Réveillon de Noël : comment éviter tous les sujets qui fâchent…

Malgré la pandémie et ses innombrables variants (indien, sud-africain ou encore macronien), c’est la fête quand même ; magie de Noël oblige. Mais comme il n’aura échappé à personne que les Français sont aujourd’hui un peu à cran, ce réveillon s’annonce à haut risque. D’où ce viatique censé éviter à nos lecteurs, leurs familles et leurs amis de clore la soirée en se tapant dessus à grands coups de dinde et que la soirée ne dégénère en concours de marrons.

Pis que l’affaire Dreyfus, il y a plus d’un siècle, et qui avait le don de ruiner l’ambiance, il y a désormais celle du Covid. Pro ou anti-vaccin ? Pour ou contre le passe sanitaire, depuis devenu vaccinal ? Attention, terrain miné, surtout quand monsieur est vacciné et que madame ne l’est pas, tandis que tonton assure être provax mais anti-passe – ce qui n’est pas exactement la même chose. D’un côté, le vacciné peut vite passer pour un vulgaire benêt, victime de la propagande sanitaire ; de l’autre, le non-vacciné aura vocation à être considéré comme irresponsable, véritable danger ambulant mettant en péril la santé de ses concitoyens. Et si on parlait plutôt de la varicelle de Kevin, le petit dernier ?

Mauvaise pioche, le sujet Éric Zemmour, hautement inflammable, étant susceptible de conduire illico à celui dudit Kevin : après la bataille d’Hernani, la guerre des prénoms. Les parents d’Enzo ou de Cindy devront marcher sur des œufs, tandis que ceux de Karim ou de Leila n’auront qu’à bien se tenir. Le syndrome Zemmour est d’autant plus complexe que le débat peut finir en omelette en au moins deux configurations de plan de table.

Premier cas, vous avez invité vos cousins de gauche. Pour eux, première balle de service et premier point Godwin de la partie : Éric Zemmour est nazi, ou un truc approchant. Rétorquer que, vu ses origines ethniques et sa confession religieuse, sa carrière politique n’était pas promise à un brillant avenir sous le Troisième Reich devrait faire monter la température d’un cran. Il ne faudra donc pas s’étonner, ensuite, que vos invités se mettent à jouer au frisbee avec leurs assiettes.

Second cas, vous avez invité vos beaux-parents lepénistes. Là, c’est un autre couscous qui vous attend. Zemmour, candidat mandaté par le système à cause duquel Marine Le Pen sera privée d’un second tour ? La thèse a ses adeptes au Rassemblement national. Bref, il est urgent d’évoquer un autre sujet. OM contre PSG ? Beatles contre Rolling Stones ? Hidalgo contre Taubira ? Pas sûr.

Après, si toutefois vous avez choisi une soirée à thème, genre kamikaze, par exemple, il est toujours possible de se rabattre sur ces vieux classiques que sont la peine de mort, l’avortement, la corrida et la cause animalière. Mais, en la circonstance, le doigté s’impose et tout dépend des options philosophiques et politiques de vos convives. À gauche, on est généralement contre la peine de mort et pour l’avortement. À droite, ce serait plutôt le contraire. Attention, donc, à ne pas vous mélanger les pinceaux. Surtout si vous évoquez un torero favorable au châtiment suprême et rétif à l’IVG devant la vieille tante, fan de Brigitte Bardot, qui regarde en boucle les vidéos de l’association L214 consacrées aux abattoirs industriels. Seulement voilà, la tante en question vote peut-être Éric Zemmour, tout en estimant que l’humanité se porterait autrement mieux si tous les êtres humains se prénommaient Médor et Youki.

Le terrain est d’autant plus glissant que cette fichue tante a probablement eu la bonne idée d’inviter ses neveux vegans et antispécistes, propres à causer un abominable ramdam – ce qui nous ramène au ramadan, à l’islam et à Zemmour –, devant le génocide du soir : ces huîtres avalées crues et lentement digérées dans les estomacs des commensaux présents ; ce, dans d’atroces souffrances, est-il utile de le préciser ?

Bon, le plus simple consiste encore à réveillonner avec madame en jouant au Scrabble™. Mais en évitant les mots qui fâchent, toutefois.