Sleeping Giants : Cyrillus préfère miser sur les antifas que sur la droite conservatrice ?

Sleeping Giants

C’était un 25 décembre, à Paris, après le déjeuner de Noël. Les rues commerçantes, noires de monde quelques jours auparavant, étaient désertes. Il n’était sans doute pas prudent, pour une jeune fille, d’aller faire seule une promenade de digestion. Je suis accostée par deux drogués. L’un d’eux sort un cutter, l’autre attrape mes cheveux, mais je m’échappe en courant. Il faut dire qu'ils sont passablement shootés et un peu vacillants. Tout est fermé, sauf une épicerie. Ma porte de salut ! Je m’y engouffre, claque la porte derrière moi, les deux agresseurs, enragés, renversent l’étal de fruits à l’extérieur. L’épicier déboule alors de son arrière-boutique et, montrant la sortie, m’intime l’ordre de partir : « Tu t’en vas ! Je ne veux pas d’ennuis ! »

Voilà comment, à 17 ans, on découvre le monde des adultes et la lâcheté de certains - pas tous ! - commerçants.

Cette petite histoire (vraie) pour illustrer la campagne de boycott entamée par les Sleeping Giants, ces corbeaux du Net qui harcèlent les annonceurs des médias « divergents ». Cela a commencé par Boulevard Voltaire, cela a continué avec Paris Première et CNews, cela se poursuit aujourd’hui avec Valeurs actuelles. Mais pourquoi tant de marques se couchent-elles ?

Ceux qui vendent des chaussettes, ou approchant, ne se mêlent pas, en principe, de politique : dans quelle sorte de magasin demande-t-on au client pour quel parti il a voté, ce qu’il pense de la PMA, de l’accueil des migrants et de la réforme des retraites, avant de le faire entrer ? Ce principe élémentaire de bon commerçant devrait conduire tout naturellement à ignorer ces injonctions. Les comptes Twitter qui les apostrophent sont anonymes - masqués par leur écran qui leur tient lieu de capuche en bon Black Blocs du Net qu’ils sont. Ils se revendiquent, d’ailleurs, « antifas », comme ceux qui cassent les vitrines dans les manifs. Donc, rien de commun entre un brave commerçant et ces individus-là.

Et pourtant, comme l’épicier de ma jeunesse, ces marques-là s’en vont parce qu’elles ne « veulent pas d’ennuis ». Elles redoutent, par-dessus tout, le bad buzz, le name and shame, et savent bien de quel côté, aujourd’hui, sont les puissants. Même les agences de notation prétendent s’arroger le droit de juger sur des critères « éthiques ». Alors, en chiens de Pavlov, sans chercher plus loin, un community manager tremblant promet de lâcher ce média qu’il ne connaît même pas. Et un autre encore, parfois, zélé « remercie » de sa vigilance - on croit rêver ! - les Sleeping Giants dont les menace (réitérées jusqu’à gain de cause) envers la marque sont pourtant à peine voilées : ces marques-là n’annonceront plus, craché juré, c’est promis, sur ce site que les Sleeping Giants disent « raciste, homophobe, ettuttiquanti, onconnaîtlalitanie »...

Le sommet du grotesque a été atteint avec la marque Cyrillus, numéro 236 sur la longue liste (ils en revendiquent un millier... un travail de sape à plein temps : faut-il que Matt Rivitz soit fortuné pour faire prospérer tout ce petit monde-là ?) de ceux que les Sleeping Giants se vantent d’avoir fait « lâcher » Boulevard Voltaire. Cyrillus habille, comme on le sait, toute l’ultra-gauche car les Black Blocs et leurs nombreux enfants raffolent, pour la messe du dimanche, de ses pantalons velours de couleur, de ses mocassins à glands et de ses pulls lambswool en V… quand, évidemment, les tenants de la droite conservatrice lisant Valeurs actuelles et Boulevard Voltaire n’aiment rien tant que les dreadlocks et la capuche noire rabattue sur le front. Cela s’appelle avoir une GRANDE vision commerciale.

Gabrielle Cluzel
Gabrielle Cluzel
Directrice de la rédaction de BV, éditorialiste

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