « Maths expertes ». Paniqués par la disparition de la série S, mais aussi de la ES, qui n'avait pas démérité, beaucoup de parents et d'élèves se ruent sur cette spécialité « Mathématiques », pourtant d'un niveau exigeant. Par précaution.
Du côté des enseignants, la grogne monte, par la base. En effet, tout un tas de détails manifestent l'amateurisme et l'impréparation. Par exemple, certaines épreuves du bac sont encore floues et imprécises, notamment l'EAF (épreuve anticipée de français) qui aura lieu - dans un an ! - sur les nouveaux programmes alors que les élèves auront fait l'ancien en seconde et n'auront pas été préparés à un nouveau type d'épreuves (la contraction de texte, qui est de retour en série technologique), un oral de français qui portera - peut-être ! - sur une question de grammaire et un fumeux « dossier de l'élève » : tout cela n'est pas très sérieux. Ici ou là, des enseignants choisissent des moyens d'action nouveaux : refus de la fonction de professeur principal, décision d'attribuer des 20/20 à tous les élèves lors d'épreuves de TPE ou pour le 3e trimestre, comme viennent de le faire, jeudi, les professeurs du lycée Gaston-Fébus d'Orthez. Certains en viennent même à envisager des actions plus dures et inédites. My God, les enseignants se radicaliseraient-ils ? Soyez rassurés : ce n'est pas le genre de la maison, les professeurs sont de très dociles fonctionnaires, en fait, sous leur vernis d'éternels contestataires.
Mais quelques signes ne trompent pas : ces derniers mois, le SNALC, syndicat classé à droite et attaché à un enseignement exigeant, a consulté ses adhérents sur les formes d'action : il en est ressorti que les professeurs souhaitent des formes d'action enfin efficaces, comme la grève le jour des examens, et donc du bac ! Et voilà que le SNES, le syndicat mammouth du mammouth, vient d'en faire autant, comme s'il sentait que... Ce jeudi 4 avril, le SNES a donc lancé sa consultation auprès de ses 62.000 membres, avec cette question : « Êtes-vous prêts à faire grève le premier jour du baccalauréat, lundi 17 juin, pour l’épreuve de philosophie ? » Le SNALC a, lui, un temps d'avance et a déjà déposé des préavis de grève nationaux qui couvrent les enseignants pour toutes les épreuves du brevet et du bac.
Wally Bordas, pour Le Figaro Étudiant, a sondé quelques profs : l'idée divise. Entre leurs ardeurs revendicatives ou révolutionnaires et le passage à l'acte, certains professeurs ont quelques pudeurs. Faire grève le premier jour du bac, pour certains profs, cela frise le péché mortel. Mais d'autres pensent que la coupe est pleine ou comprennent, au moins, cette « radicalisation » des enseignants. Par exemple, cet enseignant de Béziers, Bruno Modica, pour qui « les enseignants ne sont pas entendus et peu valorisés. Il y a une exaspération qui conduit à cette prise de position extrême. » Lui-même affirme pouvoir « être amené à participer à cette action ».
Alors, les enseignants se « giletsjaunisent »-ils ? Ce sera peut-être le sujet qu'aura à traiter Jean-Michel Blanquer, le 17 juin. Pour l'épreuve de philo.
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