Retraites : la face cachée de la réforme
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Après la réforme de la SNCF, le gouvernement, comme pour nous étourdir, se lance dans une autre réforme. Jean-Paul Delevoye, haut-commissaire à la réforme des retraites (HCRR), homme de confiance d’Emmanuel Macron – il a sélectionné les candidats LREM aux élections législatives –, a commencé à recevoir les organisations syndicales et patronales. Il vient de mettre en ligne une grande consultation publique intitulée : « Pour une retraite plus simple, plus juste, pour tous ». Qui pourrait être contre un tel objectif ? Mais, quand on connaît la conception que se fait notre Président de la consultation, on peut s’inquiéter de ses intentions.
Le candidat d’En Marche ! avait annoncé les grandes orientations : "Nous créerons un système universel des retraites où un euro cotisé donne les mêmes droits, quel que soit le moment où il a été versé, quel que soit le statut de celui qui a cotisé." Plus de régimes spéciaux. Une retraite par points ou, peut-être, un système de « comptes notionnels » où chaque actif disposerait d’un « compte virtuel » sur lequel il verserait ses cotisations : son « capital virtuel » serait transformé en pension de retraite par un « coefficient de conversion », en tenant compte de l’espérance de vie de la génération à laquelle appartient l’assuré. Pourvu que la retraite ne soit pas elle-même virtuelle !
Quand on y regarde de plus près, on s’aperçoit que, derrière des mesures plus ou moins consensuelles, s’en cachent d’autres pour le moins inquiétantes. On pourrait instaurer un mécanisme de correction automatique pour garantir la viabilité financière du système (autrement dit, le montant des pensions pourrait dépendre de la conjoncture économique). Il est, aussi, question de réviser les conditions de versement de la pension de réversion et de ne pas tenir compte des enfants dans le calcul de la retraite. Ce point mérite un commentaire particulier.
Dans la « consultation citoyenne », à côté de propositions comme "Garantir un financement par la solidarité nationale des droits à la retraite pour les parents qui s'arrêtent de travailler pour élever leurs enfants", on trouve, par exemple : "Renforcer la politique familiale ou les avantages fiscaux plutôt que de développer des droits spécifiques pour la retraite." Dans cette hypothèse, les bonifications de trimestres au titre de la maternité, la majoration de pension pour les parents de trois enfants ou plus disparaîtraient au motif qu’au moment de la retraite, les enfants ne sont plus à la charge des parents.
Une telle mesure confirmerait que les familles nombreuses sont, une fois de plus, dans le collimateur : d’une part, les « avantages fiscaux » sont soumis à des conditions de ressources ; d’autre part, il paraît évident que les parents ayant eu plusieurs enfants ont dépensé plus que les autres pour les élever, leur faire faire des études, et ne disposent pas du même patrimoine quand ils cessent de travailler. Enfin, le fait même d’envisager une telle solution souligne le désintérêt des gouvernements successifs pour la politique démographique, qui pèse pourtant sur notre système de retraites.
Le Conseil d'orientation des retraites (COR) prévoit qu’il y aura, à l’horizon 2040, moins d'un actif pour un retraité. Dans ces conditions, le régime actuel ne peut perdurer. Le gouvernement se prépare donc à s’attaquer aux classes moyennes et aux familles, tout en faisant un clin d’œil de connivence aux plus aisés pour leur signifier de penser à mettre de l’argent de côté en vue de leurs vieux jours.
Il est étonnant que personne n’ait encore proposé de verser une prime aux Français qui persuaderont leurs parents d’avoir recours à l’euthanasie, sous prétexte qu’ils n’ont plus d’utilité sociale. Ce serait un bon moyen, pour les technocrates au pouvoir, de résoudre à la fois le problème de la dépendance et celui des retraites !
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