Sélection des futurs médecins : le grand n’importe quoi ?

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Bachoter furieusement pendant toute une année en sacrifiant sorties, week-ends, voire réveillons, pour se voir refuser l’entrée en deuxième année de médecine quand on a 15 de moyenne ou qu’on a réussi l’écrit dans les dix premiers d’une cohorte de mille, on imagine difficilement le coup de massue.

C’est pourtant celui que reçoivent, chaque année, des dizaines d’étudiants dans les diverses facultés françaises depuis que la réforme du premier cycle des études de santé a introduit des épreuves orales.

Variables selon les facultés, et surtout sans aucun rapport avec la science médicale, elles visent selon ses organisateurs « à évaluer l’aisance à oral, les capacités d’analyse de synthèse de situation complexes, l’intérêt pour l'état du monde dans lequel on vit et dans lequel on va vivre, d'être capable de prendre des positions, d'argumenter ».

Il est certes louable d’accorder de l’importance à la capacité de s’exprimer, à la richesse du vocabulaire ou à l’esprit critique de ceux qui seront appelés à nous soigner, même si (exemples réels) c’est sur la Grande Barrière de corail australienne ou sur une « gravure de 1866 où l’on devine un squelette et des Londoniens autour d’une pompe à eau », comme le rapporte Le Figaro !

Mais pourquoi pas, si, comme dit le président de la conférence des doyens de médecine, on cherche à évaluer des « compétences transversales plutôt que des connaissances techniques en santé », non sans ajouter que « éviter des sujets médicaux permet aussi de ne pas favoriser des élèves qui baignent déjà dans ce milieu » et que, selon une enseignante-chercheuse, « on essaye d’éviter les sujets polémiques liés à la politique ou à la religion »

Nous voilà rassurés. Mais pas longtemps, parce que le ratio attribué à ces oraux dans la note finale est très variable, chaque faculté ayant le droit d'avoir sa propre règle.

« L'oral représente en moyenne environ 30 % de la note globale, sur l'ensemble des facultés, affirme le doyen. L'an dernier, il y a eu des extrêmes mais il est plutôt recommandé de ne pas dépasser 50 % [ce qui est déjà énorme, NDLA]. Ces extrêmes, comme à l'université de Paris où l'oral avait représenté environ 70 % de la note, avaient conduit des étudiants bien classés à l'écrit à déposer des recours après avoir chuté de centaines de places. » On les comprend, et la plupart ont d’ailleurs gagné, parce qu’on entre là clairement dans la « note de gueule » et le grand n’importe quoi !

N’est-il pas est permis de penser que plutôt que ce genre d’épreuves orales, une heure devant un collège de psychologues serait plus fécond pour apprécier l’aptitude à la profession ?

Richard Hanlet
Richard Hanlet
Médecin en retraite, expert honoraire près la Cour d'appel de Versailles

Vos commentaires

27 commentaires

  1. N’importe quoi. On s’étonne après de ne pas avoir de médecins en exercice mais des medecins politiques, cadres d’entreprises ou de labo.. En plus, dans un autre job que l’exercice auprès des malades, ils sont bien payés, ont une bonne retraite et des horaires acceptables, et surtout pas de responsabilité médicale de chacun de leurs gestes médicaux pendant 25 ans, avec des procès qui se multiplient depuis la loi Kouchner. LA solution pour eux? partir étudier à l’étranger quitte à payer pour avoir un diplome valable ailleurs où ils pourront enfin être jugés et rémunérés en fonction de leur cursus et de leurs compétences.

    • Au détail près, chère Madame, que les patients ne rencontreront pas les éliminés, qui auraient peut-être été plus brillants que les « causeurs ».

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