Retraites : NUPES et RN ensemble mais face à face !

Mathilde Panot Jordan Bardella RN LFI

« Nous vivons côte à côte. J’ai peur que demain nous ne soyons face à face. » Les mots de Gérard Collomb pour évoquer la situation de la France sont curieusement bien choisis pour évoquer celle de l’Assemblée nationale. « Vous avez refusé de serrer la main de Jordan Bardella, pourquoi ? » Le débat était tendu, ce mardi soir, sur BFM TV. Un débat qui rassemblait le porte-parole du gouvernement Olivier Véran, la présidente du groupe de La France insoumise Mathilde Panot et le président du RN Jordan Bardella. Ce dernier n’a pas manqué de rappeler que la députée de l’Essonne avait aussi omis de serrer la main d’Olivier Véran. Comme si, au fond, elle se raccrochait à la communication officielle de la NUPES de renvoyer dans le même camp RN et Renaissance. « L’alliance capital-fasciste », pour reprendre les termes fleuris du blog L’Insoumission affilié au parti de Jean-Luc Mélenchon. De fait, Mme Panot et M. Bardella ne se sont pas épargné les coups et Olivier Véran s’est retrouvé plus d’une fois arbitre lorsqu’il n’était pas punching-ball.

Pourtant, la réforme des retraites aurait pu être un point de rassemblement pour les deux extrêmes de l’Hémicycle, de quoi alimenter les voix du centre critiquant le fait que celles-ci se rejoignent. Las. Portés par l’impopularité d’une réforme que la majorité peine à défendre (« Ils retournent en circonscription avec des pieds de plomb », souffle un fin connaisseur de l’Assemblée), le RN et La France insoumise font le plein de voix et de confiance. Si la gauche se targue d’avoir mis deux millions de personnes dans la rue « dans laquelle le RN était absent », comme le reprochait Panot pendant le débat avec Bardella, les élus du RN, eux, préfèrent mettre en avant leur opposition constructive, jugeant que leur place était à l’Assemblée. « Sans nos électeurs, ils auraient été sensiblement moins nombreux », souffle un député du groupe RN. « Nos électeurs nous ont élus pour que nous portions leurs voix dans l’Assemblée », juge pour sa part le député de Haute-Marne Christophe Bentz. Ce dernier a par ailleurs pris la parole dans l’Hémicycle pour défendre la natalité, indissociable du principe de solidarité générationnelle.

Autre point de différence avec LFI. Du moins sur ce registre. Dans un clip de rap réalisé en l’honneur du député LFI Louis Boyard, « l’artiste » Yanni Benchallal, par ailleurs porte-parole du groupuscule communiste RED, appelle à « saigner les fachos », affirmant que le « taux de natalité des Arabes d’Afrique » est une « arme démographique » ! Deux salles, deux ambiances ! Car, cingle le député Bentz, « la natalité, c’est bien simple : la majorité s’en fiche et la NUPES y est visiblement hostile par dogmatisme progressiste ». Pour sa part, la députée Panot, elle, préfère insister sur l’aspect pénalisant de la retraite pour les femmes, oubliant de préciser que chez les femmes, ce sont uniquement les mères qui sont en effet désavantagées en raison d’une carrière bien souvent hachée.

Deux motions identiques

À l’image des motions de censure déposées invariablement par le RN et la NUPES, les deux groupes ont déposé deux motions référendaires afin de faire de cette réforme un véritable référendum. Deux positions identiques mais deux stratégies distinctes. « LFI ne signera jamais notre motion tandis que nous sommes tout à fait prêts à le faire », souligne un élu du RN qui pointe le dogmatisme des élus de gauche qui préfèrent se contredire en brocardant le groupe de Marine Le Pen plutôt que « d’agir dans l’intérêt des Français et de leurs propres électeurs ».

« Le sectarisme de LFI est quotidien », souligne pour sa part le député Bentz. S’il est d’usage de s’affronter dans l’Hémicycle et en commission, la courtoisie entre collègues est censée dominer hors des lieux de vote. « Hormis une ou deux exceptions, on n’a jamais vu un député NUPES desserrer les dents et nous dire simplement bonjour », souligne l’élu de Haute-Marne qui déplore « un comportement de cour d’école bien éloigné de la courtoisie élémentaire ». Il n’empêche et l’enjeu est de taille. La colère qui gronde dans la rue fragilise la seule réforme sur laquelle Emmanuel Macron a fait campagne. Renaissance, la NUPES et le RN le savent. Se joue sur cette réforme la capacité de la majorité relative à convaincre, et la capacité des oppositions à s’imposer. Et là-dessus encore, les stratégies de la gauche et du RN divergent ou plutôt se croisent. Le RN veut rentrer dans les institutions et la NUPES semble faire tout pour en sortir. Comme si l’Assemblée était trop petite pour ceux qui promettaient, à l’instar de la patronne d’EELV Marine Tondelier, de « faire de l’Assemblée une ZAD ». En ne serrant la main ni de Bardella ni de Véran, on se demande si Mathilde Panot a manqué son coup. Au lieu de rejeter ses deux adversaires hors du champ du fréquentable, elle s’en est exclue elle-même.

Marc Eynaud
Marc Eynaud
Journaliste à BV

Vos commentaires

25 commentaires

  1. Le pouvoir de l’argent et la Nupes ont 2 ennemis : le RN ou plus exactement le souverainisme…..
    Sauf que la Nupes est la fausse opposition soutenue, par le pouvoir de l’argent….

  2. La NUPES dans toute sa splendeur ! Le débat est plus compliqué que l’invective et le « braillage » de rues !

  3. Il faut sans cesse le répéter, la Nupes est l’aide de camps fidèle du grand capital, la soupape tonitruante indispensable à la survie de macron. Ils se plaisent à participer activement au grand chaos indistinctif voulu pour tout bouleverser l’ordre ancien. Ce pays devient à vomir.

  4. Il serait peut-être temps que tous les hommes de bonne volonté se mettent ensemble pour sauver le paquebot France qui est en train de couler.

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