Saint-Martin, Saint-Barth : qu’est-elle vraiment, cette France du bout du monde ?
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Dans nos cultures très "christiques", on ne critique jamais les morts, ni les miséreux, ni les clandestins, ni… La misère et le malheur sont rédempteurs, et je sais qu’en écrivant simplement ces deux lignes, je vais déclencher l’indignation chez beaucoup.
Laminés par le monstre qui s’est abattu sur eux, les habitants de nos îles caribéennes sont dans le désarroi le plus total. Saint-Martin, surtout, parce que la nature est une garce qui frappe plus aisément, allez savoir pourquoi, les points où se concentre la misère. Et la misère ajoutant au malheur, les dégâts sont toujours pires chez les pauvres. Pour résister aux cyclones, mieux vaut habiter 500 m2 en dur – comme la famille Hallyday à Saint-Barth – qu’une « case bois sous tôle » à Saint-Martin.
Cela peut-il excuser les scènes de pillage à grande échelle ? Justifier les magasins éventrés pour y arracher ces archétypes de la consommation que sont smartphones, machines à café et écrans plasma ?
Dans ce chaos politico-météorologique aux allures d’apocalypse, on perçoit des bribes d’information qui laissent perplexe. Par exemple que l’île compte 37.000 habitants, "peut-être beaucoup plus", contre 35.104 comptabilisés en 2014. Là-dessus, "± 600" délinquants et criminels répertoriés, et "peut-être beaucoup plus" qui ne le sont pas. Vendredi, un général de gendarmerie expliquait sur France Info que "compte tenu de la situation, ces pillages dépassent largement la délinquance connue de l'île, mais concernent aussi des populations aux abois, en panique et qui n'ont plus rien, tant la misère au quotidien est grande ici". Une délinquance d’occasion, donc.
Plus précise, Mme Champrenault, procureur général de Paris et ex-procureur général de Basse-Terre, explique au Figaro que Saint-Martin "est une île difficile marquée par une forte immigration clandestine, une délinquance du quotidien extrêmement violente et une très forte criminalité organisée". C’est même souvent le refuge des miséreux et des criminels de cette partie du monde, un territoire de 90 km2 qui "fait cohabiter 100 nationalités venant de toute l'Amérique du Sud et d'îles des Caraïbes encore plus pauvres, comme Haïti, Saint-Domingue ou Cuba". Plus de 30 % de la population y est d'origine étrangère.
Près de 50 % de la population vivrait là en dessous du seuil de pauvreté et la criminalité est explosive. 3.400 crimes et délits enregistrés en 2015, explique un magistrat qui détaille : "“La délinquance de survie”, corollaire de la misère. À Saint-Martin, les vols à main armée – principalement de commerces – dépassent de loin la centaine. Les statistiques font état d'une dizaine de meurtres et de plus d'une vingtaine de tentatives par an. À cela s'ajoutent les gangs à la mode américaine, particulièrement violents comme les Forty-Two Seconds ou les No Limit Soldiers venant du Venezuela via Curaçao. Ces gangs sont à l'origine de réseaux de prostitution et du trafic de drogue de cannabis (Jamaïque) et de cocaïne (Colombie)."
Faut-il rappeler que ces trafics alimentent non seulement le continent européen et l’Afrique, mais aussi abondamment les soirées très chics – ou très décadentes, selon le regard qu’on y porte – des VIP fortunés et autres "grands de ce monde" qui vivent sur les hauteurs de l’île ?
Longtemps en poste à Saint-Martin, le magistrat explique que cette île "dispose d'infrastructures propices au trafic de drogue à grande échelle, tenu par les grands réseaux vénézuéliens ainsi que les mafias new-yorkaise et sicilienne actives dans ce domaine et dans celui des jeux". Enfin, dit-il, Saint-Martin coule sous l’afflux de l'immigration illégale, "ce qui explique sa paupérisation et sa délinquance".
Comme Mayotte, comme la Guyane, comme tous nos paradis pour touristes, ces territoires du bout du monde sont aussi notre enfer. S’y concentrent tous les maux qui fracturent nos sociétés sans espoir de remède.
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