Terrorisme : une « task force » est-elle nécessaire ?
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C’est une des promesses du candidat Macron quand il briguait la présidence : la création d’une « task force anti-Daech ». Il l’a redit le 25 mai : "J’ai donné des instructions pour la mise en place du centre de coordination des services engagés dans la lutte contre le terrorisme." Soit ! L’intention est fort louable. Surtout après les attentats qui ont frappé l’Europe ces derniers mois. Et puis, vouloir tenir ses promesses l’est tout autant.
Cependant, plusieurs questions se posent sur la création d’un tel « centre ». La première : à quoi sert le Conseil national du renseignement placé auprès du chef de l'État et que le coordinateur du renseignement dirige ? La deuxième : que font nos militaires, notamment des forces spéciales qui sont actuellement sur terrain en Irak, en Syrie et dans la bande sahélo-saharienne (BSS) ? La troisième : si cette structure est créée, quel sera son rôle ? La quatrième : de quels moyens disposera-t-elle ? Va-t-on, comme les comptables de Bercy savent très bien le faire, déshabiller Pierre pour habiller Paul ? La cinquième : qui va diriger ce nouveau centre ? La sixième : quelle sera l’articulation avec le Centre national du renseignement ? Etc. Les conseillers de l’Élysée, de Matignon, de la « Piscine » (surnom de la DGSE) et de Brienne (l’hôtel du ministère de la Défense) y réfléchissent. Ils vont rendre rapidement leur copie pour que l’organisation et les prérogatives de cette nouvelle structure soient arrêtées avant le 7 juin.
L’Élysée, qui a distillé quelques rares informations, explique que cette task force (force opérationnelle, en français) sera composée de 50 à 60 personnes et que "ses décisions tomberont en moins de 30 minutes". Sous-entendu, après une attaque terroriste ? C’est sans doute le scénario le plus plausible, mais on reste interdit devant une telle issue. Car il ne faut pas oublier que le cœur du renseignement, sa raison d’être et toute sa valeur ajoutée sont la quête d’informations avant que les attaques ne surviennent. C’est dans le préventif et non le curatif qu’il prend toute sa dimension. La France dispose déjà des structures compétentes pour effectuer ce remarquable travail de bénédictin : la DGSE, la DGSI, la DRM, etc.
En réalité, ce que craignent les policiers et militaires chargés du « Rens’ », c’est que cette nouvelle structure, au lieu de clarifier les enjeux, ne vienne un peu plus les brouiller et qu’à la question « Qui fait quoi ? » chaque service se refile le mistigri. Et puis, le terrorisme ne se limite malheureusement pas à Daech, AQMI, AQPA ou Boko Haram…
On peut multiplier les questions et retourner le problème dans tous les sens, on a l’impression que cette nouvelle cellule élyséenne qui se veut efficace risque de n’être qu’un coup d’épée dans l’eau. Comme disait Georges Clemenceau, "quand on veut enterrer un problème, on crée une commission". Ça y ressemble beaucoup, même s’il faut espérer que non…
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