Toussaint : de la vénération des saints à celle du commerce et du satanisme

Capture écran Truffaut / YouTube
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La période de la Toussaint offre aux catholiques l'occasion de célébrer tous les saints de l'Église le 1er novembre et de célébrer la mémoire des défunts le 2 novembre, Jour des morts. Cette tradition chrétienne, vieille de plus d'un millénaire, est en réalité la continuation et la christianisation de rites celtiques. Cependant, avec la déchristianisation progressive de notre société occidentale, ces traditions reviennent aujourd'hui sous des formes parfois modifiées, voire détournées.

Création et remplacement

Le 13 mai 610, le pape Boniface IV institua une journée dédiée à la vénération de tous les saints, marquant ainsi une étape importante pour l'Église. Ce 67e successeur de saint Pierre a choisi cette date en hommage à la transformation du Panthéon de Rome, alors consacré aux dieux païens des anciens romains, en une église, l'église Sainte-Marie et des Martyrs. Cependant, deux siècles plus tard, en 835, le pape Grégoire IV décida de déplacer la fête de la Toussaint au 1er novembre. Cette décision visait à faciliter l'évangélisation des contrées celtiques où se célébrait Samhain (prononcer « sa-ouine », signifiant, en gaélique, « fin de l'été »), une fête marquant la transition entre les saisons.

L'Église avait perçu des points communs entre Samhain et la Toussaint et espérait, en superposant ces deux célébrations, atténuer la pratique des anciens cultes païens et convertir les peuples celtiques. Vieille de trois millénaires, la fête de Samhain se déroulait du 31 octobre au 2 novembre, période pendant laquelle les druides croyaient que les esprits des morts revenaient visiter les vivants. Pour les apaiser, des danses rituelles et des sacrifices étaient pratiqués. Des offrandes étaient aussi déposées en leur honneur. Samhain marquait, également, la fin d'une année et le début d'une autre, symbolisant un moment de transition profonde dans la spiritualité celtique

Retour de Samhaim et dévoiement

Malgré les efforts de l'Église, certaines croyances et traditions associées à Samhain ont perduré, notamment en Irlande et en Écosse. Aux XVIIe et XVIIIe siècles, certains souverains anglais, désireux de ménager leurs sujets, permirent aux anciennes coutumes de se mêler aux rites chrétiens. Ainsi, la veille de la Toussaint, le 31 octobre, est devenue une fête connue sous le nom de « the eve of All Hallows' Day » (en anglais, la veille de tous les saints). Avec l'immigration massive d'Irlandais et d'Écossais vers les États-Unis aux XIXe et XXe siècles, cette fête traversa l'Atlantique. Au fil du temps, elle se transforma et fut surnommée « All Hallows' Eve », puis « Halloween ». Dans un même temps, en 1911 et sous le pontificat de Pie X, la papauté renforça l'importance de la Toussaint en l'élevant au rang de fête d'obligation et en instaurant le 1er novembre comme jour férié.

Au milieu du XXe siècle, Halloween est devenue une fête populaire aux États-Unis, encouragée par des courants de spiritualité et de folklore, puis amplifiée par la culture de consommation qui en fit un événement majeur. Ce qui était jadis une occasion de respect envers les défunts s'est progressivement transformée en une célébration de la sorcellerie, des créatures surnaturelles et de la superstition, rappelant les procès des sorcières de Salem. Halloween est aujourd'hui une fête commerciale, dont la diffusion mondiale met parfois en avant des éléments en contradiction avec les valeurs chrétiennes traditionnelles, notamment par l'exaltation de figures diaboliques et de symboles obscurs, comme à Toulouse, lors du spectacle Le Gardien du temple – La Porte des ténèbres.

Ainsi, tandis que certains continuent à célébrer la mémoire des défunts à la Toussaint, d'autres choisissent de détourner ces traditions, exploitant l'attrait pour le surnaturel et le consumérisme au détriment des traditions séculaires.

Eric de Mascureau
Eric de Mascureau
Chroniqueur à BV, licence d'histoire-patrimoine, master d'histoire de l'art

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