Timéo tabassé : derrière la jolie vitrine vendue par le gouvernement, la réalité du SNU

© École polytechnique - J.Barande
© École polytechnique - J.Barande

« Tu casses, tu répares. Tu salis, tu nettoies. Tu défies l’autorité, on t’apprend à la respecter. » Martelant ces mots avec autorité, lors de son discours de politique générale le 30 janvier, le Premier ministre dévoilait son plan pour rendre la jeunesse plus citoyenne. Parmi les mesures présentées à l'Assemblée nationale, la généralisation du service national universel (SNU). Cette formation présente de multiples objectifs : transmettre un socle républicain, renforcer la cohésion nationale, développer une culture de l’engagement et accompagner l’insertion sociale et professionnelle. Sur le papier, le projet vend du rêve. En réalité, Timéo, adolescent de 15 ans scolarisé en Seine-Saint-Denis, s’est réveillé à l’hôpital avec un coquard et cinq jours d’ITT.

 

Certains adolescents sifflent le drapeau français, des joints circulent…

 

Ce n’est pas ce qu’attendait Timéo, en se portant volontaire pour le « séjour de cohésion » auquel il s’est rendu, avec 174 jeunes de la région parisienne, dans le Pas-de-Calais, en avril dernier. Scout, bénévole aux Restos du cœur et apprenti secouriste, il recherchait dans cette formation du SNU un air de rigueur militaire. « En plus, faire le SNU donne des points pour Parcoursup, et permet de passer le code gratuitement », confiait-il au Parisien.

 

Violence des cités importée

 

Certains adolescents sifflaient le drapeau français lors de la montée des couleurs. Un soir, des joints circulaient dans la chambre d’un encadrant, en présence d’une vingtaine d’adolescents. La brigade des mineurs est intervenue et certains encadrants ont dû quitter le centre. Le soir même, trois adolescents attendaient Timéo. « Sale poucave [balance] », il a reçu un coup de poing dans l’oreille. Timéo s’est enfui en courant mais n’ayant plus d’équilibre, est tombé. Il pense avoir perdu connaissance. Il a écopé de cinq jours d’ITT.

La violence qui secoue les cités est importée au SNU, et les volontaires de bonne foi en font les frais. Deux visions s’opposent, et qui ne peuvent cohabiter : ceux qui conçoivent le SNU comme une colonie de vacances, mais elle est gangrénée par la violence chez les jeunes qu’une autorité ferme ne cadre pas, et ceux qui l’imaginent comme un retour du service militaire, impliquant ordre, rigueur et exigence. C’est le cas de ces deux intervenants mis à pied dans un centre de Haute-Savoie pour avoir infligé des punitions physiques humiliantes, à savoir des pompes sur les graviers. Cette dichotomie est sous-jacente dans l’organisation même du SNU puisqu’elle est rattachée au ministère de l’Éducation et de la jeunesse, mais fait appel au ministère des armées pour certains intervenants militaires.

 

Un projet qui peine à convaincre

 

Le SNU apparaît comme une nouvelle application du « en même temps » macroniste : un air militaire, mais ni autorité ni sévérité. Barbara Lefebvre, enseignante et essayiste analyse l’échec inéluctable du SNU sur RMC.  Elle estime qu’il est impossible pour des encadrants de faire régner l’ordre à moins que ce ne soit l’armée qui soit en charge. Pour elle, la solution se trouve dans un retour courageux et franc de la classe politique à un service militaire. Dans la classe politique non plus, le projet porté par Gabriel Attal ne convainc pas. La gauche dénonce « une idée sotte et une obligation inacceptable ». La droite déplore le manque de fermeté de ce séjour. Ainsi, Nicolas Meizonnet, député RN du Gard d'écrire sur son compte X : « Tout cela est pathétique et participe activement à l’affaiblissement de l’autorité dan notre pays. »

Preuve supplémentaire s'il en fallait, que Gabriel Attal peine à accomplir ce qu'il annonçait : « Notre réarmement civique, c’est renforcer l’unité républicaine de notre jeunesse. C’est permettre à tous les jeunes de France de faire nation. C’est le rôle même du SNU. » Jusqu’à présent organisé sur la base du volontariat, le Premier ministre envisage même de généraliser le SNU, malgré les débordements qui se multiplient et le coût qu’engendrent ces séjours (2.187 euros par jeune). « Le SNU est l’héritier d’une pensée magique née dans les années 1960 », écrivait en 2019 dans Le Monde l'historienne Bénédicte Chéron. Mais le SNU, lui, ne semble pas être la solution magique.

Raphaelle Claisse
Raphaelle Claisse
Journaliste stagiaire à BV. Etudiante école de journalisme.

Vos commentaires

13 commentaires

  1. Ça coûterait trop cher? Les Chantiers de Jeunesse, créés à une époque où la France était en faillite militaire et financière, ont coûté bien peu avec un très grand effet !

  2. Macron, Attal, n’ont toujours pas compris que le premier étage du communautarisme, c’est les descendants de l’immigration musulmane ! Travaillés par les réseaux sociaux, ils ont la haine de la France et nous ne sommes pas prêt de les voir s »assimiler ….

  3. Il y a quelques années se murmurait le fait que la JDC avait été refusée par l’Education Nationale, qui s’avérait incapable de la mettre en œuvre. Qui y a eu droit? le ministère de la défense! quel était finalement le principal intérêt de cette journée: la détection de l’illettrisme, on comprend mieux que l’EN n’en ait pas voulu. Aujourd’hui « on » invente le SNU. Pour faire quoi? on ne sait pas bien. Comment? on ne sait pas bien non plus, alors on refile ça aux militaires, qui doivent apprendre le métier de nounou, mais c’est pas grave, ils ont l’habitude de se démerd.. Bon on va quand même leur reprocher d’être un peu trop fermes et … rugueux.

  4. Comme d’habitude un gadget de plus alors qu’ils n’arrivent pas à gérer le quotidien. Balader quelques ados poussés plus ou moins par une idéologie parentale n’en fera pas ni des Hommes ni des militaires, les plus volontaires font déjà les Préparations Militaires qui elles fonctionnent et possèdent les structures morales et physiques nécessaires.

  5. Ce SNU me rappelle les « JET » d’un amiral en retraite qui pensait tout savoir, en mal d’aider les jeunes détenus: loisirs festifs, évasions, ivrognerie, drogue, réglement de compte …. Avec le SNU les dealers ont un nouveau marché à leur disposition ! A quand quelques « tournantes » ?

    • Pourquoi la jeunesse présente au SNU serait-elle différente de la jeunesse qui défraie la chronique quotidiennement ?
      Dramatique…

  6. Trop tard aurait dit Mc Arthur. Depuis la révolution française les élites du pays ont une guerre de retard. Et ça continue.

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