Sarkozy condamné : les Français ont depuis longtemps tourné la page

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Le coup est terrible pour Nicolas Sarkozy comme pour la droite LR restée proche de l’ancien président de la République. Au-delà, l’onde de choc atteint l’ensemble de la classe politique, avec la même puissance que jadis l’affaire Urba ou celle du sang contaminé. Le prédécesseur de François Hollande à l’Élysée a annoncé sa décision de faire appel de la décision du tribunal de Paris qui le condamne à un an de prison ferme pour le financement illégal de sa campagne électorale de 2012. En même temps que Nicolas Sarkozy, treize coprévenus, dont le patron de l’agence Bygmalion, écopent de deux ans à trois ans et demi de prison, selon les cas. Les juges reprochent au candidat-Président Sarkozy, engagé dans une folle course-poursuite dans les sondages avec François Hollande, d’avoir fermé les yeux sur le dépassement de ses comptes de campagne. Les amis de Sarkozy, qui aiment consulter le vieux sage en son bureau de la rue de Miromesnil à Paris, dénoncent la sévérité d’un verdict qui va au-delà des réquisitions du parquet. Ses détracteurs souligneront la légèreté avec laquelle le candidat a usé des fonds publics, sans égards pour les Français. Mais les Français, justement, ont tourné la page.

Un homme politique, dit-on, n’est jamais fini avant d’avoir rendu l’âme. François Mitterrand s’est remis de l’Observatoire, Chirac de la trahison de Balladur. Les Français oublient parfois les erreurs et les sorties de route de leurs maires, réélus en dépit de leurs condamnations. Mais ils n’oublient pas les promesses non tenues. Plus que tout, ils tiennent rigueur aux marchands d'illusions d’avoir eux-mêmes brisé les rêves qu'ils avaient fait naître. Il éprouvent l'amertume de la femme trompée, amertume à la hauteur des espoirs initiaux. De Gaulle a fait rêver les Français d’un empire allant de Dunkerque à Tamanrasset, il a organisé le referendum sur l'autodétermination de l'Algérie et organisé l'indépendance. Giscard avait suscité un fol espoir avec sa « nouvelle société » : il s’est noyé dans la crise et ses contradictions. Sarkozy avait soulevé la France d’enthousiasme, emportant largement la présidentielle face à Ségolène Royal sur la promesse du retour de l’ordre et du prestige de la France. Il avait, au passage, siphonné les voix du Front national.

Les Français ont fait les comptes. Ils ont constaté l’incroyable trahison du peuple qui s’était prononcé contre la Constitution européenne par référendum en 2005 avant que Sarkozy ne fasse passer la réforme dans leur dos, en catimini. Ils se sont souvenus des promesses du candidat Sarkozy sur la sécurité et l’immigration. Ils ont constaté que l’homme qui avait aspiré les électeurs du Front national n’a payé les Français que de mots et de gesticulations, cédant sur ces sujets majeurs à l’incroyable chantage d’une gauche déchaînée. Comment ne se sentiraient-ils pas trahis, floués ?

La condamnation de l'ancien Président laisse les Français indifférents : les aventures judiciaires de l’ancien Président ne les concernent en rien. Le verdict ne changera ni l’avenir du pays ni celui de leurs enfants. Eux attendent toujours celui ou celle qui prendra enfin à bras-le-corps les maux qui rongent la France. Et tiendra enfin ses promesses. Ils savent depuis longtemps que ce ne sera pas Nicolas Sarkozy.

Marc Baudriller
Marc Baudriller
Directeur adjoint de la rédaction de BV, éditorialiste

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