Robert Ménard : « J’ai besoin à Paris de quelqu’un qui n’ouvre pas le robinet de l’immigration… »
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Interview choc de Robert Ménard, maire de Béziers, à l'occasion de la sortie de son livre Thérapie de choc, sur l'état de la droite, l'immigration, Marine Le Pen, son expérience d'élu (à 70 % !) et les clefs de la réussite pour l'alternance.
https://www.youtube.com/watch?v=VuweAxQSHME
Vous avez publié Thérapie de choc aux Éditions de La Nouvelle Librairie. Pourquoi avoir sorti ce livre maintenant ?
Cela ne peut plus durer. On ne peut pas à la fois dire que l’on voit notre France s’effilocher, se foutre en l’air et en même temps dire tranquillement que l’on va faire des colloques, se réunir ou gagner la bataille culturelle. Aujourd’hui, il y a une urgence absolue. Le titre, le contenu, le format et les formules sont là pour dire que maintenant, il y a une urgence vitale, voilà ce qu’il faut faire et dire à tout le monde d’arrêter de nous emmerder avec vos bisbilles, en particulier à droite.
Il faut se trouver un champion et gagner ces élections, sinon, ce pays que l’on aime va disparaître de la carte du monde. Je ne le veux pas !
Dans ce livre, est-ce votre propre camp que vous attaquez le plus violemment ?
Non ! J’en ai marre de certains réflexes insupportables. D’un côté, vous avez une droite congelée dans ses certitudes qui nous expliquerait que c’était mieux il y 10.000 ans et encore mieux il y a 100.000 ans. Aujourd’hui, il faut arrêter de dire de telles bêtises. De l’autre côté, vous avez la droite classique de gouvernement qui est à mourir de tristesse et qui continue à vivre sous la peur des médias et de la gauche qui la montre du doigt en disant « Vous n’allez tout de même pas vous allier avec ces fachos ». Voilà où nous en sommes et je n’en peux plus !
Parfois, je me dis qu’il y a deux solutions. La première serait de vivre chez moi tranquillement à Béziers et m’occuper de ma ville. La deuxième solution est ce livre qui me permet de dire que je ne peux pas me résigner à cela. Je voudrais les prendre à la gorge, leur dire d’arrêter de me faire chier, de regarder la situation et de se ressaisir.
On est passé du Robert Ménard qui lançait des Rendez-vous de Béziers au Robert Ménard qui dit en avoir ras le bol. « On a suffisamment parlé, il faut maintenant agir et reprendre d’assaut ce pays. »
Chacun explique, lance des revues intellectuelles, on monte qu’on a gagné la bataille des idées. Je ne vais pas me battre là-dessus. Je suis maire d’une ville et, à la différence de bon nombre de mes amis, je suis dans un exécutif, donc je décide. Au moment où je vous parle, je suis dans mon bureau à côté de celui de la présidente de l’agglomération où je viens de prendre 25 décisions. Je n’ai pas besoin de grands débats, mais j’ai besoin de prendre des décisions. Pour prendre des décisions pour le bien de mes concitoyens, j’ai besoin qu’à Paris, des gens ne m’emmerdent pas tous les jours. J’ai besoin, à Paris, de gens qui ne détruisent pas ce que j’essaie de construire tous les jours. J’ai besoin, à Paris, de gens qui n’ouvrent pas le robinet de l’immigration dans lequel je me noie. C’est cela, dont j’ai besoin ! Une fois que j’ai dit cela, je n’ai pas beaucoup avancé et j’en suis conscient. Pour tout cela, il faut quelqu’un qui incarne ces idées et qui se batte sur ces idées.
Tous les gens qui m’expliquent à longueur de colloque que l’on a gagné la bataille des idées alors qu’on n’est pas foutus de gagner des élections, il y a juste un petit problème. Je préférerais perdre la bataille des idées et gagner les élections de temps en temps. Or, aujourd’hui, je constate que je suis esseulé dans ma ville et j’ai peur pour ce que j’essaie de faire et pour mes concitoyens. J’en ai assez !
Marine Le Pen peut-elle gagner en 2022 ?
Je rêve que Marine Le Pen gagne en 2022. Je rêve que tout se passe bien. Je rêve que nos amis gagnent toutes les régions. Je vous donne rendez-vous au mois de juin et on verra combien nous aurons gagné de régions. On pourrait se mordre les doigts. Je ne suis pas défaitiste, mais je dis juste qu’aujourd’hui, Marine Le Pen a d’énormes qualités et qu’elle s’améliore de semaine en semaine. Elle est apaisée, plus tranquille et, d’une certaine façon, plus sûre d’elle-même et donc moins agressive à l’égard des autres. Je reconnais humblement que je ne pensais pas qu’elle se relèverait du débat de l’entre-deux-tours, mais j’avais dit une connerie. La preuve : aujourd’hui, elle joue les premiers rôles. Comme tout un tas de gens, je vois des sondages encourageants. Cela suffit-il pour gagner les élections ? Je crains que non.
Je suis prêt à faire un chemin de croix à genoux en demandant pardon d’avoir osé dire cela si je me trompe et je serais ravi de battre ma coulpe en disant « Tu n’as dit que des conneries, la preuve, elle est chef de l’État ». Je ne rêve que de cela ! Je suis sceptique par rapport à cela et, en même temps, elle est incontournable.
