Tourcoing : des professeurs soutiennent l’élève voilée et non la prof agressée

La leçon de la journée de la laïcité en 2020. Capture d'écran © Facebook Lycée Sévigné Tourcoing
La leçon de la journée de la laïcité en 2020. Capture d'écran © Facebook Lycée Sévigné Tourcoing

Nouvelle affaire, énième affaire de voile islamique à l’école. Celle-ci se passe à Tourcoing, dans le lycée professionnel et technologique Sévigné. Lundi dans l’après-midi, un professeur demande à une élève de 18 ans d’enlever le voile qu’elle vient de mettre alors qu’elle n’a pas encore quitté l’établissement. Une fois à l’extérieur, la lycéenne gifle son professeur, qui lui en renvoie une. La lycéenne la roue alors de coups avant de prendre la fuite. Elle est interpellée le soir même à son domicile et placée en garde à vue. Ce mercredi, Warda H. s'est présentée au tribunal sans voile mais coiffée d'un chignon, en veste de tailleur. Elle a été placée sous contrôle judiciaire jusqu’à l’audience fixée au 11 décembre.

Comme il se doit, le règlement intérieur du lycée énonce qu’est interdit tout signe, toute tenue ostensiblement religieuse. Mais on apprend dans un reportage de BFMTV que c’est un « jeu » pour quelques lycéennes de remettre leur voile avant même d’avoir quitté l’établissement. Un « jeu » ? Autant dire un harcèlement à l’encontre de la communauté éducative. Pour voir si celle-ci va craquer, laisser couler - à l’usure.

Le rectorat aux abonnés absents

Le rectorat est injoignable par téléphone et ne répond pas aux mails. Contactée par BV, la direction du lycée nous répond qu’elle n’a aucun commentaire à faire sur l’incident qui s’est déroulé lundi après-midi. Il semble pourtant qu’il y a matière. Ne serait-ce que parce que d’autres élèves ont appelé à bloquer le lycée en soutien à la lycéenne incriminée. Mieux : celle-ci aurait reçu l’appui d’une dizaine de professeurs, au nom de la lutte contre les discriminations, selon nos confrères de Valeurs actuelles. Drôle d’équipe pédagogique, non ? En 2003, le lycée Sévigné avait déjà fait parler de lui à cause d’une enseignante qui portait un « foulard » dans l’établissement.

Soutenue par plusieurs syndicats, l’enseignante a été placée « sous protection fonctionnelle », c’est-à-dire que son administration doit prendre les mesures adéquates pour lui éviter une nouvelle agression. Au lycée Sévigné, les cours sont toujours suspendus, mais il y flotte un tel « sentiment d’insécurité » que le rectorat y a envoyé des Equipes mobiles de sécurité (EMS), dont la fonction est de sécuriser les abords de l’établissement, et des équipes Valeurs de la République, destinées à « soutenir les personnels et proposer des réponses pédagogiques, réglementaires, disciplinaires ». Ils pourront relire ensemble les 148 pages du Vademecum de la laïcité dans l’espoir d’y trouver une solution concrète à ce problème : qu’est-ce qui perturbe la vie scolaire, « Le voile dit islamique (sic), la kippa, le turban sikh, le bindi hindou ou une croix de dimension excessive » ?

La République et le gâteau au yaourt

Anne Genetet, ministre de l’Education nationale, dont c’est la première crise à gérer, a déclaré devant l’Assemblée : « Frapper un professeur, c’est frapper la République. » Gérald Darmanin, député de Tourcoing est sur la même longueur d’onde : « Tout le monde doit soutenir nos enseignants et condamner cette violence contre la République elle-même. » Pauvre République ! L’aura-t-on assez invoquée depuis le premier scandale du genre, c’était à Creil en 1989. Elle ne s’est pas montrée très efficace. Autant cuisiner des gâteaux au yaourt - c'était l'objet de la Journée de la laïcité en 2020 au lycée Sévigné.

A quelques jours de l’hommage prévu à Samuel Paty et Dominique Bernard, qui aura lieu dans les collèges et lycées le lundi 14 octobre, cette affaire de voile tourquennois n’augure rien de bon. Et qu’Anne Genetet ait demandé aux recteurs de lui faire remonter « très rapidement d’éventuels incidents qui donneraient lieu à des sanctions systématiques » est une de ces déclarations qui, tout le monde le sait, et elle la première, ne changera rien aux réalités de l’islamisme qui progresse, à plus ou moins bas bruit,  dans nos écoles.

Samuel Martin
Samuel Martin
Journaliste

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