Sagesse de Villepin, hubris de Renaissance : l’Ukraine continue de polariser le débat

Capture d’écran
Capture d’écran

On va enfin débattre, au Parlement, de notre soutien à l’Ukraine, décidé unilatéralement, il y a deux ans, par un Emmanuel Macron décidément pas très soucieux de démocratie représentative. Il est vrai que la loi ne contraint pas le Président à demander l’avis du pouvoir législatif tant que nous ne sommes pas en guerre. Cependant, avec les milliards que cela nous a coûté, tandis que nos députés s’écharpaient sur une loi de programmation militaire qui se voulait grandiose, ce n’était peut-être pas du luxe d’en parler le plus tôt possible.

Vision macronienne du débat public

Mieux vaut tard que jamais, et il va donc y avoir un débat, mardi, et un vote à l’Assemblée nationale au sujet du soutien accordé par la France au régime de Volodymyr Zelensky. « Est-ce un piège pour le Rassemblement national et La France insoumise ? » demandait-on, sur TF1, à Sylvain Maillard, président du groupe Renaissance dans l’Hémicycle. Le député répond sans répondre : « C’est une clarification. » En d’autres termes, dans une vision toute macronienne du débat public, soit on est dans le camp de la raison, du bien et tutti quanti, et on estime que le soutien à l’Ukraine n’a pas de limite, soit on émet des réserves et on est un sale traître. « Ça veut dire, déclare le député Maillard sans beaucoup de précautions oratoires, qu’on abandonne l’Ukraine et qu’on ne croit pas en l’Europe, et qu’au fond, on se soumet à Vladimir Poutine. » Ah oui, quand même...

Renaissance (c’est une constante, chez ce parti de stagiaires) espère, une nouvelle fois, faire oublier son amateurisme catastrophique avec une nouvelle louche d’hubris. Les cabinets ministériels pensent peut-être qu’en donnant de grands coups de barre (et de menton) dans tous les sens, on peut faire oublier que le navire n’a pas vraiment de cap. « Nous soutiendrons les Ukrainiens aussi fort qu’il faudra, aussi longtemps qu’il faudra. » OK. Ça évitera de parler des banlieues, de la dette publique, de l’islamisation rampante, des agriculteurs et de tous ces sujets désespérément franchouillards, comparés au grand vent de l’Histoire.

En comparaison de cet idéalisme échevelé et un petit peu hors-sol – mais qui n’a rien de surprenant -, on écoutera avec plaisir l’interview de Dominique de Villepin, le 7 mars, par David Pujadas, sur LCI. Le vieux diplomate à la crinière léonine et aux fulgurances rimbaldiennes n’a pas beaucoup changé, depuis le jour de 2003 où, pour la dernière fois, la France, au lieu d’acquiescer en regardant ses chaussures, s’éleva contre les mensonges des États-Unis. On assiste, avec une nostalgie que l’on n’aurait pas cru ressentir, au retour des grandes heures de la Chiraquie. Villepin ressemble toujours à sa caricature dans la BD (et le film) Quai d’Orsay. Mais peu importe. Il pointe, avec une acuité intellectuelle remarquable, et terriblement rare en ces heures de disette, les cinq dangers de la posture ridiculement martiale d’Emmanuel Macron : élargissement du conflit (avec des alliés de la Russie comme contrepoids aux alliés de l’Ukraine) ; ouverture de nouveaux fronts dans le monde (comme c’est déjà le cas à Gaza et au Yémen) ; terrorisme d’opportunité (profitant de notre engagement au plus loin) ; risque isolationniste venu des États-Unis comme de la Chine ; et, surtout, risque de guerre nucléaire.

Terrible contraste entre un retraité de la politique toujours vif et des politiciens aux manettes, pourtant englués dans un discours performatif totalement déconnecté.

L’Ukraine polarise toujours les débats, mais le conflit permet aussi de polariser les politiciens. Il y a les professionnels et les amateurs. On peut ne pas être d’accord avec Villepin, mais on ne peut pas s’empêcher de constater qu’une comparaison entre lui et Séjourné, ou entre lui et Attal (puisqu’il a été successivement ministre des Affaires étrangères et Premier ministre), remet les macronistes à leur juste place.

Arnaud Florac
Arnaud Florac
Chroniqueur à BV

Vos commentaires

24 commentaires

  1. Y-a-t-il des Renaissants qui auraient lu l’histoire de la Russie ? J’en serais surpris. Pas besoin de voter RN pour comprendre que la France et ses complices a poussé Poutine jusqu’à la limite de l’acceptable. La Russie doit avoir un libre accès à la Mer Noire notamment par Odessa (de gré ou de force). Zelensky, dans son immense ignorance qui n’a d’égale que celle de Macron et de Trudeau, n’a pas voulu reconnaitre l’évidence. Je ne parle pas de Biden qui ne sait même pas où il habite et qui ne sait sans doute pas non plus, en bon Yankee, où se situent les pays européens. Cette guerre n’est pas la mienne. Au fait pourquoi le RN a-t-il emprunté à une banque russo-tchèque? Pourquoi « Rothschild bank » n’a pas prêté au RN? Monsieur je sais tout doit le savoir lui qui y travailla ou fait semblant.

    • Très bien dit. L’histoire de la Russie est très complexe et très riche. L’Ukraine faisait partie de la future Russie et Kiev en était la capitale. Je vais recherché le titre d’un livre très intéressant qui raconte son histoire depuis sa création, on fait une découverte à chaque page. À demain pour le renseignement.

Commentaires fermés.

Pour ne rien rater

Les plus lus du jour

Un vert manteau de mosquées

Lire la vidéo

Les plus lus de la semaine

Les plus lus du mois