Retraités en Algérie : contre la fraude, un député français réclame un contrôle

© Capture écran Service Public
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Quand la presse algérienne crie victoire un peu trop vite… En ce début de mois de février, les médias algériens se sont réjouis du retrait d’un amendement déposé dans le cadre de l’examen de la loi française de financement de la Sécurité sociale. Cet amendement, écrit par le député Les Républicains Fabien Di Filippo, entendait imposer un contrôle physique dans les consulats aux personnes résidant à l’étranger et bénéficiant d’une retraite française, sous peine d’une suspension du versement de leur pension. Un moyen d’éviter que des personnes décédées - ou plutôt leur entourage - continuent de percevoir leur retraite et, ainsi, de lutter contre la fraude. Ce 28 janvier, en commission des affaires sociales, après un bref débat, l’élu de Moselle a effectivement annoncé le retrait de son amendement. Un « soulagement » pour les médias algériens qui dénonçaient déjà une mesure « discriminatoire » prise à l’encontre des retraités algériens ayant travaillé en France. Hélas pour eux, ce 7 février, BV apprend que si cet amendement a bel et bien été retiré, son auteur l'a d'ores et déjà réécrit et déposé pour être débattu en séance la semaine prochaine !

Réécriture de l'amendement

Cela a apparemment échappé à la presse algérienne. « Grosse victoire pour les retraités algériens », « Bonne nouvelle pour les retraités algériens »… Retour en arrière. Ces 3 et 4 février, l’heure est au « soulagement », pour les journaux algériens. Après s’être inquiétés de l’amendement déposé par Fabien Di Filippo qui aurait, selon eux, engendré de « lourdes contraintes » pour les retraités algériens, l’annonce de son retrait n’a pu que les ravir. À lire les articles publiés de l’autre côté de la Méditerranée, on pourrait croire que le député LR a cédé face aux injonctions des Insoumis. En effet, en commission, les élus de La France insoumise n’ont pas manqué de dénoncer un article « fondé sur des principes racistes » et « discriminatoires ». Pour certains, comme Hadrien Clouet, « le débat sur la fraude revêt un caractère largement imaginaire ». Le député LFI a même accusé Fabien Di Filippo d’« inventer des problèmes » comme celui de « retraités centenaires en Algérie ». Autant de critiques qui auraient, selon les médias algériens, conduit l’élu de Moselle à faire marche arrière.

Contacté par BV, l’entourage de Fabien Di Filippo dément donc les affirmations de la presse algérienne. Il nous assure que ce n’est pas du tout sous la pression de ses collègues insoumis que le député LR a décidé de retirer son amendement. « Au contraire, ce n’est pas du tout son genre ! », nous souffle-t-on. Non, le parlementaire a supprimé son amendement pour ne pas que les dispositions déjà prévues par l’article 7 bis du projet de loi de financement de la Sécurité sociale ne disparaissent totalement. En effet, en l’état actuel, le texte de loi prévoit déjà d’apporter la preuve de l’existence par différents outils numériques. Or, Fabien Di Filippo proposait de réécrire totalement cet article en exigeant seulement un contrôle physique « par les autorités consulaires ». « Si, vraiment, le contrôle physique n’est pas possible, il faut prévoir des conditions dérogatoires », nous explique son entourage, pour justifier le retrait.

Une fraude réelle

Ce 30 janvier, le député a donc déposé un nouvel amendement que BV a pu consulter. Fabien Di Filippo demande à nouveau que « le bénéficiaire d’une pension de retraite versée à l’étranger se présente chaque année, en personne, devant les autorités consulaires françaises » afin de continuer à percevoir sa pension de retraite. Mais cette fois-ci, il ajoute : « S’il est démontré que la personne est dans l’incapacité totale de se déplacer ou d’envoyer une personne agréée par lui », alors le contrôle se fera grâce aux outils numériques déjà prévus par l’article 7 bis. Autrement dit, si cet amendement est adopté, le contrôle physique au consulat deviendrait obligatoire, sauf rares exceptions.

Loin de vouloir mettre des « bâtons dans les roues » des retraités installés à l’étranger, Fabien Di Filippo entend, de cette façon, lutter contre la fraude. Le député rappelle que, selon la Caisse nationale d’assurance vieillesse, environ un million de retraités français sont installés à l’étranger, notamment hors d’Europe. Au 31 décembre 2023, ils étaient ainsi 337.183 retraités à avoir choisi de s'installer en Algérie, premier pays étranger de destination des retraités. Or, en 2022, un programme spécial a tenté de vérifier l’existence des retraités presque centenaires installés en Algérie. « Près de 30 % des 1.000 personnes âgées de plus de 98 ans qui ont été convoquées ne se sont pas présentées », rappelle l’élu LR.

Certes, tous ne sont pas nécessairement des fraudeurs mais, alors que le versement des pensions de retraites est aujourd’hui simplement subordonné à la transmission d’un certificat de vie, le doute existe. D’autant plus qu’un cabinet privé d’expertise avait, en 2019, relevé « une fraude massive » chez les retraités de plus de 85 ans résidant en Algérie. Sur 1.000 dossiers d’allocataires français résidant en Algérie, « nous n’en avons retrouvé que 50 %. Sur ces 50 %, nous avons ressorti de l’administration algérienne 26 % d’actes de décès. Pour les 24 % restants, ce sont des supputations de décès […] ; ce qui laisse un nombre de personnes vivantes relativement faible », concluaient les experts. Alors qu'au Portugal, deuxième destination des retraités français, la fraude semble quasiment inexistante. Ce dossier rassemble de nombreux élus de droite. Ce 6 février, Sarah Knafo, députée au Parlement européen, appelait elle aussi à remettre de « l'ordre ».

Picture of Clémence de Longraye
Clémence de Longraye
Journaliste à BV

Vos commentaires

5 commentaires

  1. A 40 ans, ma tente accident de travail a été suspendue pour non cotisation et non consultation de médecin pendant 2 ans. A mon retour en France, j’ai du me présenter à mon médecin pour qu’il rédige un certificat de vie. Et il y en a qui trouvent anormal d’en réclamer un à partir de 80 ans.

  2. Pourquoi aucun de ces gauches ne s’offusquent que l’on exige ces contrôles pour les polonais , italiens ou portugais qui sont repartis dans leurs pays pour la retraite , il y a là du racisme et de la discrimination envers ces populations et ça ne les dérange pas .

  3. La solution est la carte d’identité ou la carte de séjour ou vitale biométrique.
    La puce contient les empreintes digitales numérisées et sont comparées aux empreintes digitales du sujet via un lecteur de carte .
    Exactement comme quand on passe le guichet « paraf » a Roissy.

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