Réforme du lycée : la propagande est lancée !

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Jean-Michel Blanquer poursuit sa transformation idéologique de l’Éducation et présente, depuis septembre, dans toutes les académies de France les grandes lignes de sa réforme[ref]http://www.education.gouv.fr/cid134222/seminaires-inter-academiques-autour-de-la-reforme-du-lycee-general-ettechnologique-et-de-la-voie-professionnelle.html[/ref]. Remarquons qu’il souhaite donner l’illusion de la liberté et de la simplicité pour les élèves, de la continuité pour les enseignants, mais chacun des points abordés laisse transparaître l’obsession frénétique de la maîtrise des consciences à travers l’Éducation. Ainsi, le tronc commun des épreuves du nouveau baccalauréat reste le français et la philosophie, disciplines auxquelles sont adjoints l’épreuve orale et les deux enseignements de spécialité choisis par les élèves : liberté et simplicité apparentes…

En effet, le choix des élèves pour les enseignements de spécialité sera limité par les propositions des établissements, qui ne pourront pas fournir l’intégralité des offres suggérées par le ministre, ce qui crée une discrimination. Avec l’ancien système, les volumes horaires et le système des options permettaient une certaine souplesse d’organisation : dans le nouveau système, il sera peut-être plus complexe de coupler physique-chimie, mathématiques et latin, par exemple. En philosophie, la série ES devait suivre 4 h, la série L 8 h et la série S 3 h : avec la réforme, tout est réduit à 4 h[ref]http://cache.media.eduscol.education.fr/file/Bac2021/24/0/Depliant_d_information_Bac_2021_942240.pdf[/ref] ! Si la série S gagne 1 h, la série L perd 4 h : ce qui signifie qu’en réalité, le ministre a réalisé une économie de 3 h sur le poste de philosophie. Il nous sera rétorqué qu’il reste l’enseignement de spécialité « humanités, littérature et philosophie » : mais les programmes ne sont pas encore sortis et l’on ne sait pas à quel enseignant sera attribué cet enseignement qui, d’ores et déjà, ne relèvera pas de la philosophie pure. Sera-ce un enseignement interdisciplinaire menés par deux enseignants – cela paraît peu probable, à l’heure où tous les ministères doivent opérer des coupes budgétaires – ou attribué à un seul enseignant qui ne sera pas toujours celui de philosophie ?

Par ailleurs, la liberté pédagogique est de plus en plus restreinte : chaque établissement pouvait, jusque-là, organiser dans l’année des examens blancs en calibrant la forme et le fond de ces entraînements suivant les besoins des élèves et les possibilités matérielles ; désormais, le ministère les impose comme « épreuves communes de contrôle continu », tandis que les sujets devront être
sélectionnés dans la banque de données du ministère. Seul le choix des dates sera laissé à l’autonomie des établissements… Il s’agit donc bien de verrouiller tous les esprits, ceux des élèves comme ceux des enseignants. Ce contrôle de la pensée transparaît également dans la présentation de l’épreuve de philosophie comme un "rituel républicain"[ref]file:///C:/Users/asus/Desktop/COURS/TEXTES%20OFFICIELS/Réforme%20du%20Bac%20et%20du%20Lycée%20-
%20Questions%20Réponses%20(1).pdf[/ref] , qui sonne étrangement comme une expression maçonnique.

Pourquoi affirmer vouloir permettre aux élèves de faire des choix qui leur sont propres et effacer les séries S, ES et L qui n’auraient plus de sens pour leur imposer une épreuve de philosophie comme un rite maçonnique et un enseignement scientifique visant à "familiariser l’ensemble des élèves avec le processus de construction de la vérité scientifique" ? L’enjeu de l’Éducation nationale serait donc de délivrer une « vérité » ? Mais pourquoi serait-elle « scientifique » ? Le ministère devrait plutôt se concentrer sur la transmission de connaissances scientifiques générales, non sur la délivrance d’une « vérité » : cela relève de la propagande. Quoi d’étonnant, puisque cet enseignement doit également permettre "d’assurer la familiarité de tous les élèves avec les enjeux quantitatifs. Il sera également l’occasion d’appréhender dans une perspective scientifique les grands enjeux de notre temps, par exemple la transition numérique, la transition écologique, bio-éthique ou encore l’intelligence artificielle." Mais l’enjeu de la réforme présenté n’était-il pas de ne pas forcer les élèves à se spécialiser de manière étroite et à acquérir l’autonomie nécessaire à leur pensée ? Au lieu de cela, on veut leur imposer les idées à la mode et une vision de l’humanité parmi tant d’autres, non les ouvrir à leurs propres représentations de l’avenir.

Bertrand Dunouau
Bertrand Dunouau
Professeur certifié de Lettres Classiques

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