Aujourd’hui, aucune candidature à côté d’elle n’a le début de la dizaine de sa crédibilité, même si ce sont des gens plus proches de moi, plus identitaires, plus libéraux en termes économiques et moins centralisateurs. Vous pouvez vous moquer, me montrer du doigt en disant que je radote et que cela fait des années que je vous raconte cela, que je ne suis jamais capable de mettre un visage sur cette espèce de portrait-robot que je dresse du candidat idéal, mais il y a quand même une dame blonde de cinquante ans qui est la seule, aujourd’hui, à incarner une rupture sérieuse avec M. Macron. Je peux aussi me dire que c’est une impasse, mais j’espère à chaque fois et naïvement que peut-être des livres servent à quelque chose. Vous pouvez dire que cela ne sert à rien et que je ferais mieux de me taire.
Votre camp politique, cette droite hors les murs a-t-elle des effectifs nécessaires pour avoir une majorité à l’Assemblée nationale et pour occuper tous les postes clés de l’État ? Selon vous, êtes-vous suffisamment entouré de gens compétents pour reprendre en main le pays ?
Moi, non ! Il faut être sérieux, je connais la capacité de tout un tas de gens. On a besoin d’un visage pour incarner cette droite de rupture. En même temps, nous avons aussi besoin d’un programme.
Sur certaines questions économiques, je ne suis pas persuadé de ce que j’entends. Ce sont souvent des slogans, des déclarations, des phrases ou des bons mots. Je ne dirige pas une ville et une agglomération avec des phrases, des bons mots et des slogans, mais avec des choix.
A-t-on les réponses à tout un tas de questions ? Non ! Même la question de l’immigration est compliquée. J’entends des choses irréalistes. Je me dis que mes amis sont tombés sur la tête.
En même temps, je me dis qu’à force de le dire, je vais convaincre certaines personnes de changer.
J’ai eu beaucoup de discussion avec Marine Le Pen sur l’Europe. Peut-être que sur l’intervention de l’État, sur le statut des fonctionnaires et sur le centralisme parisien, il est possible qu’on puisse lui faire entendre raison. Cela l’aidera peut-être à gagner, je l’espère. Je n’ai pas vos réponses. Je ne suis pas sûr qu’aujourd’hui, on ait la capacité, du jour au lendemain, de trouver toutes les équipes pour remplacer tous ceux qui dirigent ce pays.
Je vais mettre un bémol. Lorsque je suis devenu maire de Béziers, on m’a dit exactement la même chose. Ma réponse a été la suivante : « Putain, avec le désastre que vous avez laissé, vous venez me donner des leçons en incompétence. Avec ce que vous avez fait de cette ville, je pourrais le dire de ce pays. Avec ce que vous avez fait de mon pays, vous venez m’expliquer que moi et mes amis sommes incapables de faire mieux que vous. Vous auriez un bilan incroyable et tout irait bien, la France se porterait bien, on aurait passé les derniers mois comme les champions du monde. Aujourd’hui, on aurait la moitié de la population vaccinée, le taux de chômage serait arrivé à ce qu’il était dans d’autres pays européens comparables, on aurait été capable de maîtriser l’immigration, d’assurer la sécurité de nos concitoyens, de faire en sorte que tous les gens, quelle que soit leur religion, adorent ce pays et seraient devenus de bons Français. Alors là, je dirais, chapeau, je suis sûr de ne pas être mieux que vous ! Mais lorsque je vois ce que vous faites, je me dis de temps en temps que l’on pourrait faire pas plus mal que vous. »
Dans cette France de 2021 abrutie par le Covid-19, abrutie par les politiques sanitaires contradictoires et par les injonctions paternalistes du gouvernement, espérez-vous encore voir une majorité de la population vous suivre et suivre les idées déclinées dans votre livre ?
Effectivement, je l'espère. Ici, 70 % de la population a voté pour moi, cela veut dire que lorsqu’on sait exprimer nos idées, prendre les gens aux tripes, être à l’écoute et quand on aime les gens, les gens le sentent. Ils ont besoin qu’on les aime et qu’on fasse attention à eux. Ils n’aiment pas que l’on fasse de la démocratie participative. Ils veulent juste qu’on sache les écouter et qu’on tienne nos promesses. Nous avons pas eu l’occasion, en dehors de quelques villes et quelques agglomérations, de montrer que l’on était capable de diriger une région. C’est pour cette raison que les élections à venir sont importantes. Je suis un peu pessimiste, mais là encore, je rêve de me tromper. Je pense que l’on peut y arriver, mais cela ne sera pas facile.
Pourquoi n’y allez-vous pas en 2022 ?
Je suis moins timbré qu’un certain nombre de mes petits amis. Je sais mes qualités, mais je sais aussi mes limites. Je n’ai pas les épaules d’être chef de l’État. Je ne suis pas fou furieux. Je ne participe pas à cette guerre d’ego et à cette folie où chacun se dit « Pourquoi pas moi ? » Honnêtement, cela ne m’effleure l’esprit pas un seul matin. Je peux dire tout ce que je pense sans aucun problème parce que je ne suis dans aucun parti, parce que je ne suis dans un aucun clan et parce que je ne me prends pas pour ce que je ne suis pas. Lorsque je dis tout cela, ce n’est pas une façon de plaider pour moi-même, mais c’est une façon de plaider pour mon pays. J’aime ce pays et j’ai envie d’aider à trouver celui ou celle qui va nous remettre dans le bon chemin.
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