[SANTE ET POLITIQUE] Certains médicaments déremboursés, sur quels critères ?

thermometre medicaments

Il y a quelques jours, un article paru dans Le Figaro nous annonçait que des médicaments dits inefficaces ne seraient plus remboursés par la Sécurité sociale alors que, jusqu'à présent, ils étaient remboursés à 15 ou 30 % par l'assurance maladie.

Cette annonce relance le débat sur l'utilité des médicaments. Quels sont les grands médicaments, sous-entendu utiles ? Quels sont les petits médicaments, sous-entendu inutiles ? Quels sont les médicaments dont la Sécurité sociale doit prendre en charge le remboursement ? Qu'est-ce qu’un médicament utile ? Qu'est-ce qu'un médicament efficace ?

Efficacité = utilité ? Pas aussi simple !

Nous avons tendance à un peu tout mélanger et penser qu’efficacité est synonyme d'utilité, et à croire que les médicaments qui sont remboursés sont efficaces et utiles et pas les autres. Un médicament qui n’a pas fait la preuve de son efficacité est, pour la plupart des malades, un médicament inefficace. Ce n'est pourtant pas aussi simple.

Est-ce que le fait de ne pas avoir passé de test de QI pour faire la preuve de votre intelligence vous classe irrémédiablement parmi les imbéciles ? Bien sûr que non. De même, un médicament qui n’a pas fait la preuve de son efficacité n’est pas forcément inutile. Pour affirmer leur efficacité, les médicaments sont soumis à de nombreux tests et études cliniques qui coûtent très cher, et certains laboratoires préfèrent ne pas effectuer ces tests et être déremboursés (sachant que le marché pour leur médicament existe), ce qui leur permet d'avoir un prix de vente libre.

Certains « petits » médicaments rendent de grands services

Alors, qu'est-ce qu'un médicament efficace ? Pour faire simple, on peut dire qu'un médicament efficace est un médicament dont l'action est très nettement positive par rapport à celle d'un placebo. On peut, dès lors, estimer qu'il est utile. Pourtant, il peut être très efficace et totalement inutile, comme lors de l'utilisation de chimiothérapie chez un cancéreux au stade terminal. À l'inverse, il est des petits médicaments que l'on peut être tenté de classer parmi les médicaments inutiles mais qui rendent de grands services, comme les veinotoniques à forte dose dans les crises hémorroïdaires.

Dérembourser des médicaments : sur quels critères ?

Pour définir le remboursement des médicaments, la Sécurité sociale fait le choix de s'en tenir à des critères d'efficacité définis par des normes sans tenir compte du service rendu aux malades. Mais a-t-on appliqué ces mêmes règles pour le remboursement des vaccins contre le Covid-19, alors qu'ils n'avaient pas fait la preuve de leur efficacité (pour la bonne raison qu'ils étaient encore au stade expérimental) et qu'on ignorait totalement les effets secondaires pour pouvoir juger d'un rapport bénéfice/risque en faveur du produit ? La situation était, certes, différente et les décisions se prenaient dans la panique. Mais maintenant que nous avons un peu de recul, on peut s'apercevoir de l'inconséquence de certains propos tenus à l'époque.

Pour revenir à ce projet de déremboursements de certains médicaments, d'autres questions se posent. Même si un médicament est efficace et le plus souvent utile, donc remboursé par la Sécurité sociale, comment expliquer que cette dernière accepte de rembourser à des prix très différents le même produit présenté sous des formes différentes ? Pourquoi la Sécurité sociale accepte-t-elle de rembourser autant de prix différents pour une même substance, alors qu'elle pourrait ne baser son remboursement que sur la galénique et la quantité de produit actif ? Et, question subsidiaire : pourquoi accepte-t-elle de rembourser une boîte entière alors que seulement quelques comprimés seront nécessaires au traitement ?

Ainsi, un problème qui semble aussi simple que celui du remboursement ou du non-remboursement des médicaments en fonction de leur efficacité ou de leur non-efficacité est beaucoup plus complexe qu'il n'y paraît. Et malheureusement, une fois de plus, ces mesures, si elles sont appliquées, ne porteront tort qu'à ceux qui n'ont que des moyens limités pour payer leurs frais de santé.

