Rousseau contre Angot… La faute au caniveau !
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Notre monde est empreint d’une infinie délicatesse, dans lequel la course à la souffrance cathodique se taille la part du lion… ou de la buse. Samedi dernier, deux beaux spécimens s’affrontaient donc sur les plateaux télévisés. L’ancienne élue Sandrine Rousseau (EELV) et l’actuelle écriveuse Christine Angot (Flammarion).
Au menu, le viol. Pour la première, "c’est tellement violent, tellement incroyable que ce soit à ce point tabou dans la société. C’est quelque chose que j’ai découvert à mon corps défendant" ; ce qui est un peu le principe du viol, soit dit en passant. Pour la seconde, "il faut se mettre ça dans la tête, il n’y a personne qui peut entendre". Pourquoi en parler, donc ? Au moins peut-on déléguer à Thierry Ardisson, tel que fait sur France 2, en 1999 : "Le père de Christine Angot la forçait à manger des clémentines sur son sexe. Il la sodomisait. Seulement après, il allait à la pharmacie acheter de la vaseline."
À l’époque, ça fait beaucoup rire les invités, M’Bala M’Bala et Célarié ; Dieudonné et… Clémentine, entre autres chanceux conviés à cette fête de l’esprit. Près de vingt ans après, l’ambiance est déjà moins primeausautière. Compétitivité oblige, il y a plus d’appelées que d’élues, « viol » et « viol » et, même si toutes les « souffrances » se valent, « ma souffrance » est désormais plus indicible à commenter, plus voluptueuse à contempler que « ta souffrance », lecteurs et téléspectateurs dussent-ils souffrir au passage, faute de cellule de soutien psychologique adéquate.
Ainsi, le viol de Sandrine Rousseau est-il de l’EasyJet, comparé à celui de Christine Angot, estampillé Air France et classe affaires. Question de standing : SVP, c’est une VIP. De fait, la « souffrance » de Sandrine Rousseau est peut-être à relativiser, son tourmenteur n’ayant fait que "la plaquer au mur en lui tenant les seins". Alors que Christine Angot, c’est une telle « souffrance » qu’une carrière fondée sur l’éternel même livre, que la même « vaseline », la même « clémentine », le même « père », le même « rappeur » (Doc Gynéco) – ça ne saurait s’inventer – n’ont pas encore suffi à exorciser des démons qui l’habitent encore.
Petite parenthèse : le tourmenteur de Sandrine Rousseau n’est autre que Denis Beaupin, le DSK écologiste. Dragueur lourd mais pas violeur, nonobstant ; la justice est formelle sur des faits depuis longtemps prescrits par la Justice. N’en reste plus qu’une mauvaise blague, tôt répandue dans les rangs écologistes : « Beaupin au féminin, ça donne quoi ? » Ami lecteur, quelques minutes pour réfléchir…
Dans cette joute mémorielle, ce podium à une place, il y a évidemment une victime sacrificielle en trop. S’il faut, pour Sandrine Rousseau, "former pour accueillir la parole", Christine Angot, après avoir affirmé que "pour briser le silence, il faut rien dire, il faut parler", conseille aujourd’hui de "se débrouiller". Comprenne qui pourra. Christine quitte donc le plateau, laissant Sandrine en larmes, dans cette drôle partie de Cochon qui rit.
D’où consternation médiatique et désolation tout court, assez bien exprimée par notre confrère Claude Askolovitch avec ses mots à lui, sur le site Slate : "Ces larmes sont avant tout celles du désespoir de voir à quel point la parole est douloureuse et difficile et à quel point on a laissé sur le ring s’affronter deux femmes."
C’était effectivement à pleurer. Un peu de rire, toutefois.
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