Thibaut de La Tocnaye : « J’ose espérer que les élites lanceront la réindustrialisation de la France ! »
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Bruno Le Maire annonce une récession à hauteur de 8 %, conséquence prévisible de cette période inédite de confinement. Comment envisager une reprise de l'économie « après Covid » ?
Réaction de Thibaut de La Tocnaye, auteur du Choix souverainiste, au micro de Boulevard Voltaire. Il plaide pour une réindustrialisation urgente avec un soutien nécessaire et indispensable aux TPE/PMI.
https://www.youtube.com/watch?v=fnKQ5DjEq88&feature=youtu.be
Bruno Le Maire table sur une récession de 8 %. L’économie française s’effondre. Faut-il s’inquiéter et craindre l’après Covid-19 ?
Heureusement, plusieurs pays sont logés à la même enseigne. On aurait pu penser que la France, pays développé et 7e puissance mondiale sur le papier, aurait pu réagir d’une manière plus efficace. Certains sont plus compétents que moi sur le plan médical. Sur le plan proprement économique, la situation actuelle révèle un écroulement. En effet, l’industrie est arrêtée à 50 %. Il va falloir tirer les enseignements et redémarrer. La seule chose positive de cette crise est la conscience d’une nécessaire réindustrialisation. Cette notion d’une souveraineté économique donc relative souveraineté industrielle est relativement claire aux yeux de nos compatriotes.
J’ose espérer que les élites en place accompagneront le mouvement et lanceront une réindustrialisation de la France. Aujourd’hui, il faudrait avoir une certaine souveraineté à l’égard du médical.
Les Allemands s’en sortent mieux parce qu’ils savent tester et fabriquent des respirateurs. C’est invraisemblable. Nos stratégies de confinement sont liées au fait que nous n’avions pas de tests à disposition. Le confinement est un peu la solution du pauvre.
Comment expliquer que nous soyons incapables de produire nous-mêmes nos masques et nos respirateurs, alors que nous sommes la 7e puissance mondiale ? On a l’impression que même si la France voulait se réindustrialiser, elle en serait pour le moment incapable.
Il y a plusieurs raisons à la désindustrialisation. C’est avant tout une volonté politique qui n’est plus là depuis quarante ans. On a laissé faire le marché alors qu’en réalité, des pays comme l’Allemagne, les États-Unis et les pays asiatiques ont une volonté et un État stratège qui dit « Attention, ce secteur ne disparaîtra pas ou on va le protéger momentanément et faire en sorte qu’il ne disparaisse pas ».
En France, la désindustrialisation est la disparition de toutes ces PMI et entreprises à taille intermédiaire. Elles fabriquaient parfois des respirateurs, des masques ou bien d’autres choses. Elles étaient les maillons indispensables aux grands ensembliers. Nous avons encore de grands champions industriels dans pratiquement tous les domaines. Cette chaîne de sous-traitance a été détruite. Elle était incarnée par des PMI et des entreprises à taille intermédiaire qui, chacune, fabriquaient des produits correspondant à autant de métiers. Aujourd’hui, on a les ensembliers, mais ils s’approvisionnent à l’extérieur. Quand on s’approvisionne à l’extérieur, on a un problème. L’analyse est de relocaliser et de recréer des chaînes de fabrication des produits essentiels.
Vous avez parlé, à juste titre, de l’importance des TPE-PME dans ce dispositif. Ce sont les premiers employeurs de ce pays. On a l’impression qu’elles sont les grandes oubliées du plan de secours du gouvernement. Est-il à craindre que ces TPE-PME ne survivent pas à cette épidémie ?
Ce serait doublement scandaleux. Elles nous permettront de réindustrialiser et de se réimplanter dans les fameux territoires. Les PMI et les entreprises à taille intermédiaire sont, à plus de 70 %, implantées non pas dans les métropoles mais dans les zones rurales ou semi-rurales. L’intérêt de la réindustrialisation s’accompagnera d’un renouveau des zones semi-rurales ou rurales. Il faut savoir que deux tiers des Français y vivent.
Je pense qu’il va falloir particulièrement aider les PMI existantes et les redéployer sur le territoire. Ce sont elles qui souffrent le plus, surtout les plus fragiles. Structurellement, certaines entreprises à taille intermédiaire sont très justes en termes économiques. Effectivement, les charges sont reportées et le chômage partiel est mis en place, mais cela ne suffit pas pour ces entreprises fragiles. D’autant qu’aucun chiffre d’affaires ne rentre. Ce sont ces entreprises qu’il va falloir particulièrement aider. Si je vois que le gouvernement n’aide pas suffisamment, surtout ces entreprises qui seront le fer de lance de la réindustrialisation de demain, je prendrai la parole.
En admettant que nous opérions une industrialisation de ce pays, quels seraient les secteurs à privilégier ?
C’est une très bonne question. Je crois que tout le monde est d’accord pour dire qu’il va falloir avoir un minimum de chaînes de fabrication des composants essentiels et des molécules du médical. On s’est rendu compte que l’agroalimentaire, l’énergie, le traitement des déchets, l’eau et même les télécoms étaient des secteurs clés. Il faudra veiller à ce que ce domaine ait une réindustrialisation dans la part essentielle de ces industries.
Pour aller encore plus loin, il faut comprendre que certaines industries correspondent à des éléments clés comme l’électronique, les matériaux composites, la plasturgie, une partie de la métallurgie et de la chimie. Il ne faudra pas tout réindustrialiser dans ce domaine, mais il faudra faire un travail avec les branches professionnelles et l’État stratège. Cela déterminera la relocalisation dans l’électronique, les matériaux composites et dans la plasturgie. Cela nous permettra de ne pas être piégés en cas de crise.
Voilà un guide pour la réindustrialisation. C’est, bien sûr, un très grand chantier qu’il faudra mener entre l’État stratège et les branches professionnelles.
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