Dr. Jacques Michel Lacroix
Dr. Jacques Michel Lacroix
Médecin - Médecin urgentiste et généraliste

Vos commentaires

25 commentaires

  1. D’habitude, je suis plutôt d’accord avec les articles sur Boulevard Voltaire, mais là, docteur, je me permets de vous dire que vous êtes intellectuellement malhonnête.
    Vous écrivez : « Est-ce que le fait de ne pas avoir passé de test de QI pour faire la preuve de votre intelligence vous classe irrémédiablement parmi les imbéciles ? Bien sûr que non. De même, un médicament qui n’a pas fait la preuve de son efficacité n’est pas forcément inutile. » Ceci constitue proprement une malhonnêteté intellectuelle. Le fait que l’on soit d’accord sur la première proposition, n’inclut rien sur la seconde. Le « de même » est de trop.
    Le budget de la sécurité sociale explose. Monsieur Rocard a créé un nouvel impôt, la CGU, pour financer la sécurité sociale. Prescrivez vos poudres de perlimpinpin, mais ne me demandez pas à moi, contribuable, de les financer. Nia proun ! J’irais même plus loin. Le contribuable ne devrait pas financer les consultations homéopathiques, les cures thermales, les psychanalyses…
    Tout produit n’ayant pas fait ses preuves, en suivant un protocole scientifique bien défini, ne devait pas avoir le droit de se dire « médicament » et d’être remboursé par la sécurité sociale.

    • Les cures thermales et les psychanalyses engraissent surtout les petits malins prescripteurs et leur entourage complice .

  2. un médicament qui n’a pas fait la preuve de son efficacité n’est pas forcément inutile.
     Vrai

    Pourtant, il peut être très efficace et totalement inutile, comme lors de l’utilisation de chimiothérapie chez un cancéreux au stade terminal.
     Faux = il peut suivant les cas être un très bon antidouleur pour le patient en fin de vie.
    (Certes cela dépend et du cancer et du patient)

    « Comment expliquer que cette dernière accepte de rembourser à des prix très différents le même produit présenté sous des formes différentes ? Pourquoi la Sécurité sociale accepte-t-elle de rembourser autant de prix différents pour une même substance »
    Simple !
    C’est elle qui fait le prix du médicament et non le labo, contrairement à ce que l’on fait croire, ce, certes en fonction de son utilité mais aussi du prix de revient du dit médicament (certifié par un comptable).
    Donc, une nouveauté a un prix de revient plus important = le labo a fait des investissements pendant plusieurs années -10 environ autrefois- sans compter les salaires pendant ces années.

    Tandis qu’un génériqueur n’a pas à faire d’investissements. Il copie, point barre (parfois s’il change d’excipients il a 3 mois d’investissements pour « recherches »). Donc prix très faible (mais valable, car il coûte moins cher au fabricant)

    Ensuite, lorsque les investissements sont amortis, la sécu baisse le prix du médicament (donc parfois, le labo arrête la fabrication qui n’est plus rentable)

    Voilà. Il est vrai que depuis que je suis en retraite, cela a peut être changé mais ce n’est pas certain, sauf si Brussel impose 2 ou 3 trucs selon son humeur (et les pots de vins derrière ?)

  3. Pour une GEPA, je dois me faire mensuellement 3 injections de Nucala, soit 3×100=300 mg. Coût (hors honoraires de dispensation) : 917,64×3=2.761,64€. Et 917,64€ pour 100mg, ça fait 9.176,40€ le gramme, ou plus de 9 millions d’euros le kilo… soit plus de 100 fois le prix d’un lingot d’or !
    Je ne conteste pas l’efficacité de ce produit – qui ne me coûte rien, vu que je suis en ALD. Mais enfin, j’aimerais bien connaître le prix de revient de ce médicament !

  4. Après quelques dizaines d’années de médecine générale, on finit par bien connaître des médicaments « qui marchent ». Mais les technocrates savent tout. De toute façon, il leur suffit de dire « yaka faucon ».

    • Après 60 années de fréquentation de la mafia toubibs/pharmaciens, et l’exploration approfondie par désoeuvrement de l’encyclopédie des plantes, moi, simple quidam au QI non testé, à chaque désormais alerte cardiaque ou autre désagrément dans le truc qui me sert d’enveloppe charnelle, je ressors ma petite tambouille argile/charbon/Acide acétilsalycilique (écorce de saule)/ Muscade badiane carvi thym romarin, et je me règle mon problème toute seule. ça fonctionne aussi sur les animaux, même les minuscules oiseaux, en faisant un calcul mental de dosage-poids. Comment nos ancêtres faisaient-ils donc ?